L'heure a sonné de sortir du placard: j'aime beaucoup la science-fiction. Je trouve même qu'il s'agit d'un grand genre – dans la mesure où l'on puisse affirmer sans broncher qu'il existe de grands et de petits genres.
On l'a souvent dit, la science-fiction est un révélateur extraordinaire: pas forcément de ce que nous allons devenir, mais assurément de ce que nous sommes déjà devenus. Pour les historiens de demain, aucun corpus n'en dira autant sur notre civilisation que la science-fiction. Ironique, non?
Si je ne peux espérer être érudit en la matière (le corpus science-fictionnel est d'une complexité qui flanquerait des maux de tête à Marie-Victorin lui-même), j'aspire du moins à me tenir un tout petit peu au courant.
Or, il suffit de suivre un peu les flux RSS pour voir repasser à répétition les mêmes sujets. Qu'est donc la S.F. devenue? Assiste-t-on à sa disparition? Vers où doit-elle se diriger? Écrire de la S.F. est-il seulement encore envisageable de nos jours?
Ça sent l'inquiétude, en somme.
Mais au-delà de la simple paranoïa – possiblement attribuable à l'esprit de ghetto -, cette inquiétude semble procéder de réelles tendances. Après des décennies d'expansion, la science-fiction serait-elle en voie d'imploser?
Selon l'une des théories souvent évoquées, la technosphère évoluerait si rapidement, depuis vingt ans, que la réalité ferait désormais compétition à la science-fiction. (Cette idée refait si souvent surface, en fait, que le grand classique d'Alvin Toffler, Le Choc du futur, semble encore pertinent même quarante ans après sa publication.)
Récente variation sur le thème: Philip Marchand affirmait dans le National Post que le fantastique serait en train de miner la science-fiction – et pas seulement à cause de la popularité de séries comme Harry Potter, mais par contamination. Ainsi, au sein même des ouvres de science-fiction, l'explication scientifique perdrait du terrain au profit des deus ex machina et autres tours de passe-passe simili-rationnels.
S'il faut en croire Marchand, nous serions en train d'assister à l'accomplissement de ce qu'affirmait Arthur C. Clark: "Au-delà d'un certain degré de complexité, toute technologie devient indissociable de la magie."
L'explication, bien que séduisante, ne vaut sans doute que pour la S.F. grand public. La science-fiction se caractérisant par une abondance de sous-genres, on peut supposer qu'il restera toujours une majorité d'ouvres d'obédience rationnelle (pour ainsi dire).
Mais si je puis me permettre d'ajouter mon grain de sel, il me semble que la science-fiction jouira d'un très bel avenir en dehors même de la science-fiction.
En effet, la prolifération d'ouvres cadrées dans un futur proche, pratiquement indiscernable de notre présent – je pense par exemple à The Road (C. McCarthy) ou à Little Brother (C. Doctorow) -, suggère l'émergence d'une science-fiction qui reposerait plutôt sur la manière que sur le thème.
Autrement dit, une littérature qui consisterait moins à développer des sujets science-fictionnels qu'à donner à des sujets conventionnels une texture science-fictionnelle. Bien qu'il soit difficile d'en cerner exactement les balises, des romans tels Cryptonomicon de Neal Stephenson ou JPod de Douglas Coupland me semblent emprunter cette voie.
En fait, j'ai parfois l'impression que la science-fiction traditionnelle, après des décennies d'accélération, s'apprête désormais à être éjectée comme un étage calciné de lanceur Saturn, laissant une minuscule capsule – le ton – continuer son chemin vers les orbites supérieures.
C'est un héritage qui en vaudrait bien un autre, non?
PENDANT CE TEMPS, AU GHANA
Blogueuse invitée pour les prix Nebula, l'auteure Nnedi Okorafor signe un billet aussi intéressant que révélateur où elle demande: l'Afrique est-elle prête pour la science-fiction? (La réponse est: oui, mais pas la même science-fiction.)
