Entre guillemets

Un bon coup de pied…

Je ne vous apprends sûrement rien en vous disant qu'il devient de plus en plus ardu pour un artisan de la chanson de tirer son épingle du jeu. Avec Internet et l'accessibilité aux nouvelles technologies, l'offre musicale croît sans cesse. Aujourd'hui, un musicien ne se «mesure» plus seulement aux artistes de la région, de la province ou de la francophonie, mais à ceux de la planète entière – ayoye, ça fait pas mal de monde. À ce compte-là, un créateur a autant de chances de se faire connaître du grand public que de gagner un montant substantiel à la loterie! Je comprends donc que certains s'essoufflent au bout de quelques années… Car dans cette sphère, le talent seul n'est pas garant de la réussite. En fait, il faut souvent beaucoup plus que ça: avoir le sens du timing, savoir choisir ses batailles, s'armer de patience, cultiver les bons contacts ou… réussir à se distinguer de façon originale.

Ça, Dany Carpentier, fondateur du Festival urbain de Trois-Rivières mais aussi rappeur (alias Naïd), semble l'avoir compris. Estimant «qu'on n'a pas toute la vie pour montrer qui on est», celui qui a remporté le prix Coup de cour du jury lors de la plus récente édition d'UQTR en spectacle a décidé de se donner un ultimatum pour (enfin) réaliser un projet qui lui est cher: décrocher un contrat de disque. Il se laisse huit mois, soit jusqu'au 18 novembre prochain, pour atteindre son objectif.

Jusque-là, «l'ultimatum» de Carpentier semble un projet comme un autre. Mais le Trifluvien pousse l'idée d'un cran: chaque semaine sur le site www.lultimatum.com, il diffusera une vidéo dans laquelle il expliquera comment il procède pour se faire connaître. Il profitera également de cette tribune pour présenter ses chansons engagées et sa slam poésie.

Bon, je ne sais pas jusqu'à quel point cette idée fera du bruit. Seul l'avenir nous le dira. N'empêche que je trouve que c'est un excellent coup de marketing – être artiste, c'est avant tout gérer une business; on l'oublie trop souvent. Si les émissions de téléréalité ont du succès, je vois mal comment cette initiative pourrait échouer, du moins si le rappeur conserve une constante rigueur. Car une fois au courant de l'existence du site, admettez qu'on résiste difficilement à la curiosité de savoir comment se déroule l'aventure. Notre petit côté voyeur…

 

À nu

En tout cas, le projet de Dany Carpentier ne manque pas d'audace. Peu de gens accepteraient de relever un tel défi sur la place publique. Car si on espère un dénouement heureux à ce périple, le parcours qu'empruntera le rappeur sera assurément truffé d'embûches. Il essuiera des refus, attendra des réponses qui ne viendront jamais… Ainsi, l'ultimatum, en plus de servir d'outil de promotion, risque de devenir un intéressant document sur «l'accession» d'un jeune musicien, sur le chemin long et difficile que doivent emprunter la plupart des artistes en émergence avant de lancer un disque sur une étiquette connue.