Modulations, une histoire de la musique électronique

Parution récente aux éditions Allia de la traduction française de Modulations, A History of Electronic Music: Throbbing Words on Sound, qui rapporte magnifiquement la courte histoire de la musique électronique depuis ses débuts. D’abord publié en 2000 dans sa version originale anglaise, ce recueil encyclopédique est la suite logique d’un film d’Iara Lee et George Gund paru en 1998 qui portait le même titre et qui s’était donné un mandat identique, celui de retracer les origines de la musique électroniquement composée à partir de machines.

Divisé en chapitres selon les époques et les styles, le livre bien illustré est ponctué d’entretiens passionnants avec des types influents de toutes les époques, comme Giorgio Moroder, Arthur Baker, Squarepusher, Derrick May, Pierre Henry. Il recueille aussi les commentaires fascinants de Frankie Bones, Moby, Autechre et tant d’autres. S’ajoutant à la constellation d’anecdotes et de détails tous plus passionnants les uns que les autres, les confessions de Robert Moog résonneront longtemps dans l’esprit du passionné des bruits organisés. L’inventeur du synthétiseur éponyme qui inspira tant de mélodistes compare même la musique électronique actuelle au concept des voitures hot-rod dans les années 50, au sens que la recherche esthétique est une activité humaine rédemptrice.

Il serait impossible de ne pas recommander de joindre à la lecture du livre, même s’il est magnifiquement documenté, le visionnement du film facilement disponible en DVD, surtout à un lectorat francophone gagnant à entendre certains commentaires de Pierre Henry qui n’auront pas survécu aux traductions. Le pionnier rajoute une définition juste de ce qu’il est coutume de nommer "musique techno": "Quand j’étais enfant, j’avais dans ma tête des sons nouveaux, des sons inouïs, des sons que je ne pouvais pas interpréter… Et c’est le propre de la musique concrète, elle ne vient pas de l’interprétation ou de l’exécution sur un instrument, elle vient de l’imaginaire." À savourer en sachant que le père de Messe pour le temps présent, disque pressé en 1967, connu pour l’ultra-tube Psyche Rock, avoue aussi en entrevue qu’il a presque toujours considéré la diffusion des sons en mono comme supérieure à la stéréo, jugée trop panoramique. Musicographie impérative pour entichés, à lire cet été avec son baladeur bien calé.

Modulations, une histoire de la musique électroniqueTraduit de l’anglais par Pauline Bruchet et Benjamin Fau Édition Allia2004, 340 pages