Ne rien dire. Sans plus. Et pourtant l'étendre sur toute une chronique. Je vous entends m'interroger, le sourcil levé… Non, il n'osera pas?
Si, il osera.
Risquer sa crédibilité en sept cent cinquante mots. C'est de toute façon ce qu'il fait chaque semaine. Sur la corde raide, comme un funambule qui n'a jamais appris son métier et qui joue au déséquilibre. On the edge, comme dirait l'autre.
Parce qu'au-delà de la pensée, de la critique, du point de vue, un chroniqueur crée, de façon hebdomadaire, un produit plus ou moins fini qui le met sur la sellette. Si ce n'était pas le cas, le jeu n'en vaudrait peut-être pas la chandelle – certains s'y refusent, on sait ce que ça donne…
Toutes les fois que je m'assois devant mon clavier, le mardi matin, dans le but d'écrire ma chronique, je pense à un homme, un personnage que j'ai probablement créé et qui évolue malgré tout parmi mes souvenirs. Son image est si précise que je dois parfois me demander si je l'ai véritablement inventé.
Le type vivait à une autre époque. Et pour nourrir sa famille, il travaillait dans une shop où l'on produisait du cordage. On fournissait entre autres le ministère de la Justice, au temps où la peine de mort par pendaison était toujours légale au Canada.
Chaque fois que j'entame une chronique, c'est à lui que je pense, qui chaque matin, au moment de "puncher", se demandait s'il ne serait pas un jour condamné à être pendu avec une corde qu'il aurait faite de ses mains.
Les mains bien placées au-dessus du clavier, l'index gauche sur le F, le droit sur le J, dans l'instant qui précède le cliquètement des touches qu'on enfonce, je sais que chacun des mots que j'écrirai sera tâté, pesé; on en évaluera le poids, la portée, la couleur et les nuances. On cherchera peut-être à me faire ravaler mes paroles, avec plus ou moins de tact. Ou on me remerciera – parce que ça arrive aussi, heureusement.
Honnis soit qui ose s'en plaindre… Et pourquoi pas.
J'ai simplement le cafard. Ce n'est pas réfléchi, ça ne peut être expliqué. J'ai toutes les raisons du monde de sourire – croyez-moi sur parole. Je me sens juste, sans raison, un peu barbouillé. Comme la température depuis quelques jours. Comme un bonnet de nuit sans coiffe. Comme un lendemain de fête. Comme un fond de bouteille trop tôt, trop vide, trop vite.
Alors avec cette neurasthénie assumée, voire alimentée…
Dompter ses cafards, leur apprendre des tours, qu'ils fassent des culbutes, bondissent dans des cerceaux de feu, épatant la galerie.
Que nos cafards nous fassent sourire. Qu'on sorte, simplement, malgré la grisaille. Qu'on s'abandonne à un joyeux abattement, les pieds dans la gadoue ou les cheveux dans le vent – en cette saison qui joue les imposteurs, difficile de s'y retrouver.
Simplement, ne plus être capable d'endurer ce confinement, refuser de rester assis derrière son bureau. Avoir envie de faire un grand ménage. Pas question de tout remettre en cause. Juste rafraîchir. C'est la première fois que je ressens avec une telle urgence le besoin de tout nettoyer, de réaménager, de rénover. Ma vie est un éternel changement, et je dois en remercier les artistes qui renouvellent leur offre tout au long de l'année. Mais un changement dans ma routine, aussi étrange que ça puisse paraître, ce serait un peu de stabilité.
Serait-ce le blues qui a fait tache d'encre dans la région la semaine dernière qui m'aurait donné le vague à l'âme? Je ne crois pas. La grisaille des derniers jours alors, les franges d'un hiver qui surprend en étirant ses dentelles? Peut-être. Suis-je vraiment maussade ou est-ce pour la forme? Vous ne le saurez jamais.
Si au moins Baudelaire n'avait pas planté ses fleurs dans un supplément de spleen et d'humeur noire… Peut-être serais-je véritablement devenu un poète.
Dans le capharnaüm de mon bureau, je me laisse écouter le nouvel album de Daniel Bélanger, L'Échec du matériel. Sans faire fuir les cafards, ça fait du bien de l'entendre à nouveau. |
Dans le capharnaüm de mon bureau, je me laisse écouter le nouvel album de Daniel Bélanger. Je suis un fan fini, alors cette nouveauté aurait dû faire fuir mes cafards… Ses chansons me rentrent dedans.
