Hmmm, le parfum du café! L'odeur caractéristique d'un café. Le bruit de la machine à espresso. La tasse fumante. Le café sous toutes ses moutures! "J'aime", comme dirait l'autre. Toutefois, je m'en confesse: je souhaiterais en boire moins, mais en boire mieux. Comme du bon vin. Et après 90 minutes d'exploration olfactive et gustative du précieux nectar avec Jean-François Leduc du Café Saint-Henri, on ne s'étonne pas tant du rapprochement.
Le bon grain de l'ivraie
En retard, je cours comme une poule sans tête entre la sortie du métro Lionel-Groulx et le Café Saint-Henri, rue Notre-Dame Ouest. Soulagement: on attend encore une autre personne. J'en profite pour zieuter la salle: bancs d'église, tables blondes, murs gris avec graphismes. Parmi ceux-ci, ce calcul proposé comme un point d'interrogation: 1,3 x 330/22 = 19,5. "C'est la formule d'extraction du café. Faudra prendre le cours Barista Pro pour la comprendre!"
Mais pour ce soir, c'est le cours De la cerise de café à la tasse qui est au programme. Après s'être présenté – cet homme brillant a abandonné sa carrière d'avocat pour devenir barista, puis propriétaire et dégustateur professionnel -, Jean-François présente chacun d'entre nous. "Comme vous allez pratiquement boire dans la même tasse ce soir."
La première partie théorique, fort étayée, aborde les quatre grands facteurs qui influent sur la qualité du café: le terroir, la méthode de récolte, la torréfaction et le savoir-faire de la préparation (capital!)
Le nez
On entame ensuite le voyage des sens avec la portion olfactive. Quatre cafés, trois continents: la Colombie, l'île Sumatra, l'Éthiopie et un mélange à espresso GodShot (Colombie et Guatemala). Notre hôte fait moudre les fèves de chaque café de sa sélection dans trois tasses et nous demande de mettre (littéralement) le nez dedans pour en identifier quelques arômes. Je me prends au jeu et note mes hypothèses: de la noisette dans le colombien? un soupçon de vanille dans l'éthiopien?
Je reconnais immédiatement dans le Sumatra le goût d'un café déjà goûté que je n'avais pas aimé. "Longtemps on a reproché au Sumatra son goût terreux, de cuir, presque fermenté. Aujourd'hui, on le voit non plus comme un défaut mais comme une caractéristique acceptée et propre à cette région. Le café indonésien a plusieurs adeptes!"
Il coule ensuite de l'eau bouillante dans les 12 tasses et laisse infuser pendant quelques minutes. On doit alors "casser la croûte" à l'aide d'une cuiller pour humer le café mouillé. D'autres effluves s'en dégagent. Une certaine note épicée dans le Sumatra. Un aspect floral à l'éthiopien.
Les papilles
On poursuit avec la dégustation. Jean-François nous tend une cuiller et nous montre comment aspirer la gorgée, la remuer dans la bouche, avant de l'avaler ou de la cracher (pour ceux qui, comme moi, craignent les effets de la caféine sur leur sommeil prochain). Un formulaire détaillé nous permet de coter les cafés selon les critères de leur fragrance, leur saveur et arrière-goût, leur acidité, leur corps, leur balance…
J'essaie d'abord de me concentrer sur le goût: acide, doux, salin, amer? Puis, je me concentre sur les arômes. Je reconnais ceux sentis dans le colombien et le Sumatra – qui ne me plaît toujours pas mais que j'aimerais bien goûter infusé à froid tel que le proposait Jean-François – peut-être me rappellerait-il le désaltérant Kombucha?
Je suis ravie par l'éthiopien qui révèle, en bouche, du citron, un relent de thé Earl Grey. Je suis aussi fort séduite par le GodShot, bien balancé, rond, savoureux.
La dégustation se termine et notre hôte nous ouvre finalement les flacons d'odeur (tirés du livre Le nez du café par Jean Lenoir) qu'il avait associés à chaque café. Nous les humons et tentons de deviner leur contenu avant qu'il nous le révèle. Un peu de noisette grillée, de caramel, d'abricot et de beurre frais dans votre colombien, monsieur? Un poème aromatique! Les odeurs de terre, de cuir, de cerise et fleur (exquise!) de caféier sont attribuées au Sumatra. L'éthiopien cachait pour sa part du thé à la rose, du citron et une note miellée.
La formation se conclut sur une note radieuse: on nous invite à choisir un sac de notre café préféré. On dit que les arômes du café en révèlent sur sa terre nourricière… Mes matins sont depuis embaumés par les notes d'agrumes, de vanille et de fleurs de l'Éthiopie.
Album-souvenirs /
– Il fallait nous voir le front, le menton et le nez parsemés de poussière de café après qu'on a humé toutes les tasses. Bon pour la peau, le café!
– Saviez-vous que le café le plus cher au monde, le Kopi Luwak, tient son caractère unique du fait qu'il est récolté dans les excréments de la civette, petit mammifère nocturne qui ne digère pas le grain?
– Dans les parfumeries, on fait humer du café en grains aux clients pour leur "flusher le nez". Un non-sens pour Jean-François! Et pour nous aussi, après avoir mis le nez dans des cafés si odorants!
Adresse /
Saint-Henri micro-torréfacteur: 3632, rue Notre-Dame Ouest, Montréal, 514 507-9696, sainthenri.ca
En plus des formations sur réservation, le Café offre les mercredis (et parfois les samedis) des séances de dégustation spontanées des cafés fraîchement torréfiés.