<p>On dit qu’elle ne sort que dans ses plus beaux habits. Et encore qu’elle ne parle qu’à ceux qui font un véritable effort pour la comprendre. Et bien plus, qu’elle vous salope un regard hautain quand vous tentez de l’approcher.</p>
<p>Et pourtant, si on la connaissait bien, on la verrait sous un autre jour. Moi, j’aime flirter avec elle. C’est avec son vieux jean, sa camisole délavée et ses cheveux en broussailles qu’elle est la plus sexy. Quand on la regarde sans qu’elle ne le sache. Qu’on aperçoit un bout de chair qui devrait être couvert (soupir).</p>
<p>J’aime surtout quand elle me surprend. Que je n’ai pas à faire les premiers pas. Qu’elle me fait un petit coucou au passage, attire mon attention pour me déjouer d’un baiser volé, d’une caresse coquine, de quelque vertige. </p>
<p>Ce sera son anniversaire cette semaine. On la célébrera partout à travers le monde. Et même si elle existe depuis toujours, depuis aussi longtemps que l’homme cherche à mettre des mots sur son expérience, ça ne fait que 10 ans qu’on lui fait ainsi une fête.<br /> <br /><strong>JOURNÉE MONDIALE DE LA POÉSIE</strong><br /> <br />C’était l’automne à Paris quand l’UNESCO a décrété, dès 1999, que le 21 mars serait la Journée mondiale de la poésie. Dans un message officiel, le directeur général de l’organisme international, Koïchiro Matsuura, dit de la poésie qu’elle est la plus intense des liaisons articulant la singularité à l’universalité. De bien grands mots pour dire que la poésie permet de se retrouver face à soi-même, et à la fois de se sentir profondément humain, solidement lié à ses contemporains. </p>
<p>Dire que plusieurs pensent encore que la poésie est un genre désuet. </p>
<p>On ne peut leur en vouloir. La plupart des gens ont eu leur baptême poétique plutôt rude, bien assis, cordés sur des bancs d’école. On la leur a présentée comme une activité pareille aux autres, parmi les tables de multiplication et l’apprentissage aliénant des règles du participe passé… Et on a mis la poésie sur un piédestal difficile à déboulonner en ne présentant que les plus célèbres auteurs. </p>
<p>On ne dit pas aux enfants qu’ils sont déjà des poètes. Pourtant, on les laisse bien dessiner, on leur dit même que leurs gribouillages sont des chefs-d’œuvre. On ne s’attend pas à ce qu’ils deviennent des Riopelle, des Borduas ou des petites Ferron. Alors pourquoi quelques vers enfantins ne pourraient-ils pas aussi être grandioses? Et même si chacun ne devenait pas un Miron ou une Lalonde? Ce n’est tellement pas ce qui importe. </p>
<p>Et ce ne serait de toute façon pas souhaitable. Il se publie déjà trop de livres au Québec – c’est du moins ce qu’il faut croire si on écoute se lamenter plusieurs éditeurs qui se plaignent que tout le monde veut se gratter le bobo et parler de son vécu. (Évidemment, la vague de témoignages publiés au cours des dernières années n’est pas sans leur donner raison.)</p>
<p>Mais la poésie n’a que peu à voir avec le livre. Parce qu’elle ne s’écrit pas toujours, voire pas souvent. Pour moi, c’est plutôt un mode de vie. Et ce qu’il y a de plus étrange, sans doute, c’est que cette manière d’être au travers du monde n’est pas uniquement le fait des poètes. </p>
<p>Si bien que même si tous les poètes du monde étaient fusillés par l’oppression, brûlés au bûcher de l’intolérance, pendus aux branches de l’incompréhension, il resterait toujours de la poésie. Et à la fois, si la poésie était effacée de l’histoire comme le furent les opposants au régime communiste russe au cours du siècle dernier, il y aurait toujours des poètes.</p>
<p>Le 21 mars, je vous invite à faire un pied de nez à vos préjugés. À vous rendre à votre bibliothèque, et à emprunter un recueil de poésie, peu importe lequel. Rapportez-le à la maison, et ouvrez-le au hasard pour l’interroger, comme on le ferait avec une Bible, par exemple. Inutile de chercher à comprendre le recueil d’une couverture à l’autre. Trouvez seulement un vers, une strophe, un mot pris isolément, peut-être, qui vous séduira, ou vous bouleversera. Et jouez-en, répétez-le, chantez-le. </p>
<p>Vous verrez, la poésie, c’est comme l’amour et la téquila. C’est quand on la prend avec un grain de sel que c’est bon…<br /> <br /><strong>AGENT DE DÉSINFORMATION</strong><br /> <br />Deux petites corrections devraient être apportées à ma dernière chronique, qui traitait du décès de Stanley D’Haese et de la démarche artistique d’Eva Mayer. </p>
<p>D’abord, la résidence de Mayer à Langage Plus n’a pas lieu dans le cadre du programme de Résidences croisées, mais bien grâce aux Pépinières européennes pour jeunes artistes. De plus, comme les locaux du centre d’artistes seront en cours de rénovation dans les prochaines semaines, le vernissage du 9 avril aura plutôt lieu dans la salle d’exposition du centre Sagamie, qui est associé au projet. C’est quand on s’y attend le moins qu’on devient un agent de désinformation…<br /></p>
Sel, téquila et poésie
Jean-François Caron
Bon, selon moi, la poésie ce n’est pas une « manière d’être » ou « un mode de vie » : c’est l’être et la vie… ;-)
L’humain naît poète… Et, la poésie, ce n’est pas des soupirs, ni des délires… c’est le chant de l’âme avec des images de mots et des sons de voix…
Merci pour ce blogue… infâme que je suis, j’ignorais qu’il existait une « Journée de la poésie ».
C’était mon grain de sel… Tchin tchin : « À la bonne vôtre ! » ;-)