Mettons qu’on oublie la raison du conflit. Mettons qu’on met nos convictions politiques et économiques de côté. Mettons qu’on laisse faire nos petites opinions. Parce qu’on en a tous une, une opinion. Qu’on la défende mollement ou farouchement. Qu’on soit, comme dans les sondages, totalement en accord, fortement en accord, assez en accord, neutre, assez en désaccord, fortement en désaccord ou totalement en désaccord.
Mais mettons qu’on s’en détache, de cette opinion, juste un peu, pour voir.
Juste le temps de se dire que c’est beau. C’est beau de voir les gens se mobiliser pour quelque chose qui leur tient à cœur. De les voir se rassembler et descendre dans la rue pour une cause qu’ils partagent. De les voir garder bien vivant un mouvement dont on avait prédit l’essoufflement depuis belle lurette. Après 80 jours, il n’est même pas un peu sur le respirateur artificiel, ce mouvement.
On aura beau dire ce qu’on voudra en regardant les nouvelles sur notre télé plasma, calé dans un gros sectionnel en cuir brun, il faut avouer qu’ils sont inspirants, ces étudiants. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je me suis rarement sentie aussi cheap que la semaine dernière, emmitouflée dans ma douillette, à suivre #manifencours sur Twitter en direct de mon salon. Cheap parce que j’étais au chaud et que j’avais attendu cette seule soirée off avec tellement d’impatience. Cheap parce que j’étais toute fière d’avoir affiché mes couleurs, marché un peu, écrit une chronique sur le sujet, et retweeté une couple de trucs punchés en me disant que j’avais un peu participé à tout ça à ma façon. Comme si ça avait changé quelque chose. Cheap, donc, mais aussi émue à la fois, de voir cette mobilisation continuer, malgré les intempéries. Et par intempéries, je parle non seulement de la pluie froide de ce soir-là, mais aussi des autres tempêtes soulevées par les actions des étudiants.
Avoir le courage de ses opinions, c’est bien. Agir en conséquence, c’est mieux.
Je tenais donc à saluer ceux qui participent – pour vrai – au mouvement. Pour leur fougue. Pour leur persévérance. Pour leur courage. Pour la défense de leurs idéaux. Pour leur volonté de changement. Pour ce que certains voient peut-être comme une belle naïveté, mais qui est en fait un doigt d’honneur poli envoyé aux vieux cyniques. Pour les soirées off qu’ils ne prennent pas. Pour leur présence sept jours sur sept, sans heures supplémentaires payées. Sans heures payées tout court.
Je ne sais pas pour vous, mais moi, en ce début de 21e siècle, j’ai rarement vu autant de bénévolat. Et je trouve ça beau.