Ballon d’essai

Embarquement immédiat

Son inauguration a su se faire désirer, les internautes suivant l'affaire depuis la page Facebook… Puis, quelques jours après la première neige de décembre, Bota Bota sablait le champagne. Retour en arrière. 2008. Deux sours, Nathalie et Geneviève Émond (de cette même famille Émond, propriétaire du Balnéa), souhaitent ouvrir un nouveau spa urbain à Montréal. Lorsqu'elles entendent parler d'un traversier vieux de 57 ans – reconverti en centre d'art flottant en 1967 – à vendre, elles voient des étoiles. La grande traversée qui a mené à la reconversion du bateau a été colossale: retrait des moteurs pour loger les vestiaires, ajout de trois ponts, remplacement de l'enveloppe par des panneaux de métal percés de 650 hublots, sans compter les défis d'ingénierie pour assurer stabilité, flottabilité. Les sours Émond ont du flair – ça court, dans la famille. Elles mandatent Jean Pelland et son équipe de Sid Lee Architecture pour le projet. Le résultat est chic, minimaliste, fondu dans le décor.

À l'abordage!

Les pieds dans la gadoue, à la nuit tombée, je cherche bêtement la rampe qui mène jusqu'au spa-navire amarré au Vieux-Port, à l'extrémité de la rue McGill. Des luminaires bleus éclairent mon pas. J'aperçois le bateau fumant: un écrin baigné de lumière et de silence qui flotte. Des hôtesses au chandail rayé m'accueillent et me remettent peignoir, serviette blanche ainsi qu'un bracelet muni d'une puce qui agira comme cadenas de casier, mais aussi comme comptable (si on profite du bistro ou d'un soin express). "Un agent de bord vous aidera à vous diriger à votre sortie." Changée, je pousse la porte Spa et quitte définitivement le port.

Dépaysement tribal

Ma croisière sur le Bota Bota s'amorce avec le Voyage tribal, un soin du corps qui emprunte aux recettes ancestrales africaines, mexicaines et polynésiennes. L'affable esthéticienne commence par un exfoliant à base de café 100 % arabica moulu aussi finement que du sable. L'odeur emplit mes narines alors que le corps se prépare au dorlotement. Suit un enveloppement à la cire de cactus. Je frissonne au contact de la concoction froide, mais me réchauffe aussitôt, emballée dans un cocon de plastique. Quinze minutes de repos dans la chaleur et la douceur. Je chasse autant que possible l'horaire d'avant-fêtes qui défile alors dans ma tête. Après la douche, le soin se poursuit avec la cérémonie polynésienne: modelage du corps avec un baume au Monoï de Tahiti, massage à l'aide de pilons – reproduisant le mouvement des vagues de l'océan – suivi d'un massage plus robuste avec les avant-bras. Me voilà au zénith de la détente. Un peu sonnée, bien que revigorée, je sors de ce cocon dépaysant pour aller casser la croûte. Le comptoir santé est assuré par le traiteur Primavera: roulé au saumon frais, salade de betterave jaune au miel à la truffe, pavé de saumon poché au vin blanc. C'est bon, c'est frais, mais pour une expérience de spa en hiver, quelques options de repas chauds seraient bienvenues. Tisane parfumée, et allez, aux bains!

Se la couler douce

Première trempette dans le bassin multiforme du troisième pont. Je retire la robe de chambre à la hâte et sors à l'extérieur: le vent froid me glace les os avant que je m'immerge complètement. La vue est remarquable! D'un côté, l'impressionnant Silo no 5 et le néon Farine Five Roses rouge qui scintille, et devant, un Vieux-Montréal emmitouflé dans l'hiver, et de l'autre côté, le fleuve, hypnotisant. Vingt minutes suspendues, je suis déjà refroidie quand j'arrive au bain froid pour une saucette minute. Je fais suivre du sauna côté fleuve. Pelletée d'eau sur les pierres pour que la température monte. Dans le haut-parleur, point de musique de petits oiseaux, mais des artistes québécois qu'on chérit, Dumas, Bélanger… Petite tempérance et repos dans l'espace prévu à cette fin. Je fais suivre du bain vapeur et recommence le cycle d'eau en optant la deuxième fois pour le sauna côté ville. Je prendrai alors mon bain froid sur la terrasse supérieure. L'opération thermique réussit: au contact de l'eau froide, les pores de peau se ferment et emprisonnent la chaleur. Je peux ainsi rester sur la terrasse quelques minutes pour admirer le panorama à 360 degrés. Le fleuve est figé sous des croûtes de glace, la ville et le fleuve poursuivent leur course.

Album-souvenirs /

-Tout sur le plan de la signature visuelle est pour moi un sans faute: le logo, les immenses lettres sur les casiers qui rappellent l'imagerie des sous-marins militaires, les motifs marins sur les tapis, sur les décorations murales…

-Les saunas sont parmi les plus beaux que j'ai vus, mais je suis restée froide devant le hammam. Le bain vapeur est habituellement mon préféré. Ici, il est petit et peu mis en valeur.

-Les espaces de détente m'ont réjouie: on a le choix entre les sacs de billes et les chaises longues. À côté des superbes photophores, des magazines sur la famille, les affaires, la déco, la bouffe sont mis à notre disposition. Au deuxième pont, on peut même se coucher à l'intérieur de grands hublots coussinés.

Adresse /

Bota Bota: 358, rue de la Commune Ouest, Quais du Vieux-Port, Montréal, 514 284-0333, www.botabota.ca