Dernier cri
Lors d’un événement mondain la semaine dernière, j’ai croisé l’auteur de Tout sur moi, Stéphane Bourguignon.
Tel un fan fini, j’ai déposé un moment mon sens critique pour mieux prendre mon courage à deux mains. Et je suis allé lui parler. "Bonjour, Monsieur. Félicitations pour votre beau programme, lui ai-je dit. Tout sur moi est mon coup de coeur de l’automne."
C’était d’un téteux consommé, mais c’était sincère. Oui, les "fausses-vraies" aventures de Macha Limonchik (dans le rôle de Macha Limonchik) m’ont complètement séduit. La comédie est diablement bien écrite, rudement bien jouée et unanimement goûtée par la critique.
Or, on s’explique mal pourquoi son auditoire s’effrite semaine après semaine. Il se situe toujours sous la barre des 400 000 téléspectateurs. En chiffres absolus, c’est du monde à la messe. Mais sur la planète télé, c’est une note très moyenne.
Critiques et observateurs ont avancé moult hypothèses pour tenter de trouver ce qui ne collait pas avec cette série. Serait-ce parce que Radio-Canada l’a placée devant les gros canons de TVA (Nos étés II, Le Négociateur II)? La série est-elle diffusée trop tard (21 h 30)? Est-elle trop audacieuse?
Stéphane Bourguignon, lui, croit qu’il s’agit d’un problème de promotion. Remarquez, tous les artistes ont l’impression que leurs oeuvres ne sont pas suffisamment promues… Scénario classique.
L’audimètre ne mesure pas la qualité d’une émission, bien entendu. Sauf que la cote d’écoute s’avère être à la télévision ce que le sang est au corps humain. Elle nourrit les organes vitaux. La quête d’auditoires colore, plus que toute autre considération philosophique, la programmation télévisuelle. Ainsi, une chaîne aux mauvaises cotes finit par avoir le teint blême.
Mais revenons à nos moutons. Pourquoi Tout sur moi n’attire-t-elle pas davantage? C’est peut-être l’époque.
En effet, la lune de miel avec le tube cathodique est terminée. Si la télé a été le média du 20e siècle, elle ne sera pas celui du 21e. Non seulement Internet lui ravit-il une partie de son influence, mais la télévision se tire dans le pied en se multipliant à outrance, morcelant ainsi son pain et son beurre: ses cotes d’écoute.
Résultat: dans le brouhaha médiatique actuel, le seul moyen d’attirer l’attention est de crier. Et c’est à qui criera le plus fort. Terminé, le temps où les télédiffuseurs n’avaient qu’à planter un téléroman aux intrigues quotidiennes pour appâter les masses.
De plus en plus, une simple bonne série ne suffit plus. Les télédiffuseurs doivent créer l’événement. Ils doivent sortir les paillettes, les canons, les grosses émotions. Ils doivent plus que jamais s’adresser au plus bas dénominateur commun. Ils doivent rendre leurs productions séduisantes, accessibles, prêtes à consommer.
Aussi les émissions qui gagnent les soirées télévisuelles au Québec sont-elles faites de ce bois. Les rebondissements préfabriqués d’Occupation double ou de Loft Story. Les valeurs sûres: Lance et compte, Le Négociateur et bientôt la télésérie sur Les Boys. Les entrevues dont tout le monde parle, les étoiles du Match des étoiles et les glorieux de L’Heure de gloire.
Dans cette course au plus bruyant, sale temps pour les discussions un brin laborieuses autour d’une table, ou les divertissements originaux et sans prétention.
Et bien qu’ils nous fassent passer de bons moments, sale temps aussi pour Macha et ses amis…
Tout sur moi, à Radio-Canada, 21 h 30
Cette semaine, Éric prend sous son aile un strip-teaseur gai qui fait un numéro déguisé en gorille…
WWW
Le mot n’est pas beau, mais c’est bien à une activité de propagande que se livre le Parti québécois avec cette campagne sur Internet intitulée La Nuit des longs couteaux. Dans un court clip à la sauce Alfred Hitchcock, on nous repasse la scène classique de la douche (tirée de Psycho). À la différence près que la victime est René Lévesque, alors que les assassins sont Jean Chrétien et les premiers ministres provinciaux qui ont signé, à la barbe du premier ministre québécois, l’acte constitutionnel de 1982. La solution proposée pour venger ce crime? La souveraineté du Québec… www.nuitdeslongscouteaux.com
TÉLÉVISION
Zone libre présente un portrait intime de l’auteur des Belles-Soeurs, Michel Tremblay. Traduites partout, les versions internationales de ses pièces suscitent la curiosité. Entre les mains de Michel Tremblay, à Radio-Canada, le vendredi 10 novembre, 21 h.