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Coup de théâtre

Avant d'aller dormir, je vous raconte ma première demi-journée à Thessalonique. Après un bref passage à l'hôtel, à peine le temps de déposer mon bagage, je me rends, avec quelques compatriotes québécois, au Royal Theatre. On y procède au lancement de la 11e édition du prix Europe pour le théâtre.


Theatre of the Society for Macedonian Studies
Source: www.ntng.gr
 

Une fois les discours officiels terminés, Alessandro Martinez, secrétaire général du prix Europe, l'air grave, fait une annonce : le metteur en scène allemand Peter Zadek, lauréat du 11e prix Europe, ex aequo avec Robert Lepage, ne viendra pas en Grèce, comme prévu, chercher sa récompense! La raison : des répétitions accaparantes. Or, il s'agit d'un véritable coup de théâtre. À ce sujet, les règlements du prix Europe sont clairs : pour recevoir le prix et la bourse qui l'accompagne (dans ce cas-ci 30 000 euros, puisque Zadek et Lepage se partagent les 60 000 euros usuels), il faut impérativement être présent à la cérémonie qui aura lieu le 29 avril. J'en saurai surement plus demain, mais, une chose est certaine, ce changement de dernière minute devrait donner encore plus d'importance aux événements entourant la remise du prix Europe à Robert Lepage.


Qui a besoin des prix?
Photo: Epaminontas Stiliandis
 

Juste après cette annonce, quelques membres de l'Association internationale des critiques de théâtre (AICT) se sont prononcés sur la question suivante : « Qui a besoin des prix? » Sous la direction de Ian Herbert, président de l'AICT, les orateurs venus des quatre coins du monde ont fait valoir le bien-fondé des prix en théâtre et la nécessité de les décerner avec la plus grande des rigueurs.

Après le repas, on présentait, dans le superbe Theatre of the Society for Macedonian Studies, Long Life, un spectacle conçu et dirigé par Alvis Hermanis, le Letton qui partage cette année le prix Nouvelles Réalités Théâtrales avec Biljana Srbljanovic.

 
Theatre of the Society for Macedonian Studies
Source: www.ntng.gr

Voici comment on décrit Long Life, un spectacle qui a aussi été présenté au Carrefour international de théâtre de Québec en 2006, sur le site du Théâtre National de Strasbourg :

«Dans un étroit couloir horizontal, cinq jeunes acteurs se métamorphosent en vieillards dans un spectacle sans paroles. Le temps et l'espace, la pensée et les émotions sont compressés dans cet appartement communautaire de l'ancienne URSS : cinq chambres et un quotidien cocasse [.] où les odeurs ont le goût du troisième âge. Leur existence est affairée : faire sa toilette, vider le pot de chambre, s'habiller pour la promenade. de chaque geste surgit l'indice d'une histoire, d'un caractère, d'une vie. Nous sommes ici les voyeurs amusés de la fragilité tendre et tragique d'une humanité de vétérans aux corps juvéniles, mis à l'écart par un système soviétique titillé par les sirènes du capitalisme.»

La description est très juste. L'objet fascine, hypnotise. Ses rouages s'agitent comme ceux d'une boîte à musique. Les acteurs sont prodigieux. Cela dit, 1h40 de spectacle, presque muet, ce n'est peut-être pas l'idéal pour un critique assommé par le décalage horaire.