BloguesTel que vu en région

Les gens des « petits » villages.

J’ai quitté la ‘grand ville il y a un peu plus d’un an, officiellement. Officieusement, ça faisait déjà 2 ans et des poussières que je réfléchissais à comment j’arriverais un jour à partager mon envie d’être au centre de tout, de vivre là où ça bouge constamment & d’avoir un p’tit oasis où ne rien voir aller, où me laisser vivre sans entendre des bruits de klaxons en trame de fond, où je retournerais aux bases, en plein milieu d’une forêt tranquille, calme, et autres synonymes.

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Je pense que c’est lorsque je suis allée louer pour la première fois un film ici, dans ce petit village qu’est Stratford, dans cette partie du monde que j’habite maintenant à tâtons, que j’ai réalisé que les gens du coin ne sont pas exactement comme ceux que je croisais ailleurs, dans un actif Québec, dans un Québec qu’on qualifie de grande banlieue, mais qui bouge beaucoup plus vite quand on y pense. Ils ne sont pas meilleurs, ils ne sont pas pires. Ils sont différents, et parfaits comme ça.

Louer un film, donc. Un DVD bien candide, le truc à écouter quand on est en visite pour un week-end chez la famille, quand l’impression d’être au chalet, en pyj, à regarder la neige tomber et à profiter du feu de poêle à bois constituent des activités valables. À Québec, je ne me souvenais même pas de la dernière fois où j’avais eu un besoin cinématographique que Netflix – ou la proximité d’un cinéma – n’arrivait pas à combler. Et donc, j’avais bravé le froid, le copain sur les talons, en pants de jogging aussi, pour la forme, et j’avais passé la porte d’un pseudo dépanneur où une vingtaine de DVDs et encore quelques VHS trônaient sur les murs. On avait choisi le premier film du bord, celui qui avait sa pastille de plastique verte pour confirmer que personne ne l’avait loué – ou qu’il ne traînait pas, perdu, au fin fond de la forêt d’un autre – et on avait demander notre reste.

Mais c’était à la caisse que ça s’est compliqué. Je m’étais souvenue à la base du pourquoi j’évitais le club vidéo traditionnel, en ville. Devoir remplir des formulaires aussi complets que lorsqu’on s’inscrit à l’université. Signer partout, comme si on s’achetait un char. Entrer un NIP comme si on ouvrait un énième compte à la banque. 20 minutes et quelques pour repartir avec mon p’tit DVD et un sac de pop corn, que je reluquais depuis le début du processus. Et l’impression de devoir hypothéquer ma maison si je ramènais le pauvre disque en retard, ne serait-ce que de 5 secondes. Ici, c’est différent.

À Stratford, on te demande seulement ton numéro de téléphone. Vous savez, le truc désuet qui sert 3 fois par semaine, qui est relié au téléphone intelligent qu’on exhibe partout et qui fait tout et n’importe quoi, sauf prendre des appels. On demande un numéro de téléphone et on te sourit. 3.56$ plus tard, tu peux ressortir avec l’impression d’être la personne la plus safe du monde. Qu’on te fait confiance, qu’on sait que tu vas bien en prendre soin, de ton fameux DVD qui t’a fait braver la tempête.

On te fait confiance, parce que tu es dans la gang. Du moment où tu emménages dans le coin, où tu débarques ici un peu n’importe comment, dans un petit village entre deux villes, dans une forêt où tout le monde se connaît, où les numéros de téléphone commencent par les 3 mêmes chiffres, où on partage tous le même code postal, tu fais partie de la gang. Simple comme ça.

Et aussi nono que ça puisse paraître, moi je trouve ça beau. L’esprit de village, les gens qui connaissent ton adresse, qui viennent te souhaiter la bienvenue sur leur rue en t’apportant une tarte et un grand sourire par la bande, qui s’exclame que tu es leur nouvelle voisine, qui t’invitent à n’importe quel évènement de la ville parce qu’ils sont toujours heureux de rencontrer de nouveaux gens avec qui parler, parce qu’ils veulent vraiment te faire une place, ça, c’est beau.

C’était de ça dont j’avais envie de vous parler cette semaine. Pas de bouffe, pas d’attractions particulières, pas de recettes fancy cuisinées à partir d’ingrédients d’ici, non. Des gens, oui.

Au passage, Netflix joue très bien ici, maintenant. Et j’ai entendu dire qu’il y avait un cinéma de village qui ouvrait de nouveau ce printemps. Voyez comme on s’adapte!