Entre guillemets

Le rideau tombe

 

Eclyps, la mégaproduction estivale de la Cité de l'énergie, vient de tirer sa révérence. Pour l'été ou l'éternité? Seul l'avenir nous le dira. Mais une chose est sûre, si le gouvernement ne donne pas un coup de pouce financier supplémentaire, le spectacle écrit et mis en scène par Bryan Perro connaîtra assurément le même sort que AO, la fantastique légende à Drummondville – on se souviendra que la production avait dû annuler ses représentations au beau milieu de l'été afin d'éviter un gouffre financier -, a signalé le directeur général de la Cité de l'énergie, Robert Trudel, dans une entrevue accordée au quotidien de la région.

Le peuple des Sélénites à jamais décimé… Quelle mauvaise nouvelle pour l'industrie touristique de la région! L'amphithéâtre shawiniganais a peut-être connu une saison en dents de scie en 2010, n'empêche qu'il a quand même attiré près de 19 000 spectateurs. Soit deux dizaines de milliers de personnes qui ont peut-être aussi dépensé plusieurs dollars pour se loger, manger ou se désaltérer. Du coup, imaginez les retombées économiques perdues pour les commerces des alentours.

 

L'avocat du diable

Autant je souhaite que perdure l'aventure Eclyps, autant je me demande pourquoi injecter de l'argent dans un projet qui bat de l'aile. Si le nombre de spectateurs diminue un peu plus chaque année, c'est peut-être que la formule intéresse de moins en moins, que la production a déjà atteint l'âge de la retraite. Robert Trudel montre du doigt les grands événements des principaux centres urbains québécois qui, soutenus par les différents paliers gouvernementaux, offrent une panoplie d'activités gratuites à la population et drainent ainsi une partie de sa clientèle.

Je suis d'accord pour dire que la gratuité peut orienter certains de nos choix lorsque vient le temps de planifier nos vacances estivales. Surtout quand on vit encore les contrecoups de la crise financière ou qu'on élève une famille nombreuse. Mais de là à dire que ce «libre accès» est responsable du manque d'intérêt de la population pour un spectacle comme Eclyps

Je me rappelle d'ailleurs avoir un jour interviewé Robert Charlebois qui, malgré une période économique difficile, trimbalait partout à travers la province un spectacle qui regroupait pas moins de 20 (!) musiciens sur scène. Devant mon étonnement, il m'avait alors expliqué que seuls les artistes qui en donnaient beaucoup survivraient à la crise: «Quelqu'un qui est en train de perdre sa maison, je ne pense pas qu'il a envie d'aller s'acheter du chocolat ou des disques. Mais d'un autre côté, vu qu'on est dans le business de l'évasion et que les gens auront beaucoup envie de se changer les idées, ils vont choisir, être plus sélectifs. Ils vont aller voir des shows qui offrent quelque chose d'un peu exceptionnel.» Un point de vue que je partage.

Ainsi, si jamais le spectacle Eclyps obtient l'aide souhaitée, il faudrait peut-être se questionner sur la façon de le rendre encore plus grandiose.