Au cours de la fin de semaine, j'ai parcouru la plus récente parution d'une revue américaine que j'affectionne tout particulièrement. Cette publication, qui met de l'avant la scène musicale indépendante, se nomme Under the Radar, et le dernier numéro s'intitule «The Protest Issue 2008». On y jase du lien étroit entre le monde de la musique et celui de la politique en cette période (interminable) d'élections américaines. Ainsi, plusieurs groupes et chanteurs (Isaac Brock de Modest Mouse, Michael Stipe de R.E.M., Chris Walla de Death Cab for Cutie, Conor Oberst de Bright Eyes…), reconnus pour leurs positions tranchées à l'égard de la politique ou leurs implications dans différentes causes humanitaires, sont interrogés quant à la pertinence de ces prises de parole partisanes.
Malgré un dossier exhaustif, plusieurs questions restent sans réponse précise (cela va de soi). Est-ce que l'opinion d'une «vedette» peut influencer la population? Considérant la visibilité que les médias leur accordent, est-ce la responsabilité des artistes de s'impliquer politiquement ou socialement? Le débat est ouvert et je me permets de ramener ça à mon terrain de jeu, l'Estrie. Comme je suis ratoureux…
L'Estrie p(artisane)
Je crois très fortement en la résonance que peut avoir un message véhiculé par la culture. Je suis donc d'avis que la prise de position par le milieu des arts est importante lorsqu'il y a débat public, et ce, même (voire surtout) dans un contexte régional. Le dossier du Mont-Orford est un bon exemple, même s'il était également d'intérêt provincial. En prenant le bord des écologistes, plusieurs artistes (Richard Séguin, Clémence DesRochers, Serge Postigo, Marina Orsini, Vincent Vallières…) ont réussi à sublimer le débat entourant cette saga politique, sociale et environnementale qui se déroulait dans les Cantons-de-l'Est. Si on avait eu uniquement droit aux opinions des politiciens et des économistes, je ne crois pas que les conclusions auraient été les mêmes.
L'apport des artistes de la région aux réflexions concernant nos enjeux collectifs importe, car ce sont de libres penseurs. Mais sont-ils vraiment libres à ce point? Le milieu culturel des Cantons-de-l'Est étant en partie dépendant des subventions que lui accordent les différentes instances gouvernementales, il serait étonnant que des comédiens, des auteurs ou des musiciens de la région prennent position contre un dirigeant qui lui a offert du financement. Ça prendrait un brin d'audace. De plus, nos artistes locaux ne sont pas des «vedettes» à la Bono et ne peuvent pas tout se permettre; leur implication serait citoyenne et non dans le but de bénéficier d'une grande visibilité.
Malgré tout, je pense qu'il serait intéressant que notre milieu culturel s'implique davantage socialement et politiquement. Par exemple, je trouve amusant d'imaginer des artistes de l'Estrie appuyer un candidat lors d'une élection municipale. L'idée d'un Richard Séguin qui appuie le parti du Renouveau sherbrookois, c'est peut-être moins glamour que Bruce Springsteen qui s'associe à Barack Obama, mais avouez que ça dynamiserait le débat.