Entre guillemets

Savoir remettre à demain

Le Festival international Danse Encore s'est achevé sur une note très positive. Il semble en effet que tout le monde soit reparti chez lui avec le sourire: les médias, le public et même les organisateurs! Je ne fais pas exception à la règle. Cette 14e édition m'a laissé un excellent souvenir. La performance de la compagnie de Vancouver Kidd Pivot continue d'ailleurs de me hanter. Même après plusieurs jours, je poursuis ma réflexion sur les trois mouvements qu'elle a présentés à la Maison de la culture de Trois-Rivières.

C'est fou, mais je viens de constater qu'on n'assiste pas à un spectacle de danse comme à un show de musique ou à une pièce de théâtre. Pour apprécier l'art du mouvement, il faut accepter de s'ouvrir, d'être déstabilisé, voire de ne pas tout comprendre. En fait, il faut se mettre dans le même état d'esprit que lorsqu'on va visiter une exposition; c'est clair qu'on n'aimera pas l'ensemble, mais certaines ouvres nous toucheront pour une raison ou pour une autre. En ce qui concerne Kidd Pivot, je m'attendais à tout et à rien. J'avais entendu énormément de commentaires positifs à son égard – la compagnie a remporté de nombreux prix. Mais je n'en savais pas davantage; je ne l'avais jamais vue en spectacle. Je ne connaissais donc ni le sujet de prédilection de sa chorégraphe Crystal Pite ni ce qu'elle tentait d'exprimer par son travail. Et honnêtement, je m'en foutais un peu. J'avais juste envie de plonger dans son univers sans trop me poser de questions, sans m'imposer une lecture. D'ailleurs, ce que j'ai décodé à travers son langage chorégraphique me suffit amplement: j'en ai pour des semaines, peut-être des années à ruminer tout cela dans ma tête. J'ai trouvé que le travail de Crystal Pite illustrait de façon éloquente comment l'homme se dénature. Il veut être tout à la fois: homme, reptile, insecte, animal, machine. Il pose donc des gestes qu'il ne devrait pas poser. Conséquence: le monde s'écroule.

 

Le pouvoir d'une ouvre

C'est curieux, à la fin de la prestation de Kidd Pivot, j'étais charmée par la qualité d'interprétation de ses danseurs et les images que j'avais vues à travers les différents tableaux. Cependant, si quelqu'un m'avait demandé ce que signifiaient les trois ouvres présentées, j'aurais répondu bêtement: «Je ne sais pas.» Comme une photo qui se révèle doucement, ce n'est que rendue à la maison que j'ai commencé à mettre des mots sur ce que j'avais vu. On aurait dit que mon inconscient avait besoin d'une petite pause digestion. Comme quoi une ouvre, voire un art demande parfois un peu de temps pour être apprivoisé. Avis aux adeptes du «ici, maintenant» ou du tout mâchouillé d'avance!