Musée des beaux-arts : Il était temps!
Arts visuels

Musée des beaux-arts : Il était temps!

Le Musée des beaux-arts (MBA) vient d’ouvrir une nouvelle aile mettant en valeur l’art québécois et canadien. Extension de l’ancienne église Erskine and American, elle permet de voir notre histoire de l’art installée avec égards.

Il était temps! Rappelons le fait suivant, presque honteux: jusqu’en 1999, il n’existait pas dans nos musées montréalais de salles exposant en permanence Borduas ni aucun de ses élèves. Ni d’ailleurs de salles permanentes pour les arts modernes au Québec ou au Canada… Imagine-t-on la même chose à Paris, Londres ou New York? Imagine-t-on que les citoyens de ces villes n’aient pas pu voir l’art de leur pays et que les professeurs d’histoire de l’art n’aient pas pu montrer "pour de vrai" les oeuvres du patrimoine national à leurs étudiants? Quel message cela envoyait-il aussi aux touristes?

Il était donc temps que le MBA consacre une de ses ailes à l’art de notre coin du monde. Le résultat est tout simplement magistral. Le pavillon Claire et Marc Bourgie permet de voir six cents oeuvres d’art québécois et canadien, des années 1700 aux années 1960 en incluant l’art des autochtones. Les divers conservateurs concernés, avec le designer Daniel Castonguay et la chef du service de la production des expositions au musée, Sandra Gagné, ont osé une scénographie dynamique. Vous y verrez des murs noirs, bleus, jaunes, des éclairages spectaculaires, un accrochage proche de l’esprit des Salons, de celui de l’atelier du sculpteur ou du peintre pour le niveau 2 (réservé au 19e siècle et au début du 20e siècle)… Certains étages bénéficient même de la diffusion de musiques d’époque. Et une série de panneaux explicatifs permet de faire une visite plus éclairée.

Un bémol: la photographie est la grande absente de cette nouvelle installation. L’art de la photo a pourtant occupé une grande place dans notre histoire de l’art, dans notre prémodernité et notre modernité, comme l’a montré encore récemment le commissaire Sébastien Hudon dans l’expo Photographes rebelles à l’époque de la Grande Noirceur (à Québec au printemps dernier). Une lacune regrettable. Cette installation impeccable réitère les grands modèles de l’histoire de l’art, où sculpture et peinture règnent en maîtres presque absolus. Vous noterez aussi la surabondance des oeuvres de Riopelle (une salle entière lui est consacrée), oeuvres qui en quantité éclipsent presque toutes les autres, même celles de Borduas…

Signalons la qualité de la publication qui accompagne cette ouverture, un panorama exhaustif de notre art, un ouvrage de référence incontournable sur la création d’ici, type de livre qui manquait cruellement.

Pavillon Claire et Marc Bourgie
1339, rue Sherbrooke Ouest, Montréal
www.mbam.qc.ca