Je suis tombée sur l’avant-dernière édition de Voir, dans laquelle on rapporte les propos d’Isabelle Adjani, qui se fait l’émule de Brigitte Bardot en condamnant la chasse aux phoques au Canada. Je voudrais rappeler à tous ceux qui lisent ces lignes que le phoque est (ou était) la ressource principale des peuples autochtones du Nord québécois et des habitants anglophones et francophones des îles de la Madeleine. Cet animal fournit l’huile pour l’éclairage et le chauffage, la viande, la peau pour se couvrir, et que sais-je encore. Les colonies de phoques, nouvellement protégées, deviennent de plus en plus menaçantes pour tous les gens qui vivent de la mer. Les bancs de morues, déjà surpêchées, ne pourront probablement pas se reconstituer malgré l’interdit d’exploitation à Terre-Neuve et dans le golfe Saint-Laurent, parce que les phoques, qui pullulent aujourd’hui, causeront bientôt leur disparition. Beaucoup de pêcheurs et de plaisanciers sont en colère, et de simples citoyens comme moi le sont également. J’ai 24 ans et j’ai habité à Sainte-Anne-des-Monts, petite municipalité côtière située à 100 kilomètres au nord-est de Matane, durant plus de 18 ans. Jamais, avant l’an dernier, je n’avais vu de phoques sur les grèves. Depuis deux ans, ils sont légion, et je crois que ce n’est pas du tout normal. Ces mammifères se nourrissent de poissons, mais il n’y a plus de poissons dans le golfe. Chez nous, on dit la mer, parce qu’on ne peut pas apercevoir l’autre rive. J’ai accompagné un ami pêcheur en haute mer, à perte de vue il s’y trouvait des colonies de phoques, et je les ai vus, de mes yeux vus, attraper des mouettes posées sur l’eau et les manger. C’est d’ailleurs la raison de cette lettre. Je suis écologiste depuis ma plus tendre enfance, et loin de moi l’idée de défendre qui que ce soit ne respectant pas notre bien commun (l’est-il vraiment?). La forêt de ma terre natale s’est envolée en billets verts en l’espace de cinq ans. Qui sont ces Européens pour nous dire quoi ou qui protéger? Saviez-vous que ces zélés envoient des hélicoptères pour sauver des bébés phoques des glaces au printemps? Ces "écologistes" ne connaissent même pas la notion de sélection naturelle, ni celle des moyens de subsistance traditionnels. Si les phoques mangent les oiseaux, c’est parce que les Innus et les Madelinots ont été forcés d’arrêter de les chasser. Résultat: aujourd’hui, les phoques sont en surnombre et l’équilibre fragile de l’écosystème nordique est complètement foutu. Les autochtones deviennent dépendants de nos produits manufacturés pour se chauffer, manger et se vêtir. Alors, défenseurs québécois de l’environnement, ne tombez pas dans le panneau. C’est mignon, un bébé phoque, et c’est pourquoi les belles Françaises riches et célèbres se foutent des hermines et des coyotes.