Ce week-end dans La Presse + est paru un dossier intitulé Femmes d’opinion recherchées. Dans un des articles, intitulé Peur de déplaire?, la journaliste Olivia Lévy s’attarde à la manière dont les femmes émettent des opinions, dans l’espace public.
D’entrée de jeu, on souligne que si, évidemment, plusieurs femmes se voient confier des tribunes, elles demeurent minoritaires comparativement à leurs collègues masculins. Et en fait, non seulement elles sont moins nombreuses, mais leur manière de défendre des opinions semble différente de celle des hommes; les femmes ayant davantage « peur de déplaire », lorsqu’elles commentent ou défendent certaines positions.
Denise Bombardier, interviewée dans l’article, affirme : « Il y a très peu de femmes qui assument et qui acceptent de ne pas avoir de cour. Je ne cherche pas de courtisans, mais des interlocuteurs »… Blergh!
Pour le coup, ces paroles avouent à mots couverts que les femmes qui « s’expriment » ne sont pas celles qu’on aime ou qu’on veut avoir près de soi. Au mieux, on discute avec elles, à une perche de distance – mais sans plus. Des courtisans ou des interlocuteurs. La femme opiniâtre n’est pas celle qu’on baise. Ouvrir sa gueule équivaut en quelque sorte à faire le sacrifice d’une certaine part de sa féminité.
Denise Bombardier me donne souvent des envies de défenestration.
Mais blague à part, cette affirmation déprimante suggère également que les femmes, lorsqu’elles s’expriment publiquement, n’ont pas tant peur de déplaire pour ce qu’elles disent, mais pour la manifestation de ce qu’elles sont, en filigrane de leurs propos. Ainsi, elles seraient plus timides de défendre des positions impopulaires, ou hésiteraient davantage à « foutre la marde », en bonne et due forme.
À mon avis, le problème est pris à l’envers. Peut-être que les femmes encaissent en effet les critiques plus durement. Mais je me méfie des généralisations, et j’ai surtout l’impression que si les femmes craignent davantage, c’est aussi parce qu’on les critique plus durement. Tout simplement. Parce qu’une femme qui s’exprime, une femme qui brasse la cage, fait précisément le contraire de ce qu’on attend d’elle. Ainsi, les réactions sont souvent plus virulentes, et les attaques plus personnelles.
C’est peut-être, d’ailleurs, ce qu’il faudrait signaler à Benoît Dutrizac qui, dans le même article, se dit complètement « halluciné » d’être incapable de trouver des femmes, surtout des jeunes femmes, game de se jeter dans la mêlée sur des sujets chauds.
Je pense qu’il ne faut pas y voir là une question de « nature » ou de « manque de cran». La réalité est à mon avis plus brutale: on tolère mieux que les hommes jettent des pavées dans la marre. Point, barre. Pour être écoutée, les femmes doivent prendre plus de précautions. Les coups de gueule font partie du lot des privilèges masculins. Parce qu’une femme qui brasse la cage n’est pas tant une femme de conviction qu’une hystérique; une créature qui maîtrise mal les émotions qui l’assaillissent.
Ainsi, pour que leurs opinions soient respectées, les femmes devraient édulcorer davantage leur propos; de manière à se rapprocher le plus possible d’un certain consensus beige, qui correspond au fond au « périmètre d’opiniâtreté » que les femmes peuvent se permettre, sous peine de se voir affubler une étiquette d’écervelée.
La parole des femmes se doit d’être sage, nuancée, douce, soupesée, bienveillante. Le vitriol et la passion sont avant tout l’affaire des hommes. La « conviction » féminine, quant à elle, doit pouvoir s’exprimer les jambes croisées et les paumes à plat, avec un visage de marbre. On respecte davantage l’indignation des hommes; dont on ne doute pas qu’elle soit fondée sur des motifs intellectuels et «rationnels ». Les femmes, présume-t-on, n’ont que des humeurs…
Or, il faut arrêter d’accepter que les femmes soient dépeintes comme des êtres qui n’échappent à leur « sentimentalité » que lorsqu’elles adoptent la ligne stricte de la modération, de l’indulgence et de la souplesse. Les hommes ne devraient pas avoir le monopole de la passion, de l’intransigeance ou même du « radicalisme ».
