Outre la compagnie de disques Nomade à Québec, dont nous avons parlé dans cette chronique il y a quelques semaines, Abuzive Muzik est elle aussi sur une bonne lancée. CEA, Colombier, Webster et Karim Ouellet ont tout récemment réalisé un nouvel album sur cette étiquette qu'on associait essentiellement au hip-hop à ses débuts, et qui commence maintenant à élargir son créneau. "Je suis pas mal sûr que je n'écoute pas plus de rap que toi", m'indique le fondateur de la compagnie, Rafael Perez, rencontré à son bureau de la rue Crémazie. "En fait, j'ai fondé Abuzive Muzik parce que des amis avaient un groupe de hip-hop: Sagacité. J'étudiais en administration à l'université et ils m'ont demandé de les aider pour préparer leur dossier afin d'approcher des maisons de disques. Ils n'ont pas réussi à se faire signer, alors j'ai créé la compagnie en 2006 pour sortir leur album." Aussi simple que ça.
Depuis, il additionne à son rôle de producteur de disques celui de gérant d'artistes. Il représente, entre autres, la chanteuse Marième Ndiaye (photo) du collectif CEA, qui vient d'ailleurs de signer une entente avec Tandem.mu pour la sortie, cet été, de son premier album solo. De surcroît, l'aménagement d'un studio d'enregistrement est en cours. Tout porte à croire que Québec est maintenant devenue un territoire enviable pour un producteur. "Ça, c'est parce que je veux rester à Québec. J'y suis né et j'y ai ma maison. Est-ce que c'est plus simple qu'avant de travailler ici? La réponse est non."
Rafael Perez s'était pourtant montré enthousiaste et curieux lorsque Québec horizon culture a été mis sur pied en 2008 et que Première Ovation a vu le jour. Après deux ans, le producteur s'est forgé une opinion différente sur le programme. "Québec horizon culture et Première Ovation, je trouve que c'est de la poudre aux yeux. Concrètement, c'est quoi? Première Ovation donne un montant d'argent à un artiste pour soutenir un spectacle ou son lancement de disque. Donc, on soutient aussi l'établissement où sera présenté son spectacle. Ça reste au profit de l'artiste, mais ça aide les bars et les salles de Québec. C'est intéressant, je ne peux pas le nier… Chaque dollar de plus dans un budget est le bienvenu. C'est seulement la façon dont on présente publiquement ces mesures qui me dérange. Pour te donner une idée, avec Musicaction et la SODEC, je suis en mesure de recevoir entre 50 000 et 75 000 $ par année de chacune. Si j'ai 3000 $ de Première Ovation, ça va être beau."
Après avoir essuyé un refus pour un programme du plan d'action Québec horizon culture, Perez trouve étrange que l'aide aux producteurs de métier soit quasi inexistante à Québec. "Au départ, le studio était une coopérative et j'ai fait une demande pour un financement à l'achat d'équipement. On m'a expliqué qu'on ne donnait pas de subvention aux entreprises liées à la musique, car Première Ovation soutient déjà les musiciens… Donc, comme producteur de disques, je n'ai rien. On soutient la relève avec la création de L'Ampli, c'est correct. Mais pour les artistes établis de Québec, on fait quoi? Ce n'est pas comme ça qu'on va les garder ici."