Desjardins

La tête dans le sable

C'est une histoire de triche.Assez bonne pour que, le 21 mars dernier, le journal étudiant Impact Campus choisisse d'y consacrer sa une, plusieurs articles et une chronique.

C'est une histoire de triche, disais-je, et c'est gros. Presque trop gros.

En fait, il s'agit d'une affaire d'allégation de plagiat massif à la Faculté de pharmacie de l'Université Laval. Le traitement qu'en fait le journal est un brin sensationnaliste, de l'aveu même du rédacteur en chef (tel qu'il est cité dans L'Exemplaire, l'hebdo des étudiants en journalisme), mais – et là c'est moi qui parle -, dans l'ensemble, c'est du beau travail journalistique.

D'abord, il y a la lettre de dénonciation à l'origine de toute l'histoire, transmise sous le couvert de l'anonymat par un étudiant de la faculté (dont le nom n'a pas été dévoilé, mais qui a tout de même été joint par les journalistes, histoire de vérifier son identité), qui l'avait aussi fait parvenir à l'Ordre des pharmaciens du Québec. C'est suivi du rappel d'une monumentale histoire de plagiat au même département il y a quelques années. Puis il y a des répliques de l'association étudiante, de la doyenne, de l'Ordre, de l'université, et tout le tremblement. Un truc dans les règles de l'art, quoi.

Sauf que les réponses molles et la désagréable apparence de collusion entre certains intervenants en cause ont agacé le chroniqueur Antoine Goutier, qui souligne dans son papier que, bien qu'il ne faille pas crier au scandale tout de suite, l'attitude de la doyenne et de l'association étudiante jettent une aura de mystère sur l'affaire, la rendant encore plus louche.

Moins nuancée, sa conclusion est toutefois aussi savoureuse que tranchante: "Ainsi, lorsque j'irai dans une pharmacie, je demanderai d'où vient le diplôme du pharmacien. S'il vient de Laval, je changerai de pharmacie, juste au cas où…"

Cela vaudra au journal une plainte officielle déposée devant le Conseil de presse. Rien que ça.

Le plus agaçant dans cette histoire? C'est la fermeté que dénonce Goutier concernant la position de la doyenne qui, dans un document envoyé aux étudiants, déclare: "Les étudiant/es de la faculté, nos étudiant/es, sont honnêtes, fiers, travaillants et méritent entièrement les notes qu'ils obtiennent dans le cadre d'un programme très difficile."

TOUS les étudiants sont honnêtes? Sans exception, aucune? Tous et toutes des saints? Faut-il lui rappeler les récents scandales dans son milieu concernant les "cadeaux" offerts aux pharmaciens par les entreprises pharmaceutiques? Tout ce beau monde est sans doute aussi parfaitement honnête, je suppose? Faut-il lui souligner que, dans les circonstances, et puisque le respect du code d'éthique dans sa profession est déjà mis en doute, on s'attendrait à un resserrement de la vigilance de sa part, histoire de donner le ton, et non à une défense aveugle visant à sauvegarder l'image de la faculté?

Comme le hasard fait parfois bien les choses, une nouvelle paraissait dans les journaux lundi dernier. Cela concerne les statistiques sur le plagiat dans les universités francophones. On les compare à celles des universités anglophones, dont les résultats paraissent monstrueusement disproportionnés. Comment cela est-il possible? De l'avis de plusieurs experts interrogés, les universités francophones se mettent simplement la tête dans le sable lorsqu'il s'agit de plagiat. Les règles sont là, mais la volonté d'y mettre un terme n'y est pas.

Et vlan, Madame la doyenne! Ce que vous reprochent justement ces journalistes en herbe qui ont fichtrement bien fait leur boulot, ce n'est pas que vous défendiez votre faculté, mais que vous écartiez jusqu'à la possibilité d'un problème. Dans ce document envoyé aux étudiants – posté par la présidente de l'association étudiante, mais signé par vous-même, ce que je sais puisque j'en ai une copie -, vous jouez à la bonne maman qui refuse de croire que fiston a pu casser la gueule du voisin, sans même prendre le temps de faire enquête.

Pire, sans même donner l'impression qu'il y aura enquête.

Mais plus grave encore, vous y invitez vos étudiants à se plaindre auprès des journalistes qui signent ces papiers, et les prévenez que ceux-là pourraient les contacter pour leur poser d'autres questions, leur dictant implicitement, que vous le vouliez ou non, une règle de conduite à respecter: celle de l'affrontement.

Et vous souhaitez traîner ce journal devant le Conseil de presse? Et vous accusez son chroniqueur de diffamation?

Vous exagérez. Ce n'est quand même pas comme s'il vous avait traité d'autruche. Alors que moi, Madame, je n'hésite pas une seule seconde.

ooo

Déjà beaucoup de réponses à ma demande de la semaine dernière sur vos livres préférés, et bien que je n'y compte plus les mentions de romans historiques (soupir!), je n'ai pas vu un seul Paulo Coelho, ce qui est plutôt encourageant. Encore quelques jours pour me faire parvenir vos titres accompagnés de commentaires en réagissant à cet article ou par courriel à [email protected].

Aussi, certains ont manifesté une touchante inquiétude après avoir lu ma dernière chronique. Les plus alarmistes se sont même demandé si j'avais sombré dans l'enfer de la drogue. Rassurez-vous, c'est plutôt le contraire: j'avais arrêté. Mais je m'y remets bientôt, promis. C'est que pour l'instant, j'hésite. La coke, c'est surtout bon pour les péquistes, le pot, ça fait trop Lucien Francoeur, et l'acide, un peu trop Iron Butterfly. Me reste pu grand choix. Crack ou crystal meth? Attendez, je demande à mon pharmacien.