L’écho des Cantons

Cantons critiques

Il y a de cela quelques jours, je suis tombé en ouvrant la radio sur une chronique plutôt intéressante à l'émission Vous êtes ici, sur les ondes de la Première Chaîne de Radio-Canada. L'animateur Patrick Masbourian recevait le journaliste Stéphane Baillargeon, qui nous entretenait sur «l'état critique de la critique». Il y a 30, 40 ans, on retrouvait un grand nombre de journalistes qui s'y consacraient dans les différents médias du Québec, que ce soit pour le cinéma, le théâtre, la musique, les arts visuels… Je crois que les critiques de l'époque ont favorisé l'émergence d'une élite culturelle québécoise qui est célébrée de par le monde.

«Pourquoi retrouve-t-on de moins en moins de Robert Lévesque et de plus en plus d'Anne-Marie Losique?» demandait l'animateur. Depuis quelques années, on constate malheureusement que le milieu de la «critique critique» s'effrite en raison de pressions diverses faites bien souvent de manière insidieuse. Elles proviennent entre autres des entreprises culturelles, pour lesquelles une critique négative peut prendre la forme d'une petite tornade… On retrouve donc davantage de «plogues» dans les médias et ce, au détriment de véritables critiques.

En parallèle à tout cela, une grande tendance s'observe: la critique «amateur» sur Internet. Une multitude de blogues consacrés à la critique du milieu culturel a vu le jour depuis quelques années. On retrouve d'ailleurs sur le site www.voir.ca d'excellentes critiques de la part des membres. Cette liberté d'opinion accordée au plus grand nombre est une bonne nouvelle en soi. Toutefois, il ne faudrait pas évacuer l'opinion des experts, qui pondent habituellement des critiques davantage informées.

La situation en Estrie

Dans les Cantons-de-l'Est, force est de constater que le milieu journalistique qui couvre la culture d'ici ne verse que très rarement dans la «critique critique». Certains éléments expliquent en partie cette situation. Premièrement, la très grande majorité des spectacles en Estrie ne tiennent l'affiche qu'un seul soir. Pour critiquer un show, il faut évidemment le voir, et pour publier (ou diffuser) une critique, il est préférable qu'au moins une autre représentation ait lieu.

Deuxièmement, afin de bien couvrir la scène culturelle d'ici, les journalistes se doivent d'être des généralistes. Ainsi, ce n'est pas tout le monde qui oserait effectuer une critique théâtrale qui nécessite une compréhension de l'ouvre de Tchekhov, par exemple. Une critique informée demande un minimum de bagage.

Difficile pour moi de juger si je possède le background adéquat pour aborder absolument tous les sujets en détail, mais je dois avouer que je prends un malin plaisir à critiquer le milieu culturel estrien depuis mon arrivée au Voir Estrie. Que ce soit dans le journal ou sur mon blogue, j'ai osé souligner de bons coups, ainsi que différents travers de productions auxquelles j'ai assisté. J'aimerais le faire davantage si le temps me le permettait.

Je suis d'avis qu'on enlise le milieu culturel d'ici à répéter qu'il est beau et fin. Une critique juste et constructive peut le projeter vers l'avant, et c'est ce que je souhaite ardemment.