Partout au Québec, des milliers de vertueux parents s'interrogent.<p>Voilà des années qu'ils s'efforcent de garder leurs enfants au large d'une carrière artistique. Lire <i>Harry Potter</i> constitue un loisir inoffensif – tant et aussi longtemps, du moins, que fiston n'ambitionne pas de rédiger un manuscrit. <p>Ah! Comment pourrait-on froidement laisser son enfant devenir compositeur, écrivain, danseur? Pire encore: poète! Non seulement le pauvre ange risquerait-il de crever la dalle, mais sans doute développerait-il une accoutumance à ces drogues dures et molles qui pullulent (comme chacun sait) au sein de la communauté artistique. <p>Les danseurs et les musiciens gobent des bêtabloquants. Les chanteurs pop déjeunent à la cocaïne. Les écrivains s'administrent divers stimulants et opiacés, sans oublier d'importantes quantités d'éthanol.<p>Pensez-y un peu: même les auteurs de roman jeunesse boivent du café!<p>Elle demeure bien vigoureuse cette idée que promouvait jadis l'abbé Béthléem dans son légendaire ouvrage <i>Romans à lire et romans à proscrire</i>: les mauvaises lectures font les mauvaises vies – et toute lecture est a priori suspecte.<p>Bref, à dessein de détourner leur progéniture de ces destins corrompus, plusieurs parents encouragent la pratique du sport. <p>Contrairement à la culture (qui n'engendre que le vice, la paresse et la myopie), le sport enseigne la discipline, l'effort, la saine compétition. L'athlète représente, davantage que quiconque – plombier, comptable ou professeur de géographie -, le bon exemple pour notre belle jeunesse.<p>Imaginez le profond désarroi que vivent ces pauvres parents depuis la semaine dernière!<p>Jadis, on identifiait aisément un drogué. Les signaux étaient limpides: des vêtements noirs élimés, une barbe de trois jours, un bouquin de William Burroughs dans la poche arrière du pantalon. Aujourd'hui, la situation ne cesse de s'embrumer. Comme si les innombrables scandales de dopage sportif ne suffisaient pas, voilà que Geneviève Jeanson confesse avoir carburé à l'EPO depuis l'âge de 16 ans. <p>Imaginez l'effarement des vertueux parents devant ces athlètes qui utilisent, en fin de compte, les mêmes méthodes que les romanciers de mauvaise vie! <p>À qui se fier? L'entraîneur de fiston est peut-être un Bukowski en puissance!<p>L'image fera sans doute sourciller. Il est périlleux d'associer sport et littérature. La dernière fois que je m'y suis risqué, j'ai essuyé un joyeux tollé: les gens de lettres n'aiment pas être comparés aux sportifs.<p>N'empêche: lorsque j'ai de la difficulté à écrire, lorsque je perds courage entre deux chapitres, j'imagine Emil Zátopek en train de courir tout seul, en pleine tempête de neige. Loin du stade, loin des caméras. Chaussé de grosses bottes d'hiver.<p>Il me semble alors, pendant un bref instant, percevoir la nature essentielle de mon travail.<p><b>LE COIN DU BRICOLEUR</b><p>Coïncidence: alors que, la semaine dernière, je vous narrais la migration de ma bibliothèque, le romancier Patrick Brisebois déménageait aussi la sienne. À en croire son blogue, Patrick a cependant éprouvé quelques difficultés techniques: à peine rendu au classement des B, l'espace de rangement faisait défaut.<p>Patrick, je vais te révéler le truc millénaire des bibliothécaires alexandrins: il faut ranger les livres horizontalement, à plat sur le plancher, une strate après l'autre.<p>Ça n'a pas l'air très pratique, protesteras-tu. Comment circule-t-on dans la pièce par la suite? Faut-il aménager de petits sentiers pour se déplacer entre les livres? <p>Au contraire, voilà tout le secret de l'affaire: il faut uniformément étendre plusieurs couches de livres dans <i>tout</i> l'espace disponible, mur à mur. Rangés de la sorte, ils forment un plancher flottant – une manière de moquette moelleuse et insonorisée. Grâce à cette technique, une encombrante bibliothèque n'occupe désormais que 6 ou 7 cm d'épaisseur au ras du sol. <p>À peine noteras-tu que le plafond se trouve un brin plus bas qu'avant. <p>Certes, chaque fois que tu ajouteras des livres, l'espace vital se réduira un peu. Tu pourras encore circuler debout pendant plusieurs années, puis il faudra éventuellement te courber, t'agenouiller, ramper dans le mince espace entre les livres et le plafond – mais même si tu lis à la vitesse grand V, cela ne devrait pas t'inquiéter avant un bon moment. Tu as plusieurs décennies de tranquillité devant toi. <p>Ne me remercie pas, ça me fait plaisir.
Sans être père, je comprends que les enfants ne soient pas l’exclusivité des parents. Ceux-ci auront beau se « désâmer » de toutes les façons, tôt ou tard leur progéniture fera leur honneur ou pire causera leur défaite. Je suis un tenant du méfiez-vous des premiers qu’on encense trop. Méfions-nous aussi du performer ou de celui ou celle qui veut aller jusqu’au bout’ du bout’. Ceux-là quand ils dérapent, c’est pas un cadeau pour ceux qui en ont la charge. J’ai vu beaucoup de ces jeunes désabusés vidés complètement de toutes émotions. Le vertige de la gloire est égal à celui des bas-fonds. Pathétique!
