La semaine dernière, j’avouais candidement que le ton de plusieurs manifestations écologistes m’énervait, que j’avais eu "ma dose" de grandes marches vertes, et que j’étais parfois découragé du peu d’impact de cette approche dans la population en général. Je concluais toutefois que les écolos avaient raison pour l’essentiel, que la récupération de l’imagerie verte par les fabricants de voitures était une hypocrisie crasse, que les arguments anti-écologistes étaient fallacieux, et qu’il faudrait bien un jour "casser le party" de ceux qui ne veulent rien entendre des préoccupations environnementales pour soi-disant faire rouler l’économie.
Je vais faire ici de la stratégie ouverte. Mon but dans cette chronique était de rejoindre ceux qui sont agacés eux aussi par le discours écologiste et qui, ne cherchant pas plus loin, en rejettent les idées parce que la forme ne leur plaît pas. Il y en a beaucoup des comme ça, qui s’opposent aux écolos, ou ne les écoutent simplement pas, juste à cause d’une antipathie naturelle face à quelques traits culturels associés à la cause. Le côté granole-krishna. Je voulais être un peu ratoureux, commencer par donner l’impression que j’étais des leurs, pour ensuite avouer que j’étais d’accord sur le fond avec la plupart des revendications écologistes.
Or, en réaction à cette chronique, les commentaires que j’ai reçus ont été très majoritairement le fait d’écolos déçus ou frustrés que je les aie graffignés au passage. J’avoue qu’une chronique dans Voir n’était sans doute pas la tribune idéale pour tenter ma petite stratégie. Il aurait mieux valu que j’écrive une lettre ouverte pour Summum ou le magazine Les Affaires.
Mais à mon avis, il y a quelque chose de révélateur dans les réactions blessées de ces verts tendres d’écologistes. Comme plein d’autres débats, celui-ci vient de glisser. La question de l’environnement n’est plus un débat d’idées, c’est devenu un conflit entre clans. Il faut clairement démontrer son alignement, et ce, autant pour les idées que pour toute l’esthétique qui les accompagne, sinon on est d’emblée associé à "l’ennemi". Vous croyez qu’il n’y a que Bush qui fasse dans le "Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous"? Détrompez-vous, c’est la posture la plus répandue, à gauche comme à droite.
Ben oui, les marches ont leur utilité. J’y retournerai sûrement. Et j’avoue qu’il m’est souvent arrivé de danser comme un fou au son de tam-tams brésiliens. Je me demande seulement si c’est comme ça qu’on va arriver à rejoindre ceux qui tripent sur les chars modifiés et le heavy métal ou les vestons Armani et les 5 à 7 au centre-ville.
Steven Guilbeault a déjà fait couper sa couette et je suis sûr que ça a grandement contribué à faire en sorte que son message rejoigne plus de gens. Tiens, question de sortir les manifestations vertes de leur folklore habituel, je suggère que la prochaine marche exige une tenue vestimentaire "d’affaires". Il faut jouer à fond la carte de la crédibilité. Tailleurs et vestons-cravates seulement.
Pour le reste, rassurez-vous, je suis des vôtres. Et même si je critiquerai sûrement encore le mouvement écologiste, ce n’est que dans l’espoir que ses idées essentielles rejoignent le plus de gens possible. Parce qu’après tout, les progrès de la cause écologique ne se mesurent pas au nombre de comptables qui se rendent à leur bureau coiffés de bonnets péruviens en écoutant du Manu Chao.
TRUDEAU ET LE MULTICULTURALISME
C’était à prévoir, dans la série "tout ce qui peut me gosser le plus finit par arriver", voilà fiston Trudeau candidat libéral dans Papineau. En passant, bonjour les symboles… Ne reste plus qu’à voir le fils de Don Cherry se faire élire dans René-Lévesque…
Au-delà de la réaction épidermique que m’inspire le personnage, il y a les idées qu’il représente qui me font craindre des lendemains exaspérants. À commencer par le "multiculturalisme" de la charte à papa, qui a défini l’identité canadienne comme une collection d’identités culturelles diverses, question de barrer la voie à une identité québécoise qui se voulait rassembleuse.
Or, c’est précisément là que réside le front du débat politique au Québec. Le rejet des accommodements déraisonnables en témoigne: la population majoritairement francophone et laïque du Québec désire que les immigrants s’intègrent et même, le retour de gros mots, qu’ils s’assimilent à la majorité.
Le sujet est délicat. Où trouver son équilibre entre le racisme et l’intolérance et la négation de soi-même? Imaginez une seconde un immigrant hongrois dont le nom serait Viktor Flakdevomy. Il est clair que, tôt ou tard, à cause de l’image fort désagréable évoquée ici par la sonorité de son nom pour la majorité, celui-ci pourrait décider d’en changer pour mieux s’intégrer. Or, si c’est possible pour cette raison, ça l’est sûrement pour d’autres.
Mais si cette revendication légitime d’une majorité de Québécois n’est pas reçue, et que des politiciens tenants de la ligne dure de la charte des droits et libertés décident de la travestir pour mieux l’écraser, on pourrait se retrouver très bientôt les deux pieds dans quelque chose de très désagréable…