Entre guillemets

Revenir chez soi

En partant pour mon congé de maternité, j'avais fait la promesse intérieure de ne pas utiliser le mot bébé dans ma chronique de retour. Je voulais à tout prix éviter de tomber dans le gnangnan. À cette époque, bien que mon fils s'agitait soir et matin dans mon ventre tendu, je ne savais pas encore ce que ça signifiait, devenir maman. Non, je n'avais aucune idée de comment ce petit bout de chair allait chambouler ma vie et ma vision de celle-ci. Je ne connaissais rien aux nuits blanches, à l'inquiétude engendrée par un simple rhume, à l'instinct démesuré de protection, à la nécessité de vivre l'instant présent, à ces choses anodines qui deviennent de grands moments, à l'amour inconditionnel. J'étais d'ailleurs loin de me douter que l'arrivée de mon bonhomme irait jusqu'à modifier mes priorités. «Et si je devenais mère au foyer, est-ce que ça te dérangerait?» me suis-je surprise à demander un jour à mon chum. Une question qui doit brûler les lèvres de plusieurs nouvelles mamans. J'avais tellement peur de ne pas voir grandir mon garçon.

Mais comme dans la plupart des histoires, un déclic s'est produit et mon désir de réintégrer le marché de l'emploi s'est rapidement mis à grandir. Pour moi, ça a été une entrevue avec Fred Pellerin à la radio de Radio-Canada un midi où je m'apprêtais à partir en randonnée. Une saison dans la vie de Fred Pellerin, je crois. Celui-ci y racontait à chaud et avec passion son périple en France. Il parlait de son succès inopiné, de sa famille, de la langue française, de cette France qui se désintéresse du sort du Québec, village gaulois au cour d'une mer d'anglophones. Assise dans ma voiture, j'hésitais à rompre le contact tellement j'étais captivée par ses propos. Tout était dit avec tant d'honnêteté, sans filtre d'usage. L'homme s'offrait dans sa plus grande simplicité. Ce jour-là, je me suis rappelé comment il était agréable et fascinant d'avoir accès à l'esprit d'un créateur, comment le métier de journaliste culturel était enrichissant. J'ai alors pensé aux artistes et institutions culturelles d'ici: oui, j'aurais beaucoup de plaisir à les retrouver! Ça me faisait d'ailleurs sourire d'imaginer toutes les belles histoires que j'aurais à raconter à mon petit bonhomme. Curieusement, il n'en fallait pas plus pour dire adieu au blues du retour. Merci Fred.

 

1, 2, 3…

C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme et un oil nouveau que je reprends la barre de ce journal. Le mandat, lui, reste toujours le même: faire état du foisonnement culturel de la région. Aussi, j'aimerais adresser un second merci à Kevin Laforest, mon remplaçant, qui a gardé le fort au cours de la dernière année. Je crois que le milieu culturel mauricien ne pouvait être mieux servi.

Voilà, à partir d'aujourd'hui, je plonge, le cour léger. Tout léger.