Par ailleurs, notons qu’il y a peut-être là, à mon avis, une démonstration de l’échec de ce fameux « féminisme pop » dont on a tellement parlé dans les dernières semaines. Si on continue de s’attendre à ce que les femmes soient calmes, posées et modérées, c’est peut-être justement parce que même la représentation du « féminisme », dans les médias de masse, se colle, plus souvent qu’autrement, à cette image gentille, docile et « consensuelle » de la féminité. Le féminisme pop est en somme un féminisme tranquille et dompté; qui ne déroge en rien au modèle auquel les femmes doivent se conformer partout ailleurs dans l’espace public. Y compris au sein des tribunes qu’elles occupent.
Or, si on infuse de « douceur et de tranquillité » tout ce qui renvoie au « féminin » autour de nous, même le féminisme, je me demande comment on peut espérer que les femmes se sentent à l’aise d’en mener aussi large que leurs comparses masculins. « Toutte est dans toutte », comme dirait l’autre. Enfin, j’ai besoin d’un autre café.
***
Et moi, sur twitter, c’est @aurelolancti
L’appologie du discour UQUAmien…ce que vous savez, vous laver apprie a l’ecole. Voyager un peu du haut de vos 23 ans…elargisser vos horizon..decouvrer ces quoi les vrais problemes dans le monde.
Ps: le BC, ces pas voyager ca…
par votre attaque personnelle, vous venez de lui donner un point. Merci de vous réfuter vous-même.
« Parce qu’une femme qui s’exprime, une femme qui brasse la cage, fait précisément le contraire de ce qu’on attend d’elle. Ainsi, les réactions sont souvent plus virulentes, et les attaques plus personnelles. »
Bravo pour ce bel article! Continuez surtout! Quant à moi, je pense surtout que nous avons besoin de la diversité; des sexes, des opinions, des cultures. Femmes ou Hommes, hétérosexualité ou homosexualité, peu importe. La Vie est tout aussi complexe que la somme des paradigmes, des points de vue et des façons de l’exprimer…
Ce billet est ridicule et plein de ridicules préconceptions. Tant qu’il y aura d’aussi ridicules préconceptions, dans un sens ou dans l’autre, nous aurons d’aussi ridicules billets, malheureusement (voire que la chose n’est pas gagne d’avance avec autant d’humains beaucoup moins conscients qu’ils ne le croient.)
Ça me rappelle tellement, mais tellement, tout ce dont Pauline Marois a eu à subir du fait qu’elle était une femme en politique et surtout à titre de Première Ministre.
Pauline Marois a fait l’objet de mépris, de grossièreté, de soupçon de malhonnêteté en raison de la demeure qu’elle possédait à l’Île Bizard.
Au cours de la dernière campagne électorale, on a su que la résidence de François Legault valait 4 millions de $. En a-t-on entendu parler? A-t-il eu à subir des critiques acerbes relativement à cette somptueuse demeure? Des soupçons sur son honnêteté? Des questionnements sur la provenance de cet argent? Les journalistes en ont-ils fait écho? Pas le moins du monde. C’est passé comme du beurre dans la poêle.
Voilà deux réalités étrangement ressemblantes, mais dont l’une a fait les frais de toutes sortes de soupçons, de malveillance, de propos grossiers et, j’ose dire, haineux relativement à cette richesse, alors que pour l’autre, cette nouvelle a passé sans provoquer le moindre remous. Deux poids, deux mesures diamétralement opposées.
Et en ce qui concerne Madame Marois, la hargne dont elle a fait l’objet de la part du Parti Libéral du Québec et de la Coalition avenir Québec, cette hargne, dis-je, a atteint son paroxisme, lorsque ces deux partis ont convoqué Madame Marois et son époux, Claude Blanchet, à une commission parlementaire pour que ces députés hargneux et vicieux les interrogent sur la hauteur de leur richesse et sur la provenance de celle-ci.
