Gwenaël Bélanger : Casser son image?
Gwenaël Bélanger poursuit son exploration visuelle de l’accident. Une expo très bien menée, mais qui n’est peut-être pas assez risquée.
Il s’est fait connaître principalement par ses images d’objets en chute libre (gâteau, vase, valise, bicyclette, chaise, échelle…). Ces objets étaient captés et parfois suspendus dans différents moments de leur trajectoire fulgurante grâce à la "magie" de la photo et même de la vidéo (principalement grâce à la technique de l’arrêt sur image, mais aussi grâce à divers jeux de montage…).
Dès 2002, Gwenaël Bélanger se lançait dans cette voie que la critique remarqua lors de l’événement L’art qui fait boum en 2003. Parmi les images qu’il réalisa dans cet esprit, celles montrant des miroirs en train de se fracasser retinrent particulièrement l’attention, entre autres lors de la Triennale québécoise au Musée d’art contemporain, en 2008. Dans cette mise en scène de la chute, son oeuvre traite, entre autres, de l’échec, du ratage, de la peur que nous avons tous que tout foire… Dans des pièces plus spectaculaires, ce thème de la chute déborde même dans l’univers de la catastrophe naturelle. C’est le cas de la pièce Le grand fatras (2005) qui peut évoquer des objets emportés dans un ouragan.
Ces jours-ci, il revient principalement sur ce thème de la chute avec plusieurs séries de photos. Le ton est ici un peu plus léger. Pour Série Comic Strip, il a fait tomber (et retomber) des miroirs qui reprennent le motif de l’explosion dans la bande dessinée. Dans Série Color Break, les miroirs en chute montrent des motifs rayés ou en losanges qui donnent à l’ensemble des allures de fête (cela fait penser à des papiers d’emballage pour cadeaux ou au costume d’Arlequin…).
Une expo impeccablement réalisée, mais qui ne réservera pas énormément de surprises aux fidèles de l’artiste, même si quelques pièces explorent néanmoins des territoires moins familiers. C’est entre autres le cas de la pièce Sans titre (Fleurs) où il joue avec de la graisse à moteur et de la vaseline pour créer des effets de cristallisation…
Certes, ces images de miroirs brisés entretiennent une tension intelligente et très efficace avec l’aspect très léché des photos et vidéos que Bélanger réalise. Néanmoins, il serait intéressant et pertinent de rendre compte de l’accident autrement, ne serait-ce que dans le dispositif matériel de l’oeuvre…
À voir si vous aimez /
Les splashings de Pollock, les peintures à la carabine de Niki de Saint Phalle et l’expo Effet de mode de BGL