En Masse à la Galerie d'art du Centre culturel de l'Université de Sherbrooke : Dessiner sur les murs
Arts visuels

En Masse à la Galerie d’art du Centre culturel de l’Université de Sherbrooke : Dessiner sur les murs

Dessiner sur les murs, lubie d’enfant en proie à un accès de rébellion? C’est pourtant ce à quoi s’active présentement à la Galerie d’art du Centre culturel de l’Université de Sherbrooke la bande d’artistes réunis sous le parapluie En Masse. Voir s’est rendu sur place.

Juchés sur des échafaudages, ils s’activent à finir de couvrir les murs de la Galerie d’art du Centre culturel de l’Université de Sherbrooke où se profile déjà une ribambelle de crânes, de personnages d’inspirations manga, de jolies demoiselles et un gorille qui pioche sur un ordinateur, entre autres délirantes créatures. Au son d’un beat bien gras de Killer Mike que bombardent à plein volume les haut-parleurs – une atmosphère fraternelle digne d’un bloc party -, ces bédéistes, designers graphiques, graffiteurs ou tatoueurs usurpent sous l’œil fasciné du public le blanc des cimaises où l’on suspend habituellement des toiles.  

Tous réunis sous le parapluie En Masse, une vaste nébuleuse d’artistes qui depuis Montréal étend ses tentacules partout sur le continent, ces quatorze marginaux du dessin de tout acabit mettent la main à la pâte pour En Masse: Arts Urbains @ Jeux, une des nombreuses œuvres qui seront créées aux quatre coins de Sherbrooke en marge des Jeux du Canada (quelques clins d’œil subtils à des sports ont été dissimulés dans le dense agrégat noir et blanc qui ronge les murs). «On a toujours été jaloux des musiciens qui peuvent jammer», explique au sujet de la naissance d’En Masse Ruppert Bottenberg, qui préfère à l’expression «tête dirigeante» le chapeau de «chef d’orchestre» (poste qu’il partage avec le fondateur Jason Botkin). «Créer des murales en groupe, c’est enfin notre occasion de jammer. Ce qu’on fait présentement, c’est un peu un show rock silencieux. Les gens peuvent nous observer en plein travail.»

Fondé en 2009 dans un contexte complètement déhiérarchisé, le réseau En masse infiltre les espaces consacrés du milieu de l’art avec un grand A, musées et galeries où ses collaborateurs, des artistes qui ont pour la plupart appris hors des grandes écoles, peinent encore à être légitimés. «C’est notre mandat, notre but, de s’insinuer dans ces lieux-là. Les artistes qui œuvrent dans des disciplines marginales n’y sont pas toujours respectés, parce qu’ils ne font pas de la peinture ou des œuvres conceptuelles. Quand on a fait une murale au Musée des beaux-arts de Montréal en 2011, il y a plusieurs artistes qui y mettaient littéralement les pieds pour la première fois. Et c’était pour dessiner sur les murs, imagine!»

Mais jusqu’à quel point ce labeur de longue haleine – les 14 artistes auront consacré deux semaines à encrer la Galerie – peut-il réellement être improvisé? «C’est une des règles d’En Masse, il faut que ce soit improvisé. Nous arrivons avec nos cahiers de croquis, mais c’est impossible de prévoir ce que vont faire les autres. Je n’aime pas me servir de ce mot-là parce que c’est un peu cliché, mais ce qu’on fait, c’est vraiment organique. Le travail suit sa propre piste intuitive.» Au nombre des autres marques de commerce d’En Masse comptent l’emploi systématique du noir et blanc (question que puissent se fondre les styles parfois diamétralement opposés) et l’inclusion d’artistes locaux. La présence de quatre Sherbrookois au sein du contingent s’activant présentement sur le campus expliquerait selon Bottenberg le foisonnement de crânes tout droits sortis d’une pochette de disque métal (Sherbrooke est une terre sacrée de la musique métal!).

«On observe de plus en plus un changement dans les préférences des gens, une ouverture d’esprit, se réjouit Bottenberg. Un certain milieu de l’art, à force d’être trop opaque, s’est aliéné une partie du grand public. Ici, les enfants, les matantes et les gens ordinaires peuvent entrer, et même s’ils ne comprennent pas la philosophie à la base du projet, ils sont en mesure d’en apprécier l’énergie.»

Création devant public

Les 25 et 26 juillet de 13h à 16h30

Vernissage

Le 6 août à 17h

Le projet En Masse Arts Urbains @ Jeux est à l’affiche à la Galerie d’art du Centre culturel de l’Université de Sherbooke jusqu’au 12 octobre.