Je n'ai jamais connu mon grand-père paternel; il est décédé deux mois avant ma naissance. Pourtant, par l'intermédiaire de mon père, il m'a légué quelque chose de précieux: un intérêt pour la politique et le devoir d'exprimer mes opinions en me servant adéquatement de mon droit de vote. Car quoi qu'on en dise, une simple croix sur un bout de papier donne beaucoup de pouvoir. Elle sert de point de départ pour amorcer un changement ou pour, au contraire, conserver une situation que l'on trouve correcte. En fait, cette marque demeure sans doute le signe le plus visible de notre liberté de penser et de faire des choix, bref de la démocratie.
Alors, quand j'entends que les jeunes décrochent de plus en plus de la politique, ça sème en moi beaucoup d'inquiétude, bien que ça ne m'étonne pas. Avec tous les scandales qui éclaboussent la profession politique, il est parfois difficile de voir ses bons coups. Mais malgré la mauvaise presse autour d'elle, j'espère toujours que les jeunes générations n'en viendront pas à s'en foutre carrément, qu'elles ne finiront pas par se taire sur les grands enjeux nationaux, voire planétaires. Car ne pas voter, c'est demeurer silencieux à propos de tout ce qui nous touche (santé, environnement, transport, économie, services sociaux…), c'est donner un chèque en blanc à un inconnu pour qu'il décide de «notre» avenir. Ce qui n'a rien de rassurant…
Pop démocratie
Vous me croirez donc quand je vous dirai que la nouvelle exposition du Musée québécois de culture populaire, Vox Populi, m'a particulièrement emballée. Juste pour le coup d'oil – un décor qui rappelle la Grèce antique -, ça vaut le détour.
Cette expo itinérante du Musée de la civilisation de Québec retrace les grandes lignes de l'histoire de la démocratie: Socrate, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, l'esclavagisme au Québec, Martin Luther King, la Paix des braves, la place des femmes… Avec des sujets si peu «sexy», il aurait été facile de flirter avec l'ennui. Or, Vox Populi n'a rien d'assommant. C'est même tout le contraire. Présenté dans un enrobage dynamique et actuel, son contenu se savoure comme un chocolat surprise. Écrans tactiles, artefacts, courtes vidéos, capsules informatives, trames sonores stimulent notre désir d'apprendre, et de comprendre… Car l'objectif de l'exposition ne se résume pas à donner de l'information. Non, Vox Populi cherche également à amorcer, si cela n'est pas déjà fait, une réflexion sur l'importance de la démocratie dans l'évolution de nos sociétés. En raison des effets pervers engendrés par la mondialisation et la course au profit, n'est-il pas impératif de la protéger?
Une chanson qui dérange
Tout ça me fait penser à un texte de Chansons dociles, le plus récent album d'Yves Desrosiers, qui illustre bien l'antidémocratie: Le Déporté. Cette pièce raconte l'histoire d'un vieux paysan qu'on exproprie pour des raisons économiques. On l'arrache à sa terre, à la maison qu'il a construite de ses mains, sans aucun dédommagement. Pire, on envoie ses enfants à la guerre. «Et le poète arriva criant tout haut cette injustice / Les militaires l'arrêtèrent / Et il fut pendu sur la place publique.» La chanson ne situe pas ces atrocités, mais une chose est certaine, ça ne se passe pas ici. Ça ne se passe pas ici parce qu'ici, on défend toujours les valeurs de liberté, d'égalité, de justice, de parole et de démocratie. D'où l'importance de protéger et de poursuivre le travail effectué par nos prédécesseurs pour un monde meilleur.
Photo: Vox Populi.