Ce soir, entre les murs de l'Opéra-Théâtre d'Avignon, une salle magnifique datant de 1846, le cinéaste Christophe Honoré a dévoilé sa relecture d'Angelo, tyran de Padoue, un drame romantique de Victor Hugo créé en 1835. Si le lieu est chargé d'histoire, la mise en scène ne l'est pas du tout. Le spectacle, l'une des premières incursions théâtrales du réalisateur de Ma mère, Dans Paris et Les Chansons d'amour, est truffé de références au cinéma. Il y a des plateaux sur rails, d'imposants projecteurs, des échafaudages sur trois niveaux, des écrans, des perches et des microphones. Honoré prend aussi plaisir à se citer lui-même: romantisme exacerbé, scènes de comédies musicales, transposition plus ou moins contemporaine d'un texte classique. Les têtes d'affiche, Emmanuelle Devos, Marcial di Fonzo Bo, Clotilde Hesme et Julien Honoré, livrent la marchandise. Hesme, dans la robe de Tisbe, la comédienne volage, et Honoré, dans les habits d'Homodei, l'espion, impressionnent tout particulièrement. Plein d'humour, de clins d'œil, le chassé-croisé amoureux est captivant. Sans tordre la pièce, la mise en scène met en relief sa légèreté, son côté eau de rose, presque vaudeville par moments. Aussi, dans les bas-fonds de Venise, jamais loin des amants, le metteur en scène fait rôder des sbires, des loubards que Genet et Fassbinder n'auraient surement pas reniés. Malgré la diversité des influences, le spectacle est cohérent, et surtout extrêmement vivifiant. Pour insuffler une vie nouvelle au drame de Victor Hugo, une pièce avec poisons et portes dérobées qu'on ne monte pour ainsi dire plus, Honoré était tout désigné. Le spectacle parcourra la France de janvier à mars 2009. Gageons que ce sera avec succès.
Photo Christophe Raynaud de Lage