Comme tous les
observateurs de la politique québécoise, j’ai lu le “texte fondateur
intégral”
de la Coalition pour l’avenir du Québec, lancée cette semaine par MM. François
Legault et Charles Sirois.
Vous ne serez pas
surpris d’apprendre que j’étais de ceux qui attendaient le document avec
impatience et trépidation. Aucun des partis politiques actuels du Québec ne me branche
particulièrement (pour des raisons que j’aurai peut-être un jour la chance
d’expliquer). La possibilité qu’une nouvelle formation voit le jour me
réjouirait assez en principe, pourvu qu’elle soit différente, débarrassée des
lourdeurs du passé, et prête à bouger rapidement, et radicalement, sur un
ensemble de questions.
Le texte fondateur
de la Coalition n’est pas mauvais. J’aurais
personnellement préféré quelque chose de plus punché et direct — de moins
politicien et langue de bois — mais je présume qu’on écrit ce genre de
document en sachant qu’il sera scruté à la loupe et déformé de toutes les manières
possibles, de bonne et de mauvaise foi, et qu’on le stérilise en conséquence. C’est
(malheureusement) normal et (malheureusement?) signe qu’on a affaire à des gens
d’expérience. Il faudra attendre la suite pour connaître les détails dans
lesquels, c’est bien connu, le diable se cache.
On a surtout reproché au texte d'être trop vague et de ne rien proposer de révolutionnaire. Mais je pense qu'en lisant entre les lignes, on voit se dessiner un programme relativement clair. Pour les
amateurs d’exégèse politique, je propose donc une certaine lecture du
manifeste de la Coalition en 10 extraits choisis — sans nécessairement endosser mes propres interprétations ou tous les aspects du programme. (Note: les extraits sont en caractères gras.)
1) Il nous faut
voir les choses en face : la situation du Québec et les défis auxquels nous
devons faire face — sociaux, économiques, culturels ou environnementaux — sont
bien différents de ceux d’il y a cinquante ans, à l’aube de la Révolution
tranquille. Les façons de faire du passé, même si elles nous ont globalement
bien servis, ne répondent plus à nos besoins.
Traduction: Nous
sommes descendants des Lucides de Lucien. Le modèle de la Révolution tranquille a fait
son temps. Il est temps d’arrimer notre société au reste de l’Amérique du Nord. Note aux nostalgiques de la ceinture fléchée socialisante : Wake up.
2) Il faut sortir du
déni et prendre acte de l’état des lieux au plan constitutionnel. À moins d’événements
que rien ne laisse présager, ni un renouvellement constitutionnel qui satisferait
une majorité de Québécois, ni la souveraineté n’adviendront dans un avenir prévisible.
Traduction: Fuck
la question nationale. C’est le débat d’une autre époque. Quand les “conditions
gagnantes” de la souveraineté seront réunies, ce sera évident pour tout le monde.
Entre-temps, il faut construire une province/pays qui inspire ses habitants,
peu importe la couleur de leur passeport. Et si la souveraineté dont rêvent certains n’arrive jamais, et bien so
be it.
3) Dans nos actions
quotidiennes, chacun d’entre nous doit prendre conscience de la
nécessité de
sa contribution, soupeser l’intérêt personnel et l’intérêt collectif, et ne pas hésiter à
consentir des efforts au bénéfice des générations futures. Parallèlement, il
faudra aussi garantir aux citoyens que leur gouvernement a à cœur le bien commun
et non celui des groupes d’intérêts.
Traduction: Les
Babyboomers incrustés vont devoir faire des sacrifices pour laisser
respirer les plus jeunes. La gérontocratie sera remplacée par une autre forme
d’ordre social (plus méritocratique?) dans lequel les acquis d’une génération
ne seront plus garantis envers et contre tous. Et les syndicats et autres "groupes d'intérêts" n'ont qu'à bien se tenir.
4) Des mesures
s’imposent pour revenir aux sources de l’acte d’enseignement en redonnant clairement la
priorité à l’acquisition de connaissances par les jeunes Québécois. Il faut mettre
l’accent sur ces choses dont ils auront besoin toute leur vie et que l’on a
beaucoup trop oubliées
– lire, écrire, compter, etc. – et ne plus craindre d’insister sur l’effort, la persévérance
et le respect sans lesquels aucun véritable apprentissage n’est possible.