La question est intéressante parce qu'elle souligne combien la science-fiction est un genre occidental, voire anglo-saxon, mais aussi combien ce genre dépend lourdement des acquis technologiques du lecteur.
Okorafor cite à ce sujet Naunihal Singh, un professeur à l'Université de Notre Dame, qui se rappelle avoir visionné La Matrice parmi un auditoire de Ghanéens ostensiblement indifférents. "Il est difficile de faire craindre à des gens un futur où les ordinateurs contrôlent le monde, alors qu'ils ont de la difficulté à faire fonctionner l'ordinateur qui se trouve sur leur bureau."
La science-fiction est un révélateur extraordinaire: pas forcément de ce que nous allons devenir, mais assurément du fait que nous n'y arriverons pas tous en même temps.
Je ne suis pas un grand lecteur de SF.
Mais j’ai une idée comme ça: il me semble que Phillip K. Dick avait déjà ouvert cette voie, ie se servir d’un cadre science-fictionnel crédible, pour ensuite explorer l’âme humaine selon sa propre vision.
Et cette voie semble encore l’avenir de la SF, des années après son décès. Lire Ubik pour comprendre ce que j’essaie de dire.
Il est par ailleurs vrai que Dick maîtrisait autant le cadre sc-fictionnel que l’aspect « romanesque ».
Dans la lancée de ma très expéditive chronique sur la SF , je vous recommande de jeter un coup d’oeil
J’aime toute la littérature. À part celle à l’eau de rose. Alors la science-fiction, j’adore bien sûr. Le fantastique aussi. J’ai lu La route et je me suis bien régalée. On assiste effectivement à un genre de littérature qui traite de manière science-fictionnelle son sujet. Je trouve ça palpitant. Je pourrais vous parler de mes projets de création personnelle mais je garde secret. Chut…
La manière? , c’est à dire l’écriture , l’agencement des chapitres , des paragraphes , la technique d’écriture?
J’ai été très interessé par ce qu’en a dit S KING dans ce livre où il livre ses « secrets » d’écriture . Si l’on admet qu’il fait ou a fait de la SF. Il s’est expliqué au sujet de « sa » manière, en dévoilant que le paragraphe serait la clé du suspense. Il me semble qu’il a découvert le secret de la manière. Je marche à tous les coups…
Sur n’importe quel thème?
J’adore aussi le spationaute qui zigzague entre les galaxies à vitesse supraluminique, pour explorer l’univers « infini ». J’ai besoin de croire que l’univers est infini. On m’a dit que depuis le big bang il était en passe de le devenir . Mais c’est incroyable à partir d’une quantité de matière finie . Sans compter la matière noire. Je suis dans le brouillard. La chose ne paraît plus impossible dans un monde à n dimensions, avec des cordes en plus…. Que j’ai bien du mal à entrevoir . Mais avec des yeux de mouche peut-être…
Les écrivains de SF devraient s’ajuster à la « technosphère » , mais il semble bien que se soit l’imagination qui fasse défaut.
L’écrivain de SF n’a plus la foi.
Par exemple le thème de la rencontre avec une autre civilisation , est loin d’être tari , puisque en l’état actuel, nous sommes « coinçés » sur la Terre comme des rats sur un navire en train de couler. (voyage vers mars dans 20 ans?) Nous devrions nous évader de plus belle vers « Antarès » ou Io , mais non… Da Vinci Code ou H Potter prodigieusement ch par rapport à Odyssée de l’espace
Le thème de l’adaptation à une Terre surpeuplée , malgré la technosphère « triomphante », se rapproche dangereusement de la réalité. Car lcelle ci ne triomphe pas contrairement à ce qui est rabaché par les médias. Chaque « application » ou activité humaine, révèle son lot de mauvaises surprises. OGM, Rond Up, exploitations des mines , deforestations. Le savant traîne un boulet depuis Hiroshima, et « toutes les avançées technologiques » se revèlent pleines de « surprises » .
A mon humble avis , la SF ne peut plus , et ne veut plus croire en la science ? Et c’est grave…