La tentation de la photocopieuse
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La tentation de la photocopieuse

Et dire que j’étais fou de joie à l’idée que la série britannique The Office soit adaptée au Québec.

Il y a deux ans, j’avais goulûment dévoré les DVD de cette série-culte en Angleterre.

À première vue, The Office n’a l’air de rien. Un faux documentaire sur la vie de bureau. Le quotidien beige d’un noyau de collègues orbitant autour d’un patron pathétique, David Brent.

L’humour de The Office s’exprime en partie à travers les subtiles relations entre ce patron, qui aurait voulu être un artiste, et l’invisible équipe de tournage du documentaire.

Car le boss est on ne peut plus conscient qu’il est filmé. Cela le grise. Pour cette caméra qu’il ne quitte jamais des yeux, il déploiera toute l’étendue de son talent comique. Il chantera, dansera, fera des imitations. Un vrai Gregory Charles corporatif, talent en moins.

C’est ce qui fait rire dans The Office: les efforts grotesques d’un loser en quête d’un quinze minutes de gloire qui ne viendra jamais.

Bref, lorsque j’ai su que cette farce allait connaître sa version québécoise (La Job), j’étais impatient de voir le résultat.

Printemps dernier, on nous a annoncé que c’était Antoine Vézina qui incarnerait le David Brent québécois, rebaptisé David Gervais (un nom faisant référence au comédien qui incarnait le patron en Angleterre, Ricky Gervais).

Je connais un peu Vézina. Il y a lurette, nous étions dans la même ligue d’impro. À l’époque, il était plutôt taciturne, le profil bas. En tant qu’improvisateur par contre: une bombe. Le Rocket de l’impro. Qu’il demande l’heure ou qu’il passe le balai, il était pissant…

Bref, Antoine Vézina était fait pour La Job.

Il y a quelques semaines, j’ai vu les premiers épisodes de cette série tant espérée…

Et puis bof.

Les attentes étaient-elles trop élevées? Faut-il ne pas avoir vu The Office pour apprécier La Job? L’humour britannique perd-il de sa saveur en traversant l’Atlantique? Chépa.

Une chose est sûre cependant, au tribunal de la rigolade, La Job ne fait pas un plaidoyer convaincant. On ricane. Paresseusement. De temps en temps.

Que s’est-il passé?

Antoine Vézina imite le patron anglais jusque dans ses moindres tics et mimiques. L’ensemble sonne faux. En fait, cette adaptation est une copie carbone de la version originale, mis à part quelques références culturelles locales purement cosmétiques.

Le résultat est décevant. L’humour anglais ne colle pas à la culture québécoise. Imaginez qu’on adapte Mr. Bean au Québec à la grimace près, avec Benoît Brière dans le rôle-titre. Malgré tout le talent de Monsieur B., le résultat ne sera forcément qu’une pâle copie.

C’est l’impression qu’on a en regardant La Job. Une pâle copie.

L’adaptation de fictions étrangères est une pratique relativement nouvelle. Et une des clés du succès dans ce domaine semble justement être "l’adaptation". Au sens de "modifier quelque chose pour l’accorder avec autre chose". Adapter, c’est changer un peu.

Prenez Caméra café (TVA). Un concept français. Une sitcom qui se déroule aussi dans un bureau. Les scénaristes ont pris des libertés. Même que les nouveaux épisodes qui seront présentés cet hiver sont tous originaux. Et paf, ça fonctionne.

Prenez aussi la version américaine de The Office (NBC). Le patron (joué par Steve Carell) ne ressemble que vaguement à son homologue anglais. Et paf, ça fonctionne. La version étatsunienne est toujours en ondes, et cela fait longtemps que les épisodes sont originaux.

Or, La Job me semble être un bel exemple de ce qu’il ne faut pas faire lorsqu’on adapte une série d’ailleurs: succomber à la tentation de la photocopieuse…

La Job, à Radio-Canada, dès le jeudi 11 janvier, 21 h.

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TÉLÉ

Mon coup de coeur de l’hiver. Une nouvelle dramatique signée par l’auteur de théâtre François Archambault et réalisée par Ricardo Trogi (Horloge biologique). Jacques, un prof de math de banlieue voit basculer son existence lorsqu’un copain perdu de vue installe sa roulotte sur son terrain. Cette visite imprévue réveille chez Jacques des pans de sa vie qu’il avait jusqu’ici bien dissimulés à sa petite famille… Les étoiles filantes, à Radio-Canada, dès le jeudi 11 janvier, 19 h 30.

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TÉLÉ

TVA présente une émission spéciale animée par Paul Arcand et portant sur le sujet de l’heure: les accommodements raisonnables. Peut-on accommoder tout le monde dans une société où les croyances religieuses se multiplient? Accommodements raisonnables ou pas, à TVA le jeudi 11 janvier, 21 h (et la suite après les nouvelles, à 23 h).