Entre guillemets

Passe-message

Il n’y a pas si longtemps – une semaine en fait – se tenait la neuvième soirée Arts Excellence à la champêtre Maison de la culture Francis-Brisson du secteur Grand-Mère. Une soirée qui, à l'inverse de son slogan La culture s’étale, ne s’est pas trop étirée dans le temps, mais qui a su mettre en lumière l’étendue du talent des acteurs culturels de la Mauricie.
C’est dommage cependant qu’un tel événement soit réservé à un cercle d’initiés – ce qui est tout à fait justifié en raison des coûts. Car plus qu’un moment où l’on se donne des tapes dans le dos, il devient parfois une intéressante tribune pour ceux qui espèrent davantage pour la culture en région, pour ceux qui se battent de manière quotidienne pour sa «survie».
Oui, il arrive encore, à mon grand désarroi, qu’on voie la culture comme quelque chose d’accessoire, un luxe presque. Devant un budget déficitaire ou en déséquilibre, on choisit souvent de lui arranger le portrait; on lui fait une belle coupe rase. Or, comme l’a signalé la mairesse de Shawinigan, Lise Landry – j’avoue sincèrement avoir eu quelques frissons de fierté en écoutant son discours -, la culture est l’âme et l’identité d’une ville; par conséquent, il ne faut jamais charcuter son financement. Il s’avère effectivement assez difficile de s’imaginer sans âme. Et quand on réussit, l’image est horrible: de vrais zombies! Déjà que le Québec éprouve un mal identitaire, il ne faudrait pas empirer le problème!

SORTIR DE L’OMBRE
Mais l’intervention que je voulais sortir de l’ombre est celle du comédien Patrick Lacombe, gagnant du Prix de création en arts de la scène. Sous les projecteurs, il a fait les remerciements d’usage, puis, à mon grand plaisir, a souligné les efforts d’un gars qui, bien qu’il bosse dans un sous-sol, réalise un travail fou pour la culture locale: Stéphane Bélanger. Ce comédien et metteur en scène entretient dans le sous-sol de l’église Notre-Dame-des-Sept-Allégresses à Trois-Rivières, et ce sans aucune aide financière, un minuscule théâtre de 20 places, le Studio Théâtre. Ne comptant que sur sa passion, il reprend la mission accomplie pendant tant d’années par Jacques Crête avec L’Eskabel: offrir un lieu de diffusion en marge où il est possible d’expérimenter, de sortir des sentiers battus. Un créneau difficile – il est clair qu’on ne fait pas salle comble tous les soirs lorsqu’on endosse cette mission! -, mais combien nécessaire. Par exemple, deux des productions théâtrales en nomination lors de la soirée Arts Excellence avaient été présentées dans ce lieu.
Petit incubateur culturel, le Studio Théâtre permet par ailleurs à des artistes de présenter leurs créations sans s’encombrer d’une structure administrative, de tout simplement essayer sans craindre de s’étrangler par la suite avec un déficit. N’est-ce pas merveilleux? Mais un homme seul, aussi enthousiaste soit-il, ne peut porter un théâtre pendant des années sur ses épaules. D’où l’importance que le milieu s’implique. Certes, la manière importe, mais celui-ci doit réussir à rendre le défi plus réaliste. Toute la communauté culturelle en sera gagnante. Comme le clamait M. Lacombe, il n’y aura jamais assez de lieux de diffusion!