L’écho des Cantons

Quand indie rime avec country

Plusieurs groupes de musique accolent le terme indie à la qualification de leur musique. On se retrouve donc avec de l'indie pop, de l'indie rock, de l'indie folk… Indie signifie "indépendant" (et non pas "indien"!). La musique faite de manière indépendante a la réputation d'avoir un son qui n'est pas commercial, qui n'est pas formaté pour les radios. De nos jours, le terme est un peu galvaudé car plusieurs groupes dits indie jouent à la radio et vendent des milliers d'albums. On peut penser à Arcade Fire et Franz Ferdinand. Ces groupes n'ont plus rien d'indépendant!

Au Québec, comme partout ailleurs, la musique se fait très souvent de façon indépendante. C'est de plus en plus le cas avec la facilité d'utilisation et l'accessibilité des logiciels permettant d'enregistrer et de mixer la musique. Un musicien peut facilement aménager un petit studio chez lui et créer sa musique pour ensuite en faire ce qu'il veut. S'il souhaite en retirer un petit pécule, il devra faire preuve d'ingéniosité afin de se faire connaître pour ensuite vendre des albums et des billets de spectacle. Sans le soutien des médias et d'une maison de disques aux rouages bien huilés, il est difficile de rejoindre son public.

Cela m'amène à vous faire part de mes réflexions sur la scène que je considère comme la plus indépendante du Québec: le country québécois. Le country a la cote ces temps-ci. Johnny Cash est pleuré par tous les snobs de la musique et les White Stripes reprennent Dolly Parton. Pour ma part, j'adore des groupes country américains tels Wilco et Okkervil River. Toutefois, le country québécois reste "quétaine" dans l'esprit de beaucoup de gens… et dans le mien. Malgré le désintérêt médiatique et des stratégies promotionnelles modestes, un nombre important de chanteurs country du Québec roulent leur bosse. Ils donnent des spectacles devant des salles pleines et vendent des albums. Beaucoup d'albums.

Afin de mieux comprendre le phénomène, je me suis entretenu avec M. Gervais Gilbert. Il organise La Soirée des légendaires, un gros spectacle country qui se déroule le 20 octobre au Granada de Sherbrooke. Il s'agit d'un événement, car "de véritables légendes vivantes" seront réunies sur scène. "Leurs succès sont repris par toute la communauté artistique. C'est eux qui ont les plus gros hits!" M. Gilbert me parle de Réjean et Chantal Massé avec émotion. Ce duo père-fille sillonne les routes du Québec depuis 32 ans et il aurait vendu plus de trois millions d'albums! Son plus grand numéro 1 est L'Hôtel et la Boisson; M. Gilbert m'affirme que 1 500 000 exemplaires de cette chanson ont été vendus au pays. Quant à Georges Hamel, ce porte-étendard du country québécois, il a su ajouter quatre trophées Félix aux 2,5 millions d'albums vendus en carrière. La dernière légende de M. Gilbert est Denis Côté, le roi du folklore québécois. En plus d'être champion mondial d'accordéon, il fut récipiendaire d'un prix de l'Académie Charles Cros. Il aurait vendu quelques centaines de milliers d'albums.

Malgré tous ces chiffres, le mystère reste entier. C'est comme si cette vie culturelle se vivait de façon parallèle aux autres. Toutefois, une chose est sûre: on a beaucoup à apprendre de la scène country québécoise. Qu'on la trouve "quétaine" ou non, elle mérite notre respect.