"La fin de l'homme/ne sera pas la fin du monde…" Non plus ma propre fin. Je n'aurai peut-être rien changé. Je n'aurai peut-être écrit que du vent dans l'interligne obscène de mes chroniques. Même lorsque j'aurai véritablement eu quelque chose à dire. Je n'aurai peut-être pas changé le monde. Mais j'aurai essayé. Pas aujourd'hui, mais tout de même. Et j'en aurai profité.
J'avais juste envie de vous dire que j'ai le cafard, mais que les cafards, ça peut se dompter. Dans quelques jours à peine nous prendrons d'assaut les centres-villes. Nous serons un peu plus nus, un peu plus proches. Un peu plus souriants, peut-être.
J'aimerais vous rencontrer.
Pauvre Jean-François Caron avec son cafard et sa noirceur, de printemps 2007! Je n’irais certainement pas aussi loin que lui, dans son introversion du moment. Il y a toujours une exagération évidente dans l’utilisation des termes appropriés qui peuvent correspondre à ce que l’on ressent au moment présent. L’usage du mot cafard qui correspond à cet insecte hideux et cauchemardesque, n’est pas le terme à utiliser, ce serait plutôt un léger spleen, une mélancolie envieuse des beaux jours à venir, qui se répète, chaque année, à cause de cette nouvelle civilisation de mutation du climat, dans nos belles saisons traditionnelles, de cet hiver qui prend la place du printemps et s’éternise, à nous faire mourir d’ennui. Nous subissons tous un peu, ce vague à l’âme des années 2000, qui n’a rien à voir avec le cafard, la neurasthénie, les idées noires, qui sont une étape supérieure, en sphère psychiatrique et, qui peuvent amener des idées suicidaires. Je pense alors que Jean-François Caron devrait nuancer ces propos et revoir l’étymologie de ses mots.
Je pense que c’est normal d’avoir le cafard à cette période de l’année. On a passé une bonne partie de l’hiver en hibernation et on a juste envie de voir le soleil et pouvoir enlever quelques couches de vêtements. On pense pouvoir y arriver avec l’arrivée du printemps, mais non c’est la pluie et là la neige qui sont au rendez-vous. Pas facile pour le moral et c’est normal que ça soit pesant pour bien des gens. Moi je veux qu’il fasse chaud, je veux prendre une marche sans avoir à me mettre des mitaines et un foulard et surtout, je veux pouvoir me prélasser sur le bord de la piscine. À chaque année le blues nous revient et comme on est au Québec, ça ne s’arrêtera pas demain matin!
Un esprit sain dans un corps sain. Ce vieil adage contient plus de sagesse qu’il n’en paraît. Prendre soin de son corps revient à prendre soin de soi. Se sentir plus en forme, forte et pleine d’énergie ont un effet plus que positif sur l’estime de soi et la façon de se percevoir, bref, sur la santé mentale. Faire de l’exercise stimule la libération d’endorphines, hormones qui procure un sentiment de bien-être et de plaisir. Il suffit seulement de profiter des ressources naturelles de notre corps. Plus facile de sourire ou de retrouver le sourire lorsqu’on se sent bien dans sa peau. De plus, fréquenter un gym où les gens sont là pour les mêmes raisons que soit, crée un environnement sain où il fait bon évoluer. Ainsi , je passe à travers la déprime du printemps sans que cela m’affecte.
C’est vraiment génial de réaliser qu’une déception peut-être suivi par de la satisfaction, un chagrin par une joie et pourquoi pas remplacer une session d’exercice par de la crème glacée en compagnie d’amie, c’est ce que je fais à l’occasion quand le cafard des beaux jours se fait sentir.
Allez, avouons-le ! Nous prenons plaisir à écouter les discutions dans les cafés, à coller l’oreille au mur mitoyen quand les voisins hausse le ton. Nous sommes tous curieux de connaître ce qui se cache dans les tiroirs des autres. Ainsi nous sommes heureux de se rendre compte que les autres aussi ont leurs bébites, leurs cafards.
Si on parle vraiment de l’insecte en question, laissez-la aller, il fait tellement froid en cette période de l’année, qu’il tombera en hibernation! Et foutez-les dehors, que diable!
