Grandes gueules

Tremblez, monsieur Tremblay!

Vous nous avez fait miroiter des cieux meilleurs pour la "chose" culturelle dans la nouvelle ville de Montréal que vous administrez désormais. En l’occurrence, soyons direct: une augmentation des budgets – gelés depuis 10 ans! – du Conseil des arts de Montréal (ex-CACUM, communément dénommé CAM depuis la "fusion") au moment de votre campagne électorale. Vous avez rappelé cette promesse, tonitruant au micro, lors de la remise annuelle du Grand Prix du Conseil à l’hôtel Reine Elizabeth, le 20 mars dernier. L’assistance, composée d’au moins 500 personnes représentant tout le milieu culturel montréalais, vous a applaudi vigoureusement: OUI! effectivement, vous alliez dans le sens du poil… Le Conseil des arts de Montréal a le mandat, depuis 1956, de soutenir financièrement les organismes culturels professionnels. Respecté dans la communauté culturelle, il a su s’adapter aux nouvelles pratiques, à l’émergence de festivals ou événements en les accompagnant dans leur développement. Des comités sectoriels constitués de pairs de notre communauté évaluent les demandes avec l’aide d’agents culturels expérimentés. C’est indéniable. Aujourd’hui, les besoins réels du CAM pour "satisfaire" sa "clientèle", c’est-à-dire la plupart des organismes, événements et festivals artistiques et culturels de l’île de Montréal (et de par là même les publics montréalais), seraient déjà de plus de 16 millions $. Vous avez promis 10 millions $, sans qu’aucune étude ne le justifie; un chiffre magique! Nous nous en contenterons. NON! pas d’enrichissement personnel possible, NON! pas d’argent du contribuable dilapidé à perte. Bien au contraire, et vous le savez. Nous parlons d’industrie culturelle, OUI! mais aussi de petites compagnies, de structures émergentes, de jeunes compagnies de danse ou de théâtre, de centres d’artistes autogérés, de programmes de tournée en théâtre et chanson, de programmes d’accompagnement et d’incitation à la lecture, etc., pour les francophones, les anglophones et les communautés culturelles. L’argent retourne au contribuable à travers des programmes d’accès à des expositions et à des spectacles gratuits, des programmes de soutien à la production d’oeuvres, de collaboration avec les maisons de la culture et les centres culturels sur tout le territoire de l’île. Et ce, depuis toujours puisque le Conseil dépendait préalablement de la Communauté urbaine de Montréal (CUM). Mettons qu’il a fait ses preuves…

M. Tremblay, vous avez convié tout le milieu culturel montréalais depuis un an autour de votre Sommet de Montréal. Nous en avons été particulièrement heureux: le droit de parole nous est cher! Enfin se sont révélées des priorités incessantes dans lesquelles se reconnaissent toutes les disciplines artistiques confondues, sans querelles de chapelle: Montréal considérée comme "métropole culturelle". La culture, elle, débute dans de petites compagnies, portée par de nouvelles générations, dans la formation de différents publics, d’âges variés; elle se véhicule partout. Vous nous avez consultés, nous avons répondu à l’appel. Oui, une politique culturelle de la Ville de Montréal est en train de se bâtir, sur papier; madame Helen Fotopoulos – responsable du dossier culturel auprès de vous – s’y attelle. Pour l’instant, nous l’accompagnons. Mais quid d’une politique culturelle sans nom!!! Pour la culture et pour Montréal, nous oeuvrons tous les jours en tant que bénévoles, stagiaires ou comme travailleurs culturels sous-rémunérés la plupart du temps. Nous la rendons accessible à de nouveaux publics toute l’année. Grâce aux subsides du CAM, entre autres. Mais ces deniers municipaux demeurent minimes (moins de 10 % en moyenne dans nos budgets de fonctionnement). Monsieur Tremblay, S.V.P., ne validez pas le travail de vos prédécesseurs. Ne soyez pas attentiste. La situation est alarmante. Montréal est la plaque tournante de la créativité au Québec, toutes les statistiques le confirment. Montréal attire actuellement plus que jamais la curiosité de nombreux touristes culturels et responsables de structures en provenance de partout dans le monde. Mais nos organismes vivent une crise de croissance. Vous avez créé des attentes avec vos annonces sans doute hâtives. Le CAM revendique autour de 5 % d’augmentation pour l’année 2003, soit un passage à 10 millions, tout rond. Cela ne suffira toujours pas à consolider nos structures mais ce sera un geste concret suivi d’une parole, au départ sans nul doute "clientéliste". Vous avez fait en sorte que le milieu culturel se mobilise, se concerte, s’entende sous une seule bannière (Culture Montréal et le Conseil de la culture de Montréal vont certainement fusionner prochainement): maintenant, nous vous attendons au tournant. Monsieur Tremblay, vous nous avez fait bûcher; maintenant, livrez la marchandise… La récolte ne sera que meilleure. Les activités des organismes, donc les artistes, créateurs et développeurs de projets, dépendent en partie de la contribution financière de la Ville. Monsieur Tremblay, sachez que nous demeurons vigilants et que nous saurons nous manifester.