Voilà comment on traite encore les femmes dans notre société, que l’on dit évoluée et moderne… Et voilà aussi et surtout pourquoi les femmes ont tant de réticence à s’engager en politique, quand elles savent le mauvais sort qui leur sera fait sans vergogne… Et que rien, absolument rien, ne leur sera épargné.
Vous êtes apparemment une jeune femme, Mme (ou serait-ce Mlle?) Lanctôt. Une vraie chance. Car pour ma part, j’ai perdu cette jeunesse si vivifiante.
Arrivé à la soixantaine, on commence à ramasser ses billes, à jeter ce qui ne servira plus. Hélas. Malgré une certaine jeunesse de coeur, le corps ne veut pas toujours suivre…
Vous nous entretenez de la «place» qu’occuperaient les femmes dans la société. Que celles-ci seraient mal appréciées. Qu’elles se devraient d’être presque hommasses dans leur manières pour mieux percer une certaine opacité culturelle.
Je ne sais pas.
Moi, j’ai toujours préféré des femmes féminines. Gentilles et bonnes. Capables de consoler quand il le faut. Ce qui en fait des personnes à part entière. Et même souvent de loin plus valables que des tas de rustres barbus et incultes…
Eh bien, par vos propos, vous donnez raison à cette jeune femme qui, du haut de ses 23 ans, semble voir plus clair que vous.
Je trouve que vous avez entièrement raison. Je ne sais pas exactement ce qui en est au Québec, mais certaines auteures et blogueuses anglophones ont carrément subi du harcèlement et des menaces, à caractère sexuel et misogyne, d’un degré et d’une quantité auxquels leur collègues masculins échappent. Telle est la réalité malgré le déni de certains qui voudraient nous faire croire à l’égalité des sexes (ou pire, à une supposée domination féminine). On est à même de constater dans les commentaires de chroniques ou blogues écrits par des femmes le recours au sexisme haineux. Au pire, un homme se fera-t-il reprocher son biais masculin, mais jamais je n’ai vu la violence que certaines femmes reçoivent. Une telle réception peut en décourager certaines, et tel en est certainement le but. La peur a toujours servi à tenir les femmes à leur place, dociles, féminines quoi. Soit on devrait se taire et souffrir en silence à ruminer notre indignation, soit on devrait s’empêche carrément de penser pour plaire à ces machos qui, tenant à leurs privilèges, ont besoin de se conforter dans leur idée que c’est l’homme qui domine et qu’il doit en être ainsi.
Hallucinant ! Les gens qui ne sont pas d’accord, avancez donc ne serait-ce qu’un argument pour soutenir votre point de vue, au lieu de vous attaquer lâchement aux origines académiques ou, pire, à l’âge de l’auteure ? Une pensée n’est pas plus valable basée sur l’âge de la personne qui l’émet. Et il n’est pas question ici de préférences personnelles. Il est question de différence de traitement : la colère exprimée de la personne née avec un pénis n’est pas reçue et traitée de la même façon que la colère exprimée d’une personne née avec un vagin. Dans le dernier cas, c’est généralement accueilli de façon négative.
Marie-Sophie : vous résumez bien la différence de traitement. Et sur ce point l’auteure vise juste. Mais si je regarde le cas des Femens, qui a lui aussi été qualifié de « pop féminisme », j’y vois de la radicalité et de la passion…(mais assez peu de profondeur, beaucoup de contradictions, de la grosses provoc…puis elles sont probablement trop naïves pour comprendre qu’elles sont des idiotes utiles d’une joute géo-politique et qu’elles servent donc, in fine, les ambitions très peu progressistes d’hommes qui les utilisent comme des putes politiques).
Mais laissons cette paranthèse de côté, et dites-moi : est-ce vraiment de ce genre de militantisme que le monde a besoin? Plusieurs traits typiquement masculins sont réellement des nuisances. Lorsque je vois une femme devenir agressive, je n’y vois aucune « émancipation » : elle s’est plutôt abaissée là où seuls les hommes seuls s’abaissaient autrefois. #leprogrès
Cette auteure illustre fort bien le problème avec humour. http://www.gabbysplayhouse.com/webcomics/sexism/
Et oui! Quand une femme se tient simplement debout, ça insulte ceux qui voudraient qu’elle rampe à leurs pieds.