Traduction: Fuck
les “compétences transversales” et autres constructions ésotériques concoctées
dans les facultés d’éducation. C’est le retour des valeurs traditionnelles en
éducation. Un uniforme avec ça? Peut-être. (Et pourquoi pas.)
5) En ce sens, il
apparaît essentiel de convenir d’un règlement équitable et global de la lancinante
question du sous-financement des universités québécoises. Ce problème ne pourra être
réglé que par un apport de fonds supplémentaire, réparti de manière équitable entre l’État
et les étudiants. Les diplômés et les entreprises doivent aussi être appelés à soutenir
davantage nos universités.
Traduction: Les
universités sont essentielles dans la nouvelle économie, et tout le monde va
contribuer davantage à leur financement: gouvernement, étudiants, entreprises
et diplômés. Si vous n’êtes pas contents, allez étudier ailleurs — aux États-Unis ou à Cuba — et vous nous
en donnerez des nouvelles.
6) Pour atteindre
notre objectif de faire du français le trait d’union entre tous les Québécois, le soutien à
la langue française ne doit exclure a priori aucune avenue législative ou juridique. La
précarité de l’utilisation de la langue française du fait de sa minuscule présence en
Amérique du Nord, nous oblige à consacrer davantage d’énergie au respect de la Charte de
la langue française.
Traduction: Nous
sommes dans le camp du PQ sur la langue. S’il faut renforcer la loi 101 nous le
ferons, incluant en invoquant la clause dérogatoire. Ce n’est pas parce qu’on
croit à l’économie de marché qu’on a vendu notre âme aux Anglos.
7) On ne saurait
remettre en question la bonne volonté et la compétence des centaines de
milliers de gens qui travaillent [dans les réseaux publics d’éducation et de
santé], mais il nous faut reconnaître que l’organisation du travail et la répartition
des responsabilités sont très souvent problématiques. Un redressement est
nécessaire pour surmonter la crise de confiance croissante à leur endroit. Un
maximum de ressources doit aller aux services directs aux usagers.
Traduction: La
bureaucratie en santé et en éducation, c’est fini. On veut des profs, des
médecins et des infirmières — mais les administrateurs et autres bureaucrates sont
mieux d’avoir de bons arguments pour justifier leurs postes.
8) Dans le réseau de
l’éducation, l’État doit fixer les objectifs généraux, mais augmenter l’autonomie et
les responsabilités des directions d’écoles et des enseignants. En revanche, les directions
d’école et les enseignants doivent être davantage responsables de la réussite des jeunes et
être évalués. La sélection et la formation des futurs enseignants doivent aussi être plus
exigeantes.
Traduction: Nous
allons mieux payer les profs et leur donner plus d’autonomie. Mais les facultés
d’éducation ne pourront plus accepter de losers et décerner des diplômes de
bullshit, et les écoles et les enseignants devront faire la preuve qu’ils
réussissent à former nos enfants correctement. Sinon, pour une fois, il y aura des conséquences.
9) De façon générale,
les revenus des établissements doivent être assurés sur la base des services
fournis et non de budgets préétablis. Plusieurs de ces changements ne sont possibles
qu’avec un nouveau pacte avec les médecins.
Traduction: Chers
(jeunes) médecins (de famille): si vous voulez pratiquer au Québec et être payés par le
gouvernement, vous allez devoir travailler plus, donner des services aux citoyens, et donner un peu
moins d’importance à votre qualité de vie. (P.S. Cher Dr. Barrette: vous avez gagné.)
10) L’État québécois
doit aussi établir un climat résolument favorable aux investissements privés, en
particulier pour ceux liés à l’innovation et à la créativité. Pour y arriver,
il faudra revoir
les manières d’imposer les entreprises et les individus de façon à encourager le travail,
l’investissement, la productivité et l’épargne.
Traduction: Nous
voulons un Québec ouvert à l’entreprise privée et à l’investissement, et axé
vers la croissance économique et l’innovation. Le libéralisme économique est
in, l’obscurantisme socialisant est out, et nous croyons que tout le monde en profitera.
Fort intéressante « analyse » de votre part, Monsieur Lussier!
En effet, ce que contient le document présenté par la Coalition de M. Legault et cie s’avère pertinent à bien des égards. On y décèle un désir de viser impérativement autant d’excellence que possible – plutôt que de se laisser aller à un consternant nivellement par le bas.
Une attitude très méritoire.