Les sports! J’ai déjà dit ce que j’en pensais ici même dans d’autres chroniques. Les louanges sont une maladie contagieuse et souvent incurable. Il y a trop d’argent à faire pour laisser tomber un rêve qui n’en est plus un lorsqu’il faut mentir pour se hisser au bout’ du bout’. Ce n’est pas le sportif lui-même qui se dope, son entraîneur, lui est un drogué. La discipline, l’effort et la saine compétition qu’il est écrit. Pis à part ça? Pu grand chose de ce que l’on a toujours voulu croire à tout prix. Faire plaisir à peupa et à meuman? J’ai compris ce désir effréné quand je me suis rendu compte que je me détruisais moi-même en voulant me rendre jusque là.
Un jour un type très ferré en littérature et en écriture m’a dit: il faut se méfier des livres qui comptent plus de 600 pages. Je ne l’ai pas compris sur le coup. Faisait-il allusion qu’un livre trop épais équivaut à de la frime? Non pas forcément. Mais il faut avoir quelque chose d’important à révéler ou à taire comme semble l’avoir fait M. Mulroney avec son bouquin de 1339 pasges. Mme Legault à raison, des livres comme ça, c’est lourd à porter en voyage. A la longue on peut se donner un tour de rein comme cela lui est arrivé justement.
Chacun veut être un artiste pour pouvoir faire son numéro. Seuls les vrais pros y arrivent. J’ai beaucoup de respect pour ceux-là. Sont-ce vraiment des héros? Oui, c’en sont.
Et ceux qui travaillent dans un bureau, un magasin, un garage ou une usine sont-ils exempts de tomber dans l’enfer de la drogue, qu’elle soit légale ou non? Malheureusement, je crois que non. Non pas que tous les patrons soient méchants, mais certains dirigeants d’entreprises oublient qu’ils ont embauché des êtres humains et non fait construire des robots pour effectuer les tâches afin que l’entreprise fonctionne comme sur des roulettes. Ces derniers exigent parfois trop de leurs employés. Soient ces derniers tombent malades et devront consommer raisonnablement des médicaments, soient ils se gavent de drogues, légales ou non, en pharmacie ou sur le marché noir, afin de maintenir un rythme de travail infernal, jusqu’à ce que le corps et le cerveau crient au secours et que ces deux entités devront être au repos forcé pendant des mois, voire des années.
Existe-il un domaine de la vie totalement exempt de la drogue? Permettez-moi d’en douter.
J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour Emil Zapotek, ce tchèque venu de la planète Mercure, qui a dominé pendant des années, sur le plan international, les courses de fond et même le marathon. Cet homme devait aimer courir avec des pieds ailés. Ça ne devait pas l’empêcher de pratiquer son sport, de passer des heures à renforcer ses muscles et sa capacité respiratoire.
À voir le nombre de jeunes poussés souvent par leurs parents à participer aux concours d’humoristes, de chanteurs, de danseurs, … Ces professions prennent du galon. Le sport reste une activité appréciée mais les stéroïdes anabolisants et les problèmes de santé liés à l’exercice de sports de haute performance en font réfléchir un certain nombre.
Le sport fait partie de la culture. Or ils souffrent tous les deux d’un mal pernicieux: le désir d’être une vedette en faisant l’impasse sur des années de préparation. Un « Loft Story » et Star Académie créent des vedettes-champignon comme l’Epo et les stéroïdes produisent des « winners »: Jeanson, Johnson. La chute est d’autant brutale lorsque les feux de la rampe s’éteignent et que d’autres » bigalous » vous remplacent sous les projecteurs.
Vous avez parfaitement raison, l’écriture d’un roman se compare à un marathon. Il demande du silence, du temps et beaucoup de modestie face à l’obstacle. La connaissance profonde de ses limites est le gage de la réussite. Les vedettes instantanées vivent dans un mirage dans lequel l’appréciation des choses restent à la surface.
Un être d’exception, dans le sport comme dans le show-business est souvent une personne qui aime ce qu’elle fait et le fait avant tout pour elle. C’est une passion qui la ronge et en fait une personne à part. Je pense ici à cette coureuse de fond, Émilie Mondor, dont l’amour de son sport en a fait une star qui brille maintenant dans le ciel. Ici, on oublie les médailles et les millions, nous sommes devant ce qu’il y a de plus beau chez l’homme: l’intelligence dans la générosité.
Je t’aime Geneviève Jeanson ( avec ton visage d’ange pervers, à qui on donnerait le bon Dieu sans confession , ce qui est déjà fait ) et toi aussi Manon Jutras !
Je n’en ai que pour votre bibliothèque, strate par strate. André Franquin a déjà donné l’idée à son Gaston LaGaffe et, en images, c’est vraiment rigolo ; Gaffes, bévues et boulettes #11, gag 739, page 27. On y voit des spéléologues, dont Prunelle, qui descendent dans une caverne de livres et découvre le rassasié lecteur, ce cher Gaston qui ronfle bien endormi sous et sur ses livres.
Vous êtes amateur de bédé, non ? Je sais, je ne dois pas l’ébruiter, mais tout de même, voilà le matériau idéal pour votre plancher flottant et votre plafond volant. Ces albums ont la qualité inestimable, pour l’édification de votre caverne livresque, d’être assez uniformes. Car j’imagine bien que vous ne conseilleriez pas quelque truc, à ce pauvre Patrick Brisebois à qui il reste 26 lettres à caser, que vous n’avez pas vous-même essayé.
Si je comprends bien, plus on dévore de livres et plus il y a de chance que l’on se laisse avaler par eux. Plus on lit, plus notre espoir vital rapetisse. Cependant, plus on lit, plus notre espoir vital est insonorisé et alors, plus on peut lire ! Vous vous êtes flanqué dans un cercle infernal dont il vous sera difficile de sortir, vous en êtes averti.
Un bon conseil, délaissez tout de suite la lecture des albums bébé, ils vous montent à la tête et vous allez faire plein de gaffes.
Ne me remerciez pas, ça me fait plaisir.