Quand je serai grand, je serai animateur de radio. Genre l’après-midi, le soir ou la nuit, mais pas le matin. Comme ça, j’aurai pas ma face sur les autobus et au mieux, il y aura un poster de moi – probablement que je porterai juste une chemise mais pas de cravate – dans un tourniquet à Place du Royaume. Tsé, pas trop la grosse affaire mais ben correct.
Pour dire vrai, plus je vieillis et moins je pense que ça me dérangerait de présenter des tounes qui ne me font pas triper. Du LMFAO par ici pis le nouveau hit d’Isabelle Boulay pis envoye par là mon ami.
Je le dis souvent, mais je suis chanceux d’avoir une job comme chroniqueur. Je me considère comme un des derniers Mohicans. Dans un monde où tout va toujours plus vite, on est de moins en moins à avoir du temps pour peser ce qu’on va dire. Dans mon cas, c’est pas rare qu’en relisant une phrase, je me rende compte que la tournure a juste pas de bon sens. Suffit seulement d’un mot à la mauvaise place et ton propos qui était pourtant génial devient aussi cohérent que la toune I’m a Scatman. Même que parfois, en donnant un dernier coup d’œil à ma chronique sur laquelle je viens de passer deux heures, je décide de la jeter dans la corbeille et de m’attaquer à un autre sujet. Je suis comme Marty McFly, j’ai la chance de pouvoir voyager dans le temps. Du moins, dans une certaine mesure.
Quand tu animes à la radio, ça se passe là. Quand c’est dit, c’est trop tard. Tu peux toujours essayer de te reprendre à la prochaine intervention, mais tu peux aussi du même coup juste empirer la situation. C’est un peu comme chauffer un char pas de ceinture à 120 km/h dans une route de campagne avec plein de virages.
Maintenant, dans des conditions comme ça, faut pas se surprendre de déraper une fois de temps en temps. D’ailleurs le morning man de Radio NRJ au Saguenay, Richard Courchesne, en sait quelque chose.
Vous connaissez certainement l’histoire: en gros, on a dit qu’une des candidates de Star Académie ressemblait à la blonde de Shrek. Ok, on est bien loin de l’humour raffiné, mais de là à déchirer sa chemise…
Et pourtant.
La nouvelle s’est répandue à une bonne vitesse dans les médias sociaux et aussitôt, de nombreux blogueurs ou twitteux démonisaient littéralement Courchesne. Sur l’échelle du mal, tu avais Kony en bas, puis le fantôme de Ben Laden, le diable et tout en haut, Richard Courchesne. Wô minute petit bonhomme…
Premièrement, le gars s’est excusé le lendemain même. Secundo, Courchesne n’a absolument rien d’un animateur de radio poubelle. Sacremoune de corail… sa job est de mettre de la bonne humeur dans votre matin, de survoler les mauvaises nouvelles du jour tout en essayant de pas rendre ça trop lourd, d’organiser des concours rigolos et surtout de ne pas vous donner le goût de foncer dans un mur parce qu’il ne fera pas beau encore aujourd’hui. Croyez-moi, y a aucun représentant de la publicité à NRJ qui doit courtiser les clients en leur disant: «Tout le monde écoute notre show du matin parce que Courchesne, y brasse d’la marde non-stop!»
Je suis désolé de vous l’apprendre, mais si, par malheur, vous faites partie de ceux et celles qui se sont immédiatement ligués contre Richard Courchesne, voire qui ont été jusqu’à demander son renvoi sur-le-champ, vous n’avez pas fait preuve de justice populaire. Vous ne vous êtes que prêtés à un exercice de vertu cheapette.
Je ne vous blâme pas, car vous avez certainement cru agir dans un élan de noblesse. Mais méfiez-vous. Ne vous laissez pas aspirer par l’air du temps.
Pendant que le gouvernement se réjouit de vous voir vous régaler de ces vaines chasses aux sorcières, dans votre dos, on vous fait des choses que même un animateur de Radio X, malgré son langage coloré, hésiterait à dire en ondes.