L’attrait des choses : Vers le futur
L’échec du matériel? Pas du tout. Pour les artistes de l’exposition L’attrait des choses, il y aurait même un lien entre écologie et matérialisme.
Matthieu Petit
La pensée écologique teinte l’approche de plusieurs artistes contemporains. Dans les années 70, ceux-ci allaient dans la nature, travaillaient avec des matériaux glanés sur place, mais à partir des années 90, la culture matérielle est venue nuancer la rhétorique environnementale. Gentiane Bélanger, commissaire de l’exposition L’attrait des choses, s’intéresse à ce changement de paradigme. "Effectivement, il y a eu un changement d’attitude par rapport au matérialisme. Avant, les artistes se permettaient de critiquer notre consommation, mais aujourd’hui, ils ne prétendent plus se positionner à l’extérieur du phénomène. C’est une sorte d’humilité, ou plutôt, c’est une reconnaissance de la complexité de la réalité. La posture est désormais ambivalente."
Dans L’attrait des choses, la critique et la morale cèdent le pas à la fascination. "Au lieu de tenir un discours écologique avec sévérité, on mise sur l’inventivité et la créativité."
Parmi ces artistes qui interrogent notre rapport à l’objet, on trouve le duo canadien T&T, reconnu pour ses dessins architecturaux. "On est dans un monde fantasmé, vaguement postapocalyptique. Ils proposent une nouvelle organisation sociale qui est beaucoup plus bricoleuse… C’est le calme après la tempête, dans un monde un brin hipster."
L’expo compte également une maquette – une cité laboratoire – issue du futur suranné tel qu’imaginé par Daniel Corbeil, de nombreux éléments caricaturaux du métaprojet Safety Gear for Small Animals Inc. de Bill Burns, ainsi que deux "bricolages" (une murale de sirènes pornos, et un arbre synthétique en équilibre sur une moto calcinée) du collectif BGL. "Dans les artistes québécois, BGL est sûrement le plus représentatif de l’ambivalence entre une posture critique environnementale et un côté ludique, patenteux. L’imaginaire qui réunit les matières est tellement fort qu’on en retire une grande inspiration."
Par l’étonnante ouverture de son propos et la qualité des artistes réunis, L’attrait des choses s’avère une exposition qui marquera l’année en cours.