Vendre son âme
Je ne crois pas me tromper en disant que nous avons tous, à un moment donné, rêvé de nous glisser dans la peau de quelqu'un d'autre. Soit par simple curiosité de visiter une existence différente de la nôtre, soit pour réussir à nous débarrasser d'un boulet pesant trop lourd dans notre vie. Des tonnes d'autres motivations sont probablement à la base d'un tel désir, mais là n'est pas le sujet de ma chronique. En fait, comment réagiriez-vous si vous appreniez qu'un médecin extrait et entrepose les âmes?
Je vous le dis tout de suite: un tel spécialiste n'existe pas, du moins pas dans le monde réel. Mais dans Cold Souls (La Banque des âmes), un film de Sophie Barthes mettant en vedette l'attachant Paul Giamatti (Cinderella Man) et Emily Watson (Hilary and Jackie), il fait le bonheur, mais surtout le malheur, de ceux qui osent le consulter. Nous suivons d'ailleurs le douloureux pèlerinage de Paul Giamatti, qui joue son propre rôle, à travers cette aventure. Incapable, pendant les répétitions, de donner le souffle qu'il voudrait au personnage qu'il incarne dans la pièce Oncle Vania de Tchekhov, l'acteur américain décide de subir l'intervention et de se départir de son âme. Libéré du poids de cette dernière, peut-être réussira-t-il enfin à jouer juste pour le soir de la première?
Pas de chance, une fois l'opération complétée, Giamatti ne ressent pas la légèreté escomptée. Pire, il perçoit un vide à l'intérieur de lui, ne se sent plus tout à fait lui-même. Inconfortable dans cette nouvelle situation, il cherche alors à récupérer son âme. Malheureusement pour lui, elle ne se trouve plus à l'endroit où elle devait être entreposée… On lui propose donc d'en choisir une autre parmi l'inventaire du cabinet. Son choix se porte sur l'âme d'un (ou d'une) poète russe. Cependant, l'homme comprend vite que sa vie ne reprendra son cours normal que le jour où il retrouvera son âme, et ce, avec ses zones d'ombre et de lumière.
La part de mystère
Il y a quelque temps que je voulais voir ce film (en DVD). Je m'attendais à un petit divertissement, sans plus. J'admets que Cold Souls, aussi imaginatif soit-il, n'a rien d'un chef-d'ouvre, mais son propos invite à la réflexion. Cette comédie de science-fiction nous fait réaliser que chaque vie comporte son lot de souffrances, de désirs inassouvis, de bonheurs. Non, le pré n'est pas plus vert chez le voisin! D'ailleurs, quand on y pense, c'est curieux d'avoir parfois envie de voyager plus léger, sans certains souvenirs. Car les événements qui ont marqué notre existence, qu'ils soient agréables ou douloureux, sont en quelque sorte nos racines, la base de notre identité. À partir du moment où ils disparaissent de notre mémoire, ils amputent la personne que nous sommes.