En février et mars 2007, bien avant le débat sur les accommodements raisonnables, l'Institut du Nouveau Monde (INM) a sillonné le Québec afin d'établir un dialogue entre experts et citoyens sur le sujet de la culture. La question était: «Que devient la culture québécoise et que voulons-nous qu'elle devienne?» Afin de dégager des pistes de réponse, des Rendez-vous stratégiques citoyens sur la culture ont eu lieu, dont certains à Sherbrooke. Plusieurs acteurs du milieu culturel d'ici y ont participé. Le livre La Culture, notre avenir! vient de sortir et résume les échanges.
C'est la culture au sens très large qui intéressait l'INM; ça allait de l'identité québécoise jusqu'à l'interculturalisme en passant par l'importance de la langue française. Pour ceux qui ont suivi la commission Bouchard-Taylor, cela peut sembler de la redite, mais (une chance) le débat ne s'arrêtait pas là.
L'élément qui m'a tout particulièrement intéressé parmi les conclusions de l'INM concerne la régionalisation culturelle. Les échanges effectués un peu partout au Québec ont permis de constater que la «montréalisation» de la culture pose problème. Il y a une richesse culturelle dans les régions qui a besoin d'être reconnue et diffusée. On parle même d'une «nécessité de régionaliser le développement culturel du Québec» afin de contrer différentes difficultés, dont celle de l'accessibilité. Pour y arriver, il serait important de rééquilibrer les ressources entre les régions et Montréal. Certains proposent même d'installer des ambassades des régions du Québec dans la métropole. Ça paraît plutôt loufoque au premier abord, mais quand on y pense, ce n'est pas si bête que ça…
Lors de ces débats organisés par l'INM, les participants ont beaucoup blâmé les médias; la majorité de ceux-ci ne rendent pas compte des réalités régionales qui façonnent l'identité et la culture québécoises. De plus, peu de place est accordée aux créateurs ouvrant ailleurs qu'à Montréal. «On reproche aux médias de masse d'entretenir le star system et de négliger une multitude d'expressions artistiques et d'activités culturelles, pourtant dynamiques, sur l'ensemble du territoire du Québec.»
On ne parle pas d'une «fracture culturelle irrémédiable», mais il est grand temps d'agir.
Faire sa part
En tant que rédacteur en chef du Voir Estrie, je suis très sensible à cette situation. Je suis heureux de souligner avec un «gros marqueur d'une couleur qui "flashe"» les initiatives des artistes professionnels d'ici; accorder la couverture du journal de cette semaine à Dactylo Fidelity va en ce sens. Il y a toujours place à l'amélioration, mais je crois que le Voir Estrie joue plutôt bien son rôle de mise en valeur de la diversité culturelle des Cantons-de-l'Est.
Toutefois, je suis d'avis que cette responsabilité n'incombe pas uniquement aux médias. Plusieurs personnes du milieu culturel ont à faire leur part. Les administrateurs de salles de spectacle et de festivals de l'Estrie devraient inclure davantage de projets musicaux et théâtraux de la région dans leur programmation. C'est bien d'aider la relève de Montréal, mais pourquoi ne pas prioriser celle d'ici? Même chose pour les galeries d'art, qui pourraient offrir un peu plus de leurs espaces aux artistes professionnels des Cantons-de-l'Est. Il y a aussi les magasins de disques et de livres qui aideraient grandement la cause en mettant les produits locaux en évidence. Reste à savoir si tout ce beau monde se sent concerné.