Et puis, il faudrait être peu éveillé – pour ne pas carrément dire endormi! – pour ne pas réaliser à quel point cela urge que nous tâchions collectivement à faire du mieux que nous en sommes capables à l’heure d’une mondialisation de plus en plus menaçante.
Nos acquis, ou soi-disant acquis, sont devenus bien fragiles en ce XXIe siècle. La concurrence internationale est plus féroce que jamais. Il nous faut par conséquent réagir rapidement. En rehaussant notre niveau au chapitre des compétences, notamment. Investir dans l’éducation et l’effort est un incontournable si l’on veut maintenir notre niveau de vie.
Néanmoins, et cela même si le programme que privilégie apparemment M. Legault avec lucidité (ah… un mot qui a perdu de son sens véritable chez plusieurs…) regorge de bon sens à maints égards, il demeure un très important facteur qui doit obligatoirement être considéré relativement à l’arrivée (pour le moment encore que potentielle) d’un nouveau parti politique au Québec.
Et cet important facteur est que tout nouveau parti, si excellent puisse-t-il être, entraînerait nécessairement la division du vote.
Une division peut-être momentanée, le temps d’une élection, en allant recueillir des appuis auprès des mécontents et des souvent-prêts-à-essayer-du-nouveau. Une division qui pourrait alors reconduire « au volant » vous-savez-qui. Les deux mains à nouveau dessus ou une seule…
Cela étant, si valable que soit le programme envisagé par la Coalition pour l’avenir du Québec, ce programme demeure secondaire aux probables conséquences de l’arrivée d’un nouveau parti politique officiel.
Du moins, c’est ce qu’il me semble.
Le Québec est au bord du gouffre financièrement, des CAQueteurs(euses) nous convient à demeurer des provinciaux versant 50% de nos taxes et impôts à un gouvernement d’un pays étranger qui en dispose principalement pour le développement de sa propre économie, et comme bon lui semble pour le reste. Dans le manifeste de ces carriéristes provincialistes il est question d’une intendance coloniale du Québec, d’une gouvernance servilement comptable d’une succursale qui envoie 50% de ses revenus à sa maison mère. Cette Coalition pour l’avenir du Québec, 50 ans après le début de la Révolution tranquille, nous offre la résignation, un retour tranquille à la soumission d’antan et au « business as usual » du « good old time » de la grande noirceur. Félicitations pour votre beau programme !!! Colonie quand tu nous tiens !!!
Je ne sais pas encore si j’aime la Coalition, mais j’aime ce que dit la traduction de Jérôme Lussier.
C’est un bon pas vers un Québec qui valorisera la performance et l’excellence plutôt que la médiocrité que l’on appelle à tort la sociale-démocratie.
Je suis enseignante et j’ai TRÈS hâte qu’on m’évalue…
COOL! mais pas réaliste. Un peu d’introspection serait nécessaire avant de prétendre dans n’importe quel style de manifeste que la même gang va faire mieux que ce qu’elle a fait jusqu’ici avec tous ses beaux diplômes.
Même si on trouve une façon plus directe de le dire….. !!! Leur langage tourne toujours autour du « pot de chambre » mais ils ne vident jamais leur propre caca pour faire un peu de compost avec. C’est pourtant un minimum pour changer de culture sans appauvrir les récoltes des autres avant les leurs.
Ils sont pourtant éduqués et diplômés tous ces prophètes de la justice sociale réinventée???? C’est ben tannant que du monde qui n’écoute pas aie l’air de croire qu’ils ont appris à l’école ce que le vrai monde se tue à dire depuis des années juste avec du gros bon sens.
Si vous voulez payer pour sa longévité accrue de 15 ans, garder le babyboom au chômage ou à l’hospice….vous me reparlerez d’étouffement des jeunes.
40% n’ont pas de fonds de pension…..mais leur famille est élevée.
Si vous pensez qu’il suffit de trouver le mot prospérité dans le dictionnaire avant la fin du secondaire pour manger à sa faim, venez jaser avec mes jeunes décrocheurs bourrés de talents….qui n’ont pas LES MOYENS de continuer à étudier à temps plein. Leurs parents sont pas plus riches.
En attendant, je carbure à la passion je bénévole par curiosité pour trouver des moyens de « tripper » avec mes jeunes. Mon salaire?? c’est l’étincelle dans les yeux de ces jeunes qui décrochent du ritalin… et finissent par ne plus entendre les voix des bien pensants qui leur murmurent à l’oreille…..
Paye-moi mieux si tu veux réussir comme citoyen québécois.