Indisponible. Indisposée. Incommodée. Malade. Chaque fois que l'on m'invitait au tournoi de curling familial annuel, je me trouvais dans l'impossibilité de me joindre aux troupes. Et puis, mon horaire tumultueux s'est soudain trouvé éclairci lors de l'appel fatidique: pas d'excuse, mon baptême de curling était éminent.
La tuque, les gants, la double épaisseur de bas et de pantalons, je me dirige en forçant un brin mon enthousiasme vers le Club de curling Rosemère. Le sport de glace suscite pourtant l'entrain auprès du clan d'initiés qui patiente déjà dans la salle de réception du club qui arbore une déco surannée: sorte de croisement entre une salle communautaire de Club optimiste et de pub écossais. La glace est prête!
La répartition des équipes est annoncée par le maître d'ouvre du rendez-vous sportif: j'évoluerai au sein d'une équipe féminine – deux d'entre nous sommes recrues. Saurons-nous faire face à la concurrence?
Valse des balais
On m'explique rapido-presto les règles du jeu: en étant propulsées un peu à la manière de boules de bowling, les pierres doivent "rentrer dans la maison", c'est-à-dire atteindre l'un des trois anneaux de l'autre côté de la patinoire. Je m'adapte graduellement au plancher glissant et réalise deux coups d'essai: à l'instar de mes coéquipières, je prends position sur l'appui-pieds et troque la gracieuse technique de glissade des pros (telle que vue à la télé!) pour de petits pas en position accroupie. Bien qu'elle ait tôt fait de faire rigoler nos compères masculins, notre technique finira par faire ses preuves…
La première partie débute, je lance mes deux pierres. Trop à gauche et trop fort, je prends la mesure de ma force, de la portée de la pierre, des distances. J'expérimente ensuite les autres positions: celle de balayeur – très amusant de produire un effet d'aquaplanage pour prolonger l'élan d'une pierre en frottant frénétiquement la glace – et de "Skip" – encore plus de sortir les galets de l'équipe adverse une fois la ligne arrière franchie, en plus d'"appeler" les projectiles.
Ainsi se poursuit la valse des balais et des pierres: après avoir propulsé 16 pierres de granite, nous changeons de côté de patinoire et perdons finalement la partie, non sans améliorer nos lancers. Qu'à cela ne tienne, nous aurons encore trois parties avec diverses équipes pour faire nos preuves. Bien qu'approximatives, nos stratégies et cris d'encouragement joviaux finissent par payer: le triomphe de l'équipe de filles arrive finalement lors de la troisième partie contre une équipe forte en testostérone.
"Balaie, balaie, balaie!"; "Brosse, brosse, brosse!"; "Frotte, frotte, frotte!" Il y a autant de déclinaisons terminologiques qu'il y a de techniques de lancer au curling amateur. Voilà des qualités indéniables de ce sport intelligent, technique, stratégique, qui incite à une chaude camaraderie! Le bloc de trois heures de patinoire nous permet de jouer une ultime partie, alors que les pieds atteignent un point de congélation irrémédiable. La preuve est faite: après quelques heures de glace, nos performances s'améliorent significativement. Photo de curleurs au nez rouge et nous partons célébrer dans un restaurant environnant où les résultats du tournoi seront scandés haut et fort.
Alors, alors… Vais-je arborer dès demain les couleurs d'une ligue féminine de curling? Que nenni! Mais je mets dès à présent une paire de bas de laine au chaud pour le tournoi annuel 2011.
Album-souvenirs /
– D'un côté, l'orgueil de certains joueurs qui ont un rapport très émotif à la performance de leur équipe. De l'autre côté, un langage et des cris d'encouragement créé sur mesure par des joueuses qui s'amusent ferme et se réjouissent de peu.
– L'entretien des patinoires est un travail d'orfèvre si on en croit toutes les règles à respecter pour ne pas l'abîmer: on nettoie les bottes ou souliers sur des brosses rotatives avant d'entrer dans la halle; on doit stopper les pierres qui arrivent à toute vitesse pour ne pas marquer la glace; on ne doit à aucune moment les soulever; on doit se relever rapidement si on tombe pour ne pas réchauffer la glace…
-La halle de curling est disposée de sorte que les clients de la salle de réception ont une vue sur les patinoires, ce qui donne l'impression de prendre part à une joute d'échecs grandeur nature dans laquelle les curleurs sont les pions. À preuve: les joueurs s'arrêtent plus souvent pour réfléchir et causer stratégie que pour reprendre leur souffle.
Adresse /
Curling Rosemère: 224, chemin de la Grande-Côte, Rosemère, 450 437-1374, www.curlingrosemere.com
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Le curling… Activité peu commune par ici. Même que cela m’étonne d’apprendre qu’on y joue à Rosemère. Je pensais que le curling était une activité propre aux Maritimes.
À la télé, je regarde occasionnellement des joueurs balayer avec entrain, glissant rapidement avec une agilité remarquable sur une glace bien polie, et sans jamais se casser le cou…
Bon, en ce qui me concerne, je préfère simplement regarder.
(Il y a cinquante ans, peut-être m’y serais-je risqué – mais pas aujourd’hui. Et puis, dans le genre, la pétanque est aussi une affaire de stratégie, avec l’immense avantage d’être beaucoup plus sécuritaire lorsqu’on se cogne presque le nez à la soixantaine… Pas que je joue davantage à la pétanque, par contre…)
Cela dit, avant d’oublier pourquoi j’ai entrepris ce commentaire, voici: votre billet est fort intéressant, bien écrit, et pourrait même en inciter certains à aller voir de plus près de quoi il retourne du côté de ce sport peu usité. Sinon, il y toujours la pétanque…