P.K.P. HOCKEY P.Q. / Marc-Antoine K. Phaneuf : Canadiens versus Nordiques
La proverbiale fièvre des séries gagne la rue du Pont, mais au-delà du bar Le Dauphin, avec une exposition baveuse de Marc-Antoine K. Phaneuf.
Aussi auteur de trois livres aux éditions Le Quartanier (Cavalcade en cyclorama, Téléthons de la Grande Surface, Fashionably Tales), Marc-Antoine K. Phaneuf cultive un intérêt marqué pour la culture populaire. Il a, notamment, présenté des corpus d’œuvres inspirées par des livres de cuisine aux couvertures peu ragoûtantes (Vieux buffet) mais aussi par les trophées sportifs.
Cette fois, il s’intéresse plus précisément ay hockey, mais aussi à son potentiel comme outil de manipulation politique. « Le titre P.K.P. HOCKEY P.Q. laisse un peu entendre que si PKP ramène le hockey à Québec, ben il va réussir à séduire le PQ donc le Parti québécois mais aussi la Province of Quebec. […] Je veux laisser croire que dans cette joute politique là on réussit à se faire du crédit politique en donnant du pain et des jeux au peuple. J’espère que le spectateur réussit à voir ça dans l’expo. »
Sans plonger dans la poésie de Serge Lemoyne, peintre québécois dont il s’avoue toutefois influencé, MAKP s’amuse à copier les bannières des numéros retirés qui ornent le plafond Centre Bell. Seule différence avec les originaux? La typographie des chiffres.
Mais le clou de l’installation, c’est vraiment les 24 coupes Stanley, celles que les Canadiens ont gagnées et une de plus pour la chance. « J’ai en rajoutée une 25e un peu comme par superstition en me disant que si j’en fabrique une 25e ils vont gagner cette année! Vraiment dans l’optique du fan un peu fou, l’idée c’est de mettre la charrue devant les bœufs.» En ce sens, l’artiste porte aussi le chapeau (ou le jersey) du partisan du Bleu-blanc-rouge. Du fan des Habs totalement irrévérencieux, par ailleurs, puisque l’expo a été spécialement pensée pour Québec. « J’avais envie de faire une rencontre forcée entre un discours politique autour du retour des Nordiques, on voit les quatre papiers peints avec les messages, et puis une célébration de la gloire des Canadiens avec les 24 et même la 25e coupe Stanley et les bannières des joueurs retirés qui sont au centre. Un peu comme l’éléphant au centre de la pièce. On a beau préférer les Nordiques, la gloire des Canadiens est quand même là et elle est un peu dérangeante. »
L’art contemporain c’est pas pour juste pour les porteux de foulards
Dans la fenêtre qui donne sur la rue du Pont, l’œil du passant est attiré par une coupe Stanley entourée par un tulle rouge velours. Avec cette vitrine semblable à celles du magasin Laliberté, l’artiste applique une espèce de logique marchande pour amener des badauds vers son expo. Le Lieu devient donc un point de rencontre improbable entre le sportif et l’artiste qui s’ignorent et/ou se détestent depuis la polyvalente. « Moi je me sers du hockey comme levier pour faire de l’art contemporain qui peut intéresser un public non initié. Du coup, dès qu’on voit des bannières du Canadien ou qu’on voit des coupes Stanley en papier d’aluminium ben on a envie d’entrer. »
Marc-Antoine K. Phaneuf questionne toutefois le poids médiatique de la LNH en sol québécois. « Le cahier sport prend autant de place que le cahier actualités. À quelque part, c’est fou de voir que c’est ça qui vend. Pis bon, moi je milite beaucoup pour qu’on donne plus de place aux arts dans les journaux. » Pierre-Karl Péladeau, magnat de la presse, homme politique et muse entendra-t-il le message? À suivre.
Jusqu’au 3 mai 2015
Le Lieu (345 rue du Pont)