Entre guillemets

Le Moulin de mon cour

Je ne suis pas un modèle de consommatrice responsable, du moins pour l'utilisation de ma voiture. Je roule beaucoup, et souvent seule. Travail oblige. Alors, quand je peux offrir une courte pause à mon émettrice de gaz à effet de serre préférée, je le fais. Pour l'environnement, mais aussi pour moi – ça devient fatigant de voir le monde à travers un rétroviseur! Mais il y a des offres qu'on peut difficilement refuser, et ce même si l'on doit se taper plus d'une centaine de kilomètres d'asphalte, des offres qui nous invitent à mettre de côté notre fatigue et tous nos beaux principes écologiques du week-end. Je pense ici à une invitation pour un spectacle de Paul Cargnello au Moulin Michel de Gentilly.

Le Moulin Michel, vous connaissez? C'est un superbe monument historique, un moulin seigneurial construit à la fin du 18e siècle.  J'ai toujours eu un petit faible pour cette salle de spectacle qui semble exister en dehors du temps. Imaginez, vous roulez sur la 132 en direction de Québec, puis au moment où vous pensez avoir passé tout droit – devant vous il n'y a que des champs -, apparaît une pancarte bleue de signalisation touristique: ça y est, vous êtes arrivé. Vous garez votre auto. Il n'y a pas un son ou presque. Seule une petite rivière roucoule à quelques mètres de vous. Vous grimpez lentement – à moins d'être vachement en retard, on savoure toujours cet instant – une légère pente et vous voilà dans l'antre du Moulin. Là, tout est en bois et en pierre. Ça craque, ça grince et ça sent bon! Quand le temps se veut plus frisquet, un feu brûle dans la cheminée. La salle de spectacle se trouve au deuxième étage. Pareille au rez-de-chaussée, elle a conservé son cachet ancestral, avec ses grandes poutres et ses murs de pierre. La scène est tout près – le Moulin peut recevoir un maximum de 120 personnes -, la frontière entre le public et l'artiste est quasi inexistante. D'ailleurs, je me demande si les spectateurs assis dans la première rangée entendent parfois les battements de cour des musiciens. En tout cas, chaque fois, j'ai l'impression de participer à une belle fête de famille; je retrouve cette même magie qui existait pendant les belles années de la feue Pierre angulaire de Saint-Élie-de-Caxton. Avis aux nostalgiques!

 

La relève?

Oui, un beau rassemblement couru par de fidèles clients – ça fait sept ans que je vais de temps à autre au Moulin et, chaque fois, j'y retrouve des visages familiers -, mais ignoré par les plus jeunes. Croyez-moi ou non, mais pour le spectacle de Paul Cargnello (qui, soit dit en passant, était excellent), le spectateur moyen devait avoir autour de 50 ans! Ce phénomène n'est pas propre au Moulin Michel; j'ai souvent fait ce constat dans plusieurs lieux de diffusion de la région. Mais coudon, où sont les jeunes? À la maison, en train d'écouter un match de hockey ou de peaufiner leur profil sur Facebook? En tout cas, ils sont partout sauf assis devant une scène! Il y a des jours où je trouve ça inquiétant. J'ose espérer que les salles de spectacle ne deviendront pas les églises de demain, soit des lieux infréquentés et… à vendre!