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Festival d’Avignon : Pippo Delbono en quête de vérité

L'Italien Pippo Delbono a profité du Festival d'Avignon pour dévoiler aux Français sa nouvelle réalisation: La Menzogna. Créé à Turin en octobre 2008, le spectacle aborde bien entendu le mensonge, sous toutes ses formes, mais plus précisément encore celui de la politique et de l'entreprise, celui qui unit horriblement les riches et les pauvres. En prenant pour point de départ l'incendie qui a éclaté dans une grande aciérie italienne en décembre 2007, et révélé les conditions de travail totalement inadéquates des ouvriers, Delbono signe un spectacle dérangeant, souvent insoutenable, parcouru de rage. La scène est habitée par des pauvres et des nantis, des prostituées et des clients, des bêtes de cirque et des spectateurs réjouis, des pécheurs et des curés, des victimes et des mafiosos.

Ici, les images ont encore plus de place que dans Questo buio feroce, la production qui était de passage à Montréal lors du plus récent FTA. Hormis une voix hors champ, quelques séquences vidéo et un extrait de Roméo et Juliette, le spectacle est pour ainsi dire entièrement composé d'images. Des images qui sont d'abord banales, voire naïves, et qui deviennent rapidement cruelles, violentes. En fait, la représentation dévoile, met à nu, donne à voir la véritable teneur du monde dans lequel nous vivons. L'expérience n'est pas réjouissante, elle est parfois même aride, voire irritante. Mais elle laisse une impression forte, des images qui ne nous quittent plus et auxquelles on ne cesse de trouver davantage de signification. Voilà qui resume bien la démarche de Delbono: concevoir des œuvres baroques et bigarrées, des aventures atypiques qui ne séduisent pas, à tout le moins pas au sens où on l'entend généralement, mais qui font très certainement et durablement leur chemin en nous. C'est peut-être ça, le contraire du mensonge.

Photos Jean-Louis Fernandez