Impertinences

Complots et manigances

Cette semaine, la télé jouait chez moi, à PBS, l’excellente émission d’affaires publiques NOW. On y recevait le réalisateur d’un film parlant de l’étrange disparition de l’automobile électrique aux États-Unis (Who Killed the Electric Car?). Et ce qu’il décrivait ressemblait fort à un complot, du moins à une collusion, entre l’industrie automobile et les pétrolières pour faire croire que c’est le public qui rejetait l’idée de voitures électriques, et ainsi scraper ce véhicule d’avenir pour mieux conserver leur lucratif et polluant oligopole.

Voir à ce sujet la bande-annonce du film: www.sonyclassics.com/whokilledtheelectriccar/.

Pourtant, le gars (Chris Paine) n’était pas en camisole de force. Il avait même des éléments de preuve plutôt convaincants. Et l’animateur lui parlait normalement, lui permettait d’exposer sa théorie, le traitait comme une source crédible. Comme quoi, l’idée de complot n’a pas à être considérée d’emblée comme une hérésie. C’est un sujet qui est revenu souvent ces derniers mois dans les médias. La plupart du temps, ce fut pour rabrouer ceux qui soutiennent les thèses contenues dans le documentaire Loose Change, réalisé par Dylan Avery, qui soulève de sérieux doutes sur la version officielle que nous ont servie les médias à propos des attentats du 11 septembre. Le document a fait un hit sur Internet, où l’on peut le visionner gratuitement (suffit de faire une recherche avec Loose Change).

Richard Martineau, Patrick Lagacé, et maintenant Lysiane Gagnon et Mario Roy ont tous écrit des papiers qui laissent supposer que tous ceux qui prêtent foi à quelque théorie du complot que ce soit sont des illuminés qui ne devraient surtout pas briguer les suffrages. Tout de suite, on sort les ovnis…

La première victime a été Richard Bergeron, le chef de Projet Montréal, qui a écrit dans un livre récent qu’il ne croyait pas que c’était un avion qui avait percuté le Pentagone le 11 septembre. Puis, ce fut au tour d’Amir Khadir d’y goûter. Dans son cas, c’est encore plus sournois puisque, quand on lit l’article de Katia Gagnon dans La Presse du 7 juin, on découvre qu’il ne soutient pas personnellement la thèse voulant que les attentats aient été une mise en scène, mais qu’il considère qu’une enquête publique serait la bonne chose à faire. Y’a comme une différence, non? Nous en parlons d’ailleurs sur le site des Zapartistes (www.leszapartistes.com).

Pourtant, ça se peut, un complot. Il y en a déjà eu. Pourquoi pensez-vous que les militaires entourent leurs opérations de secret? Pourquoi y a-t-il des espions? Il y a eu l’incendie du Reichstag, mis en scène par les nazis pour soulever la vindicte populaire contre les Juifs. Il y a eu le canular de l’Homme de Piltdown, le faux chaînon manquant, qui a pourtant mystifié les chercheurs pendant des années. Il y a eu les supposés bébés tués par des soldats irakiens lors de la première guerre du Golfe. C’est donc arrivé que le grand public ait cru, pendant un moment, à une version de la réalité qui s’est plus tard révélée fausse. Il faut accepter que ça se peut. Souvent, quand ça a l’air d’être de la marde, que ça sent la marde, que ça goûte la marde, c’est parce que c’en est…

Beaucoup de gens croient que le 11 septembre était "arrangé". Pour ma part, je n’en écarte pas la possibilité. Je ne dis pas que j’appuie cette thèse, je crois juste qu’elle mérite d’être considérée. En fait, je trouve que refuser de la considérer ouvre justement la porte à se faire monter d’énormes bateaux dans l’avenir. Je ne crois pas la version Bush. Je ne crois pas plus la version qui dit que c’est la CIA et le Mossad qui sont derrière tout ça. Je ne crois personne, là-dedans. Je doute.

Et si je n’ai pas le droit de douter, si c’est "Crois ou meurs" ou sa version moderne "Fais au moins semblant de croire pour être du bon bord ou tu croupiras dans les miasmes de la marginalité sulfureuse", ça m’inquiète. Voilà Khadir associé subtilement à la mouvance islamiste, ce qui discrédite son parti de gauche qui tentera de faire une percée aux prochaines élections provinciales. Idem pour Richard Bergeron au municipal. On dirait que quelqu’un, quelque part, essaie de discréditer tout ce qu’il y a de gauche au Québec. Suffit de voir aussi avec quelle virulence et quelle fréquence les médias véhiculent les thèses de Michel Kelly-Gagnon et autres qui affirment sans rire que c’est le milieu communautaire qui est le frein principal au développement du Québec. Quand on subodore le filtre partisan qui oriente le choix du courrier des lecteurs de La Presse, on finit par se demander:

Coudon, y aurait-il un complot?

Je me le demande…