Si notre nouveau premier ministre est un démocrate, il favorisera la démocratie. Pour favoriser la démocratie, il faut, par définition, redonner le pouvoir de décider aux citoyenNEs. Dans notre système politique, dit de démocratie représentative, le pouvoir est actuellement détenu par nos représentantEs. Notre nouveau premier ministre a un gros travail à faire pour redonner le pouvoir de décider directement aux citoyenNEs. Dans le cas du projet des défusions, une très belle occasion lui est offerte de démontrer ses talents de démocrate. Redonner le pouvoir au peuple, cela veut dire: favoriser le développement du pouvoir citoyen. Ceci, en fonction de ce qui point déjà à l’horizon, concernant un éventuel retour du pouvoir vers les arrondissements; il ne faudra surtout pas s’arrêter là, mais il faudra permettre aux conseils de quartier de se développer, pour ne pas dire de se créer dans la plupart des cas. Pour ce faire, il faudra prévoir beaucoup plus de flexibilité qu’il n’en existe actuellement dans la loi. Concrètement, cette flexibilité devra permettre aux conseils de quartier de naître à partir de territoires naturels d’appartenance. Ce qui exclut leur délimitation par des "faiseux de structures" qui travailleraient à partir de cartes géographiques sans avoir jamais mis les pieds et encore moins habité ces coins de pays réels. Le meilleur moyen de permettre le développement de ces conseils de quartier est de leur donner un pouvoir réel de décider et non pas seulement "la possibilité de se faire entendre" de façon exclusivement consultative dans le cadre de l’ordre du jour d’un lointain pouvoir central.
Un jour, il faudra bien passer du consultatif au décisionnel si on veut que l’implication citoyenne mène à quelque chose de réel. Ce sera alors le passage du citoyen "enfant pris en charge" au citoyen adulte. Pour combler les lacunes de la démocratie représentative (les taux croissants d’abstention en font foi), il y a la démocratie participative. Il faudrait avoir été bien sourd et aveugle depuis quelques années pour ne pas voir cette nouvelle façon de concevoir la démocratie émerger de plus en plus clairement dans nos sociétés du 21e siècle. Celle-ci est en construction à bien des endroits sur la planète. Le plus flamboyant exemple à l’échelle internationale est l’expérience du "budget participatif" vécu et mis en application depuis bientôt 15 ans à Porto Alegre, au Brésil. Mais la démocratie participative est aussi un phénomène bien de chez nous incarné, jusqu’à maintenant, surtout par le Collectif pour un Québec sans pauvreté, qui a recueilli environ 250 000 signatures en appui à une loi sur l’élimination de la pauvreté et qui a fortement contribué à la naissance de la loi 112, adoptée à l’unanimité par les députéEs et les partis présents à l’Assemblée nationale en décembre dernier. Cette loi devra bien avoir des suites avec l’élaboration d’un réel plan d’action incluant surtout du financement. Les attentes sont très grandes de la part de ces citoyenNEs qui y travaillent depuis de nombreuses années.
Dans l’éventualité où les défusions permettraient aux anciennes villes de renaître, à la suite d’un "deal" entre notre nouveau premier ministre et les ancienNEs "coqs de village", il s’agirait alors d’un recul sur les chemins de la démocratie. Ceci, même si seuls les arrondissements, très artificiellement créés dans certains cas, retrouvaient un certain pouvoir de décider; en outre, le recul sur le plan de la démocratie serait d’autant plus important qu’il pourrait se faire au détriment du pouvoir citoyen à l’échelle des quartiers où un réel sentiment d’appartenance existe et pourrait continuer de se développer. Ce sentiment d’appartenance est à la fois le ciment et le moteur de la démocratie véritable. Les citoyenNEs du monde ont encore touTEs leur sentiment d’appartenance à un quartier urbain ou à une municipalité rurale.
Si notre nouveau premier ministre est un démocrate, il proposera une loi qui favorise l’implication citoyenne en redonnant aux habitants des quartiers de nos grandes villes le pouvoir de décider de leur avenir immédiat en toute équité. Ce qui est très loin de la renaissance de privilèges pour une minorité d’électrices et d’électeurs au détriment d’une majorité de citoyenNEs. Les "grands pas en avant" que toutes les sociétés humaines ont réalisés ont tous été, dans un premier temps, une idée très utopique. Sauf qu’avant les "faits accomplis", de nombreuses personnes courageuses ont dû reprendre ces utopies et les mener à bon port.
Monsieur le premier ministre du Québec, voici votre chance de faire passer les intérêts démocratiques d’une majorité de citoyenNEs devant les intérêts plutôt égoïstes, et pour plusieurs opportunistes, d’un nombre limité de certainEs de vos supporteurs.