N'importe quoi, n'importe quand
Médias

N’importe quoi, n’importe quand

Avez-vous suivi la saga du dimanche soir? Vous savez, cet insoutenable suspense qui a fait retenir au Québec son souffle pendant que courait la rumeur selon laquelle TVA placerait son lucratif Banquier contre Tout le monde en parle?

Alors, avez-vous suivi l’affaire? Non? Vous avez une vie, vous aussi?

Enfin… Rassurez-vous, c’est finalement Occupation double qui affrontera la messe dominicale de Guy A. Ouf! Quel effet cela aura-t-il sur les cotes d’écoute du talk-show chouchou des Québécois? Je l’ignore. Mais n’ayez crainte, j’ai prévu trois chroniques pour faire le tour de la question.

Ah, ironie! Quand tu nous tiens…

Chaque rentrée télévisuelle, c’est la même poutine. Dans les journaux, on analyse les grilles-horaires des différents réseaux comme s’il s’agissait d’une partie de Battleship. Les réseaux placent leurs navires sur une grille tenue secrète. Chacun tente de torpiller l’adversaire. Quelle chaîne gagnera la bataille du lundi? Quelles séries lourdes s’opposeront le jeudi? C’est la guerre.

Et dire que, dans dix ans, ces enjeux d’une importance déjà très relative nous paraitront encore plus futiles…

Le mois dernier, à l’Edinburgh International Television Festival, le "père du Net" a annoncé la fin de la télévision telle qu’on la connaît. Vint Cerf, qui a contribué à bâtir le réseau Internet dans les années 70, a prédit que l’industrie de la télé allait muter, tout comme l’industrie du disque a muté après l’arrivée du téléchargement de musique en ligne. "La télévision sera comme l’iPod: on téléchargera du contenu que l’on regardera plus tard", a-t-il dit.

La prédiction de Vint Cerf n’a rien de révolutionnaire. C’est surtout parce qu’il se fait appeler le "père du Net" qu’on lui tend l’oreille. Car plusieurs experts discutent depuis longtemps de la télé à télécharger.

En effet, selon toute vraisemblance, le télévore du futur sera libéré de la tyrannie du TV Hebdo. Ainsi, plutôt que de choisir ses émissions en fonction d’un téléhoraire concocté par des directeurs de la programmation, il aura accès à un répertoire comprenant des milliers, voire des millions d’émissions. Une sorte de Youtube évolué. Tout le contenu télévisuel sera accessible du bout des doigts. Le Téléjournal du mois passé. L’intégrale de Virginie. L’épisode des Filles de Caleb dans lequel Roy Dupuis montre ses fesses. N’importe quoi, n’importe quand…

Des formes primitives de cette télé nouveau genre existent déjà. À travers son service Illico sur demande, le câblodistributeur Vidéotron offre aux téléspectateurs la possibilité de télécharger des émissions de TVA (et des films cochons). Par ailleurs, la compagnie Apple a lancé récemment un bidule, Apple TV, qui permet de visionner sur un téléviseur du contenu vidéo ou audio stocké sur un ordinateur, ou téléchargé à partir d’iTunes Store (le magasin virtuel d’Apple). Aux États-Unis, les clients d’iTunes ont ainsi accès à plus de 500 films, 5000 vidéoclips et 350 émissions de télé. En tout temps.

N’en doutez pas, nous sommes à l’orée d’une véritable révolution.

Dans quelques années, lorsqu’il sera possible de télécharger toutes les émissions du monde et de les visionner quand bon nous semble, ce sera la mort du téléhoraire.

Les notions de "prime time", de "contre-programmation" ou de "locomotive" (une émission qui transporte des téléspectateurs à l’émission qui suit dans la grille) deviendront caduques.

Dans le futur, pour les artisans de la télé, le nerf de la guerre sera d’offrir au public des émissions qu’il jugera utile de télécharger. Des émissions que les téléspectateurs auront vraiment le goût de regarder, sans que ce soit par dépit, simplement parce qu’il n’y a "rien de bon aux autres postes".

Or, qu’est-ce que le public aura envie télécharger? En regardant les clips les plus visionnés aujourd’hui sur Youtube (comme celui de Perez Hilton, un type qui utilise un nain de jardin comme jouet sexuel), j’hésite encore à annoncer la fin de la télé-poubelle…

Mais bon, en attendant la révolution, que regarderez-vous le dimanche soir? Tout le monde en parle ou Occupation double?

Tout le monde en parle, à Radio-Canada, dès le dimanche 16 septembre, 20h.

Occupation double, à TVA, dès le dimanche 23 septembre, 20h.

ooo

TÉLÉ

André Robitaille est à la barre d’une nouvelle émission de télé qui parle de télé. Pour discuter de l’actualité télévisuelle, on le retrouvera entouré de ses collaborateurs: Lise Payette, Chantal Lamarre et le chroniqueur de La Presse Marc Cassivi. C’est juste de la TV, à ARTV, dès le vendredi 14 septembre, 21h.