54e édition de la Biennale de Venise : Entre deux eaux
C’est la 54e édition de la Biennale de Venise. Une année sans grande vague. Voyons de plus près le travail de deux Canadiens qui y sont à l’honneur: Steven Shearer et Lynne Cohen.
Le public montréalais a pu apprécier son travail en 2006, lors de la présentation des finalistes du prix Sobey au Musée des beaux-arts. La peinture du Vancouvérois Steven Shearer est au croisement de Munch, Redon, Toulouse-Lautrec et Beardsley… Un art qui plonge ses racines dans le symbolisme, mais qui entretient aussi des liens avec les mouvements underground des années 50-60. Comme si avaient fusionné le dandy et le hippie, l’artiste décadent et le beatnik, le personnage de Des Esseintes dans le roman À rebours et Mick Jagger. Comme si l’absinthe se mélangeait au LSD.
Dans les tableaux de Shearer, nous pouvons voir des hommes aux cheveux extrêmement longs, hirsutes, habillés d’une manière excentrique. Certes, il n’était pas un mauvais choix pour représenter le Canada. Sa peinture est originale et s’inscrit dans cette tendance très actuelle de l’art contemporain à revenir au symbolisme du 19e siècle. Mais dans le biscornu pavillon canadien, la présentation de ses oeuvres laisse à désirer. Elle est bien trop froide, trop formelle et pas décadente pour un sou…
Et puis nous aurions aimé y trouver plus de nouvelles pièces. Ici, Shearer s’est contenté de montrer des oeuvres anciennes dont certaines remontant à 2004… La réaction du public étranger, mais aussi des spécialistes canadiens présents aux journées de la presse, fut plus que froide.
Il faut aussi signaler la présence à la Biennale de la photographe Lynne Cohen. Dans le cadre d’une expo intitulée Real Venice, montée dans le but d’accumuler des fonds pour protéger Venise des eaux et de la décrépitude, elle montre des photos très réussies, mais sans grande surprise, de sa série Vague Memories.
Elle et les autres artistes participants ont donné une édition du portfolio créé pour l’événement à l’organisme Venice in Peril. Cohen y expose une série d’images très épurées donnant un autre regard (plus moderne) sur Venise la flamboyante… Elle y est installée aux côtés de Nan Goldin, Philip-Lorca diCorcia et Candida Höfer qui, elle, comme à son habitude, ne fait pas dans le dépouillé mais dans le grandiloquent (presque kitsch) en présentant des vues très luxueuses de l’opéra La Fenice.
Même si c’est l’Allemagne qui a remporté le prix du meilleur pavillon avec la mise en scène de Christoph Schlingensief, mort en août 2010, ce n’est pas nécessairement lui qui vole la vedette. Dans le pavillon suisse, Thomas Hirschhorn (dont le Musée d’art contemporain a acquis une imposante pièce il y a quelques années) montre sa vision très critique du monde des communications, mais aussi du marché de l’art clinquant qui domine de nos jours. On fait aussi la queue (parfois plus de deux heures) au pavillon de la Grande-Bretagne où l’artiste Mike Nelson a recréé un labyrinthique atelier à Istanbul…
Jusqu’au 27 novembre