Mais, si vous parlez de l’autre cafard, celui de la mélancolie? Il faut sortir. Les deux pieds dans la neige, ou la (sloash), selon le cas! Ou, faire du sport, visité d’autres régions! Venez, faire un tour en Mauricie? Nous sommes très accueillants! Je blague! Quoique, c’est pourtant vrai! Mais, ne restez pas dans un état d’esprit, aussi défaitiste. L’impôt va passer, le soleil va se pointer, et vous en rirez! En passant : Joyeuses Pâques!
Après tout ces mois d’hiver à être limité dans nos activités, voilà que l’hiver vient s’accrocher et qu’elle ne veut pas partir. Tout le monde en a marre de la neige et on a maintenant besoin des chauds rayons du soleil. On sent que le printemps est tout proche, mais il ne veut pas prendre ça place. Quel supplice que cette attente !
Mais soyons patient d’ici quelques semaines, nous serons sur nos vélos ou bien sur le bord d’une plage et là, il y en aura encore qui seront là pour se plaindre qu’il fait trop chaud!
« Ne rien dire »? Au contraire, Jean-François, votre texte parle beaucoup. C’ est selon moi un très beau morceau, beau de la fragilité humaine avec ces états d’ âme qui nous surprennent parfois dans notre quotidien, dans des moments de détente ou de travail, les « mains bien placées au-dessus du clavier ». Beau de la complicité que vous établissez avec nous, lecteurs, par ce ton de confidence trop rarement « risqué » par les journalistes professionnels, soucieux avant tout de la pertinence et de l’ effet.
Le cafard peut bien sûr être dompté, mais tout comme la mélancolie, il peut inspirer des poésies et même, nous en avons un bel exemple aujourd’hui, des « anti-chroniques » géniales! D’ ailleurs il est déjà passé, non?…
Après avoir eu bien du » fil à r’tordre » au boulot.
(lui ou son père, c’est pareil car les coeurs sont très proches,parfois entre deux générations successives)
Pardon pour ce trop long titre mais
Je suis prise au piège, tout à fait car je trouve votre éditorial charmant, surprenant et très humain..même que je trouve qu’il nous sort de la routine et (du cafard )et nous fait oublier la grisaille de ces jours éternellement quotidiens. Je suis contente que vous vous soyez permis de l’écrire… de plus, il correspond, il me semble à la morosité ressentie par plusieurs d’entre nous en ce moment post-hiver et post plein de choses pour tous ces gens dont le coeur bat et se débat pour traverser l’hiver, et la vie, courageusement.
Loin de moi, l’idée de vous reprocher d’avoir écrit ce que vous ressentiez quand vous vous
êtes assis à votre table de travail et d’avoir, de cette façon,choisi l’authenticité. Au contraire, je veux vous en remecier car cela fait beaucoup de bien à l’âme de lire un pareil texte, je ne dirai pas une chronique,dans les circonstances,et puis au risque de me répéter c’est tellement bien écrit et , de plus j’ai bien aimé en apprendre un peu sur ce que vous avez vécu par le passé(ou plutôt, votre père,ou un proche?)
J’ai été touchée quand vous avez évoqué la peine de mort, faisant référence à un passé pas si lointain, malheureusement . Il s’agissait de la fabrication en usine du cordage utilisé entre autre pour ce chatiment: un homme dont c’était le travail a réfléchi, à la possibilité qu’ un jour il soit utilisé pour sa propre pendaison …il est bien vrai que la réalité va souvent et très très souvent…au delà d e la fiction. Je vous dirais pour terminer que le blues n’a pas fait tâche d’encre seulement dans votre région mais dans plusieurs autres et que je remercie les franges de l’hiver d’avoir étiré leurs dentelles jusqu’à votre âme de poète.
Mais ne savez-vous pas que la plupart des gens ont le cafard à ce temps-ci de l’année. Ça fait longtemps qu’on a pas vu le soleil, on est plus habitué à rester à l’intérieur. Il neige encore, il fait gris. Tout cela joue sur l’humeur des gens. Et donc, rendu à la fin mars, début avril, on a le cafard, la petite déprime.
Personnellement, j’ai chez moi maintenant, une lampe magique. Cette lampe qui me procure de la lumière tout l’hiver (luminothérapie). Et cela fonctionne. Fini le cafard du début du printemps qui tarde à arriver. J’ai eu mon plein de soleil tout l’hiver et il ne me manque plus à l’arrivée du printemps. Par contre, si ce sont les mini-jupes et les décolletés qui vous manquent en ce temps-ci de l’année, cette lampe ne peut pas vous aider, je vous conseillerais plutôt ces endroits réservés aux hommes avec un petit $10 dans vos poches.