Facebook doit être responsabilisé pour la dépendance de ses utilisateurs
Si les compagnies de tabac ont subi les conséquences de leurs tactiques, pourquoi Mark Zuckerberg devrait-il être épargné?
Des études (comme celle-ci, celle-ci et celle-là) ont prouvé que Facebook créait une réelle dépendance auprès de ses utilisateurs. Une controverse avait même éclaté lorsqu’on a appris que le géant jouait intentionnellement avec l’état d’âme de ses utilisateurs en manipulant le contenu de leurs fils d’actualités. Les initiatives de la plateforme de Mark Zuckerberg se multiplient pour inciter l’internaute à ne jamais quitter le site web.
Non seulement la plateforme se développe-t-elle sur les téléphones intelligents pour permettre les conversations privées, mais le réseau va éventuellement implanter « Facebook at work », ce qui permettra à des employés connectés de partager des documents et de collaborer dans des contextes professionnels sur Facebook : si pratique et donc, impossible d’y échapper.
Les compagnies de tabac ont connu une époque marquante lorsque celles-ci se sont présentées devant des commissions d’enquête, tandis que les preuves s’accumulaient de l’utilisation intentionnelle et secrète de produits toxiques qui créaient explicitement des dépendances. Depuis, les cigarettes sont toujours en vente, mais une stigmatisation commerciale force les compagnies à présenter les effets nocifs d’une dépendance aux cigarettes à leurs clients.
Facebook a changé nos vies de façon plutôt drastique : de nos façons de communiquer, à la manière dont on peut réfléchir, en passant par la façon dont on consomme l’information. Les changements sont bouleversants et nous en découvrirons probablement des effets secondaires pendant encore bien longtemps.
Facebook ne sera probablement jamais responsabilisé pour ses plus grands méfaits, à savoir le partage de données privées récoltées en temps réel auprès de ses milliards d’utilisateurs au profit de corporations curieuses de nos habitudes de consommation et d’entités politiques désireuses de connaître nos informations personnelles. Cette invasion connue et documentée de nos vies privées ne sera probablement jamais punie considérant la force des alliés stratégiques qu’elle inspire.
Ceci dit, n’est-il pas possible de responsabiliser Facebook pour ses effets néfastes sur la psychologie de ses utilisateurs? Il serait peut-être tentant d’en responsabiliser uniquement l’utilisateur, mais en cas de dépendance, n’est-il pas possible de jeter une partie du blâme sur le fournisseur de la substance aussi virtuelle et insaisissable fut-elle?
L’idée, évidemment, n’est pas de tuer le géant. Celui-ci est trop gros et trop important, socialement, politiquement et économiquement, pour le faire tomber d’un coup. Ceci dit, bien que l’on sache qu’une certaine dépendance est créée, elle n’a pas la même charge émotive qu’inspirent les dépendances plus traditionnelles, soit à l’alcool, au tabac, au jeu ou à certaines drogues dures. Les conséquences sociales de ces dernières semblent évidentes, mais s’en éloigne-t-on vraiment quand il s’agit d’une dépendance à des réseaux sociaux?
Facebook nous incite-il à mentir, ou, disons, à présenter des vérités altérées à nos proches? Passons-nous un temps considérable sur la plateforme? Est-ce que celle-ci a déjà nui aux relations amoureuses, familiales ou amicales de ses utilisateurs? Sentons-nous un certain manque lorsque nous en sommes privés? Y avons-nous recours pendant que nous conduisons? Les listes des symptômes de dépendance retrouvés sur différents sites (comme l’ACRDQ, le Ministère de la santé et des services sociaux du Québec, Medical News Today, Psychology Today ou le NCADD) peuvent rapidement nous rappeler certaines attitudes que nous avons envers Facebook.
Tandis que les casinos, les loteries et les compagnies qui vendent de l’alcool ou du tabac sont forcées d’indiquer à leurs clients que leur produit peut nuire à la santé physique ou mentale des consommateurs, aucune mesure dissuasive n’a été imposée à Facebook pour alerter et conscientiser ses utilisateurs. Mais maintenant que les effets néfastes sont prouvés, n’est-il pas temps d’agir?
Inb4 : À ceux qui noteront la potentielle ironie de voir un tel article être partagé sur Facebook, trouveront-ils qu’il est si bizarre de parler de dépendance au tabac pendant une pause cigarette? La première étape, dit-on…
Très bien pensé et présenté.
Merci.
Super de faire sortir ce coté de Facebook. Personnellement je suis straight edge avec tous les Facebook et twitter. J’ai vu, j’ai participé, je me suis rendu compte du monde d’imbécilité dans lequel je me retrouvais et j’ai tout fermé. Je m’en porte à merveille. Et suite à la lecture de votre article je me sens encore mieux dans ma position.
Bonne Réflexion !
Facebook, c’est un «pas-touche-à-ça». Ni même s’en approcher avec une très longue perche. Je l’ai déjà écrit ici et aussi ailleurs, et dit de vive-voix autour de moi.
Aller se livrer pieds et poings liés à l’Inconnu, déballer publiquement ce qui devrait toujours demeurer très personnel et privé pour sa propre protection, c’est non seulement jouer avec le feu mais avoir la certitude de se brûler tôt ou tard.
Au mieux, Facebook pourra servir à… hum… servir à… je-ne-sais-trop… peut-être servir à quelque chose. Servir à quoi, voilà qui reste donc à déterminer. Pour le cas où Facebook pourrait effectivement servir à quelque chose de positif et d’utile.
Et puis, non je ne suis pas un vieux grincheux en y allant de pareil commentaire. Je ne fais qu’exprimer ce qui me paraît absolument évident. On ne se jette pas à son tour en bas du pont parce que son voisin a quant à lui décidé de sauter…
(À l’école, ne met-on pas en garde les jeunes contre la témérité et le danger de certaines actions? Et pour les moins jeunes, existe-t-il des garde-fous susceptibles de restreindre les élans irréfléchis? Ne serait-ce que quelque chose qui sèmerait un petit doute? Car, dans le doute vaut mieux s’abstenir, paraît-il…)