Les arts en Nouvelle-France au MNBAQ : Au temps jadis
Le MNBAQ nous propose de faire un saut au coeur de notre passé avec Les arts en Nouvelle-France, qui présente un regard nouveau sur le développement de notre culture.
Une telle exposition s’impose, puisque cette période de l’histoire de l’art québécois est plutôt méconnue. "J’estime que plus de 95% des oeuvres qui ont été produites en Nouvelle-France ont été détruites", relate Laurier Lacroix, co-commissaire et professeur associé au Département d’histoire de l’art de l’UQAM. Par ailleurs, la nature et l’envergure de l’exposition constituent une première. "On réunit ce qui a résisté aux incendies, aux changements de goût, et parmi ce qui reste, les pièces les plus significatives, les plus belles et intéressantes, religieuses et profanes, publiques et privées, autant françaises que québécoises, tout en intégrant l’art amérindien", explique Daniel Drouin, conservateur de l’art ancien avant 1850 au MNBAQ, également co-commissaire de l’exposition.
Si on s’intéresse aux formes et à l’esthétique, c’est surtout la dimension sociologique qui domine. "On essaie de faire une synthèse de l’appropriation d’un nouveau pays, d’un nouveau continent, de la rencontre des cultures autochtones et européennes, et de voir comment en émerge une troisième culture, locale", raconte M. Lacroix. Dans cette perspective, on s’est intéressé à un champ très large de disciplines: peinture, sculpture, orfèvrerie, faïence, textile, mobilier et arts décoratifs témoignent du goût nouveau et de l’esthétique qui se mettent en place, car au 18e siècle, la France devient une référence de plus en plus lointaine.
Ce que l’exposition nous révèle, c’est le besoin qu’avaient les gens de s’entourer d’objets, à travers un regard sur l’art de vivre des colons en Nouvelle-France. La culture est donc évoquée dans une perspective assez large. "C’est très riche sur le plan des connaissances, mais aussi sur le plan identitaire. L’exposition a une double fonction: elle nous fait découvrir des formes d’art qu’on connaît moins, mais elle nous renvoie également aux conditions très difficiles qui entouraient cette création. Que les artistes aient patenté tout ça, c’est impressionnant", s’exclame Laurier Lacroix. Le visiteur devra peut-être réapprendre les codes de l’art puisque, les artistes n’ayant pas accès aux normes académiques européennes, les oeuvres peuvent parfois paraître maladroites, malgré l’ingéniosité dont ils ont dû faire preuve pour les créer. Mais pour Daniel Drouin, les objets "sont autant de témoignages qui nous font remonter dans le temps. Un objet nous donne accès à tout un univers, à des gens, des formes et une époque".
Chose nécessaire: une publication accompagne l’exposition. Elle présente le développement des arts en Nouvelle-France de manière chronologique, alors qu’en salle, on l’aborde à travers trois thématiques. Dans un premier temps, "Représenter" nous fait découvrir les acteurs principaux de notre histoire, ainsi que les lieux tels qu’ils ont été tracés par les cartographes et ingénieurs qui découvrent la nouvelle contrée. Puis, avec "Décorer", on découvre de quelle manière les gens s’entouraient d’oeuvres d’art, autant dans les lieux de pouvoir que dans les lieux quotidiens. Finalement, "Prier" présente les oeuvres d’art religieux.