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Moi qui me parle… / FTA 2011 / Mythologie personnelle

Moi qui me parle à moi-même dans le futur / FTA 2011 /
Mythologie personnelle

En quittant le giron de Robert
Lepage, il y a dix ans, Marie Brassard s'est lancée dans l'édification d'une
oeuvre on ne peut plus personnelle (supportée depuis le tout début par le
FTA!). Croisant les voix et les entités, le rêve et la réalité, l'introspection
et la projection, le dépouillement et la technologie, les préoccupations
sociales et celles de l'intime, elle a donné naissance à des solos d'une
remarquable cohérence, d'une précieuse singularité.

Au fil des ans, de Jimmy à
L'invisible, les spectacles n'ont cessé de gagner en radicalité, notamment en présentant
une structure narrative chaque fois plus éclatée. À vrai dire, les voyages organisés
par Marie Brassard sont sans compromis. Correspondre à un format, conforter le
public, lui donner des réponses, l'exposer à ce qu'il connaît déjà… bien peu
pour elle! Avec pareille démarche, on laisse forcément beaucoup de gens dans son
sillage. En contrepartie, ceux qui aiment, ceux qui goûtent ces percées vers
l'inconnu, ceux qui, à force de s'y engager, finissent même par trouver quelques
repères, ceux-là sont solidement accrochés.

Moi qui me parle à moi-même dans le
futur
, cinquième opus de la directrice de la compagnie Infrarouge, adopte la logique
du conte, celle du rêve et du cauchemar. Nous entrainant dans les méandres de sa
mythologie personnelle, Brassard fait plus que jamais office de conteuse. Postée devant
un écran où sont projetés fonds marins et spirales hypnotiques, souvenirs de
vieillesse ou d'enfance, la performeuse raconte des histoires, ni plus ni
moins. En harmonie totale avec la musique et les images, en trafiquant
parcimonieusement sa voix, elle nous entraine dans un récit circonlocutoire, déplacements
sans entraves aucunes dans le temps et l'espace, des histoires qui paraissent
souvent, il faut l'admettre, sans queue ni tête.

Ce spectacle est tout de même moins
abstrait que le précédent, L'invisible, un peu moins paranormal. Néanmoins, il
n'échappe pas à un certain ésotérisme qui peut agacer. C'est que la
créatrice a choisi d'explorer ici les états seconds, ces stades de conscience que
certaines drogues et méditations permettent d'atteindre. Heureusement, et c'est
probablement l'objectif premier de Brassard, la représentation provoque par
moments chez le spectateur, pour peu qu'il s'y abandonne, une certaine transe
pas du tout désagréable. L'aventure vous tente?

dimanche 29 mai à 21h / lundi 30 mai à 21h / Usine
C

durée 1h05

http://www.fta.qc.ca/spectacles/2011/moi-qui-me-parle-a-moi-meme-dans-le-futur / #FTA_mariebrassard

 

Pororoca / FTA 2011 / Corps à corps

En 2007, au FTA, avec un spectacle intitulé Incarnat,
la chorégraphe brésilienne Lia Rodrigues avait, afin d'exprimer sa rage devant
l'injustice côtoyée jour après jour, fait jaillir sur scène des litres de
ketchup. Elle est de retour cette année avec Pororoca, une pièce sans décor ni
bande son qui s'appuie sur l'engagement physique peu commun de 11 danseurs, des
corps habités par une énergie brute, animale, viscérale.

La vie en collectivité
est sans l'ombre d'un doute le sujet fondamental de ce spectacle que l'on
pourrait qualifier d'orgiaque. Dans cette communauté de mammifères pétris de
désirs et de pulsions agissent attractions et répulsions, s'exécutent sans
relâche étreintes mécaniques et impitoyables abandons. Une gestuelle percutante
qui, malheureusement, devient vite redondante. Il reste que la représentation
lègue des images fortes, notamment dans la scène d'ouverture (projections
d'objets multicolores d'un bout à l'autre du plateau) et dans le tableau final
(impressionnante remontée des gradins par les interprètes en furie). Sans
oublier ce moment particulièrement émouvant où la meute baisse un peu la garde
pour s'enlacer dans une certaine sérénité, trouvant enfin, peut-être, un
semblant de repos.

dimanche 29 mai à 19 h / lundi 30 mai à 19h /
Usine C

durée 1h

http://www.fta.qc.ca/spectacles/2011/pororoca /
#FTA_pororoca