Gaëtane Verna : MAJ-EUR
Arts visuels

Gaëtane Verna : MAJ-EUR

Gaëtane Verna quittera le Musée d’art de Joliette (MAJ) pour la prestigieuse institution The Power Plant à Toronto. Mais avant de plier bagage, elle présente une oeuvre majeure d’Alfredo Jaar.

C’est une des expos les plus importantes ces jours-ci au Québec. La directrice du MAJ, Gaëtane Verna, a réussi un coup de maître en arrivant à montrer Les cendres de Pasolini, cette oeuvre vidéo d’Alfredo Jaar présentée en 2009 à la Biennale de Venise.

Dans un collage d’extraits de films et d’entrevues du cinéaste, scénariste, poète, écrivain et intellectuel italien, Jaar met en scène la volonté de Pasolini de dénoncer notre société de consommation qui mène à une acculturation, à une homogénéisation des produits qui se prétendent encore culturels et même de nos manières de vivre. Pasolini parle aussi de censure, d’autocensure, de l’impact du pouvoir sur le corps, de la "réduction du corps à une marchandise, de l’annihilation de l’identité des individus" par ce pouvoir.

Pasolini, qui est mort dans des circonstances étranges, a souvent dénoncé les liens entre le gouvernement italien et la mafia ainsi que la survivance des idéologies fascistes. À notre époque où les incuries du gouvernement Charest laissent planer de sérieux doutes sur l’honnêteté de nos dirigeants, voilà qui ne manque pas de pertinence. La question est alors de savoir qui ose (qui peut?) encore critiquer nos gouvernements et nos modes de vie? Peu le font. Jaar est un des rares artistes-intellectuels contemporains à utiliser sa renommée à cette fin.

Cette présentation est entre autres accompagnée de la projection de La jetée de Chris Marker et de l’exposition des gravures Les désastres de la guerre et Les caprices de Goya. Durant le temps des Fêtes, le MAJ est une destination à ne pas rater.

Du MAJ au Power Plant

La directrice qui a mis en place cette intelligente programmation partira en mars pour le Power Plant, à Toronto. À Joliette, elle aura montré des expos passionnantes sur Gabor Szilasi, Diane Landry, Ed Pien, Luis Jacob, Young-Hae Chang Heavy Industries et bien d’autres, dont plusieurs ont circulé au pays. Elle y a mis en valeur la vidéo en faisant le pont avec la collection du MAJ. Et puis elle y a présenté du Bill Viola, qui, selon elle, "utilise des moyens différents de l’art ancien, mais parle de thèmes très communs avec l’art religieux présent dans les collections à Joliette".

Après un processus de sélection de huit mois, Gaëtane Verna sera la première femme à diriger la prestigieuse institution torontoise. Comment voit-elle son travail? "The Power Plant est sur le site du Harbourfront, un centre multidisciplinaire qui accueille plus de trois millions de personnes avec de la danse, du théâtre, des conférences, des concerts extérieurs… Je veux amplifier les liens avec ce lieu, entre ces diverses disciplines présentées et l’art contemporain. Cela peut se faire en créant des échanges quant à nos programmes éducatifs ou tout simplement en coordonnant nos vernissages. Je veux aussi élaborer des expositions en coproduction avec différentes institutions. Je veux continuer de penser des expos en me demandant toujours quelle est la pertinence de montrer ces oeuvres, à ce moment-là et dans ce lieu…" Une question en effet essentielle.