Pour une rétrospective d’une soixantaine d’oeuvres, une trop grande place a été donnée à des pièces récentes. En particulier, nous aurions aimé voir plus d’oeuvres des années 60 et du début des années 70, un grand moment dans la production d’Hurtubise. De cette époque, nous noterons la présence de pièces comme Clara et Paméla, toutes deux de 1965. Que pourrions-nous dire de ces tableaux? Qu’il a su créer une impressionnante tension entre, d’une part, le plan, le statisme de la toile et, d’autre part, le geste pictural, la capacité plastique de la peinture à incarner le mouvement? Plusieurs des oeuvres de cette époque représentent une appropriation des splashings à la Pollock, mais sont aussi une sorte de pavé dans la mare du monochrome et d’une certaine idée de l’abstraction. Certes. On peut aussi dire qu’il a réalisé un travail qui met en scène notre désir de perfection et de contrôle et la nécessité de l’imprévu et du hasard? La peinture d’Hurtubise est plus que cela. Elle est surtout une citation de l’art moderne et de toutes les possibilités du matériau pictural. Dans les années 60 (comme l’a écrit Fernande Saint-Martin), cela a fait rapidement de lui un artiste plus pop art qu’abstrait. Ajoutons qu’il a aussi su jouer brillamment avec le langage de l’art optique sans tomber dans cette catégorie… Là encore, nous aurions apprécié une mise en contexte éclairante. Nous aurions aussi aimé voir des oeuvres en néon ou avec ampoules électriques de la fin des années 60, qui suscitèrent un grand intérêt auprès de la critique, et dont vous pouvez voir un exemple dans le catalogue… Le visiteur notera aussi le nombre très limité de panneaux explicatifs (et le fait que sur l’un d’entre eux, nous avons retrouvé une oeuvre de 1961 faite de peinture et d’émail sur toile identifiée comme étant Retombée radiocative [sic])… Nous aurions aimé en savoir plus sur cette série radioactive du début des années 60, sur les participations d’Hurtubise à la Biennale de São Paulo… Là encore, il faudra se replier sur le catalogue.
Une expo où le travail de médiation et de sélection ne semble pas avoir été assez poussé. Dommage. Il y a dans l’oeuvre d’Hurtubise des questions sur la peinture et les images en général qui auraient mérité des explications. Une expo à voir néanmoins afin de tenter de mieux se souvenir et de mieux comprendre un pan de notre histoire de l’art.
Jusqu’au 2 septembre
Au Musée d’art de Joliette