Quiconque a déjà assisté à une soirée Total Crap peut témoigner de la folie contagieuse qui y règne et de l’attrait irrésistible pour la médiocrité qu’y ressent le public. Depuis sa première apparition lors d’une soirée Kino à Québec, la popularité de cette grand-messe où le mauvais goût est roi ne s’est jamais démentie. À preuve, Pascal Pilote, le spécialiste de la télé communautaire, et Simon Lacroix, l’expert en cinéma trash, célébreront le 10e anniversaire de Total Crap, en collaboration avec le festival SPASM, au Métropolis ce vendredi, en compagnie de nul autre que MC Gilles, maître ès quétaineries, et de l’inénarrable Normand L’Amour.
«Tous les deux, on ne tripe pas seulement sur la médiocrité, affirme Pascal Pilote. Je suis un maniaque de musique et Simon est un cinéphile. C’est par hasard, en regardant des VHS pour y trouver des vidéoclips, que nous avons commencé à dégoter de la mauvaise télé. Ce qui fait que l’extrait est totalcrapesque, c’est très dur à décrire. Je ne sais pas non plus pourquoi les gens aiment tant ça.»
«Je ne sais pas d’où vient cet engouement pour la médiocrité, avoue Simon Lacroix. Chaque personne qui assiste à un show de Total Crap recherche quelque chose de différent. Certains sont peut-être nostalgiques d’anciennes émissions, d’autres aiment voir les gens se péter la gueule à la télé. Il faudrait demander à un anthropologue de faire une étude sur le sujet.»
Ainsi, au cours de la décennie, les fidèles disciples de Total Crap ont pu découvrir ou revoir des extraits de Beaux prés, sans doute la pire émission sur l’agriculture de tous les temps, le Noël du Canal 9, où les pauvres animateurs se font invectiver au téléphone par des téléspectateurs, ou l’incontournable Relevez le défi qu’animait le sympathique Gaston Lepage à TQS dans les années 1980, âge d’or de la cassette VHS.
«On adore Gaston Lepage! s’exclame Pilote. Il est venu animer au Club Soda avec nous il y a deux ans; il a tripé ben raide! Lui-même trouve ça totalement ridicule, Relevez le défi. On ne se fout pas de la gueule des gens, on se moque plutôt des situations, des moyens techniques.»
«On n’invite pas les gens pour se moquer d’eux, il n’y a rien de méchant dans ce que l’on fait. Une personne qu’on a approchée pour les 10 ans a refusé l’invitation, mais a accepté que l’on présente des extraits. En 10 ans, on nous a demandé trois fois de ne pas passer des extraits. Tout dépend du degré d’humour de chacun. Tout ce qu’on passe à Total Crap, on trouve ça mauvais, mais on aime ça! Et on n’a pas honte d’aimer ça!», jure Lacroix.
Les deux enfants terribles des désastres de la télé ne s’en cachent pas, c’est la passion qui les anime. Ce que l’on voit lors d’une soirée Total Crap n’est que la pointe de l’iceberg. Ils font les marchés aux puces à la recherche de trésors télévisuels et cinématographiques. Pas question pour ces deux messieurs de présenter des extraits glanés sur YouTube vus des millions de fois. Récemment, Pascal Pilote a mis la main sur quelque 250 cassettes Beta de TQS Québec. Et bien sûr, Simon Lacroix a trouvé en Turquie, au Bangladesh, au Pakistan et en Inde une source intarissable de films de série Z – avez-vous déjà vu le Star Wars turc? L’avenir est donc assuré pour Total Crap…
«Lorsqu’on a fait Total Crap 4, on ne savait pas si on allait continuer parce qu’on était sûrs qu’on allait arriver au bout de tout ce qui était mauvais. On est rendus aux 10 ans de Total Crap et on n’a pas l’impression d’être arrivés au bout. Je ne suis pas sûr qu’on va venir à bout du cinéma international, mais sans doute qu’on y arrivera pour la télévision québécoise des années 1980. C’est certain qu’il y aura une 11e édition, probablement une 12e, mais on ne sait pas encore vraiment ce qu’on fera dans deux ans. Notre but n’est pas d’avoir une émission à la télé. Ce qui nous importe, c’est de faire nos représentations grand public et de voir les gens rire», conclut Simon Lacroix.
Le 10 mai au Métropolis. Ouverture: 19h30. Représentation: 21h.
Tout ça est d’un goût douteux… ou d’un mauvais goût douteux, pour écrire moins mal